Ma mère était belle. Mon père avait raté le coche, j’aurais pu être beau. Pas beau et intelligent. Non, faut pas charrier, mais au moins présentable… Le jour de la giclée fatidique, il a dû penser à une vieille tante moustachue, et pan, un spermatozoïde blindé de gènes de thon a conquis le saint Graal. Bilan des courses : ma gueule. Merci du cadeau.
Souvent dans les ruptures, c'est pas le souvenir de ce qu'on a fait ensemble qui fait mal, mais la somme de projets qu'on ne réalisera pas en commun.
Y avait une grosse mouche à merde qui tournait autour de la lampe. Je l'aimais bien, moi, cette mouche. Cette mou-mouche. Cette biiiizzbizziii avec des gros yeuyeux. La mouche à babouche qui faisait des tours et des détours autour de la grosse lumière jolie...Je suis monté sur son dos, et on est passé en piqué tout près de la tête de mon copain Richard. Oulalalala la grosse tête qu'il avait! La honte! On a survolé la mienne aussi. Comme j'étais sur la mouche, la mouche elle en a profité pour se poser sur mes cheveux. C'est dingue comme j'ai des cheveux gros comme des lampadaires vus de dans moi. Mon amie la mouche m'a déposé sur mon crâne, on a papoté assis sur un tapis de pellicule, puis on s'est fait la bise et elle est repartie en chantant New-York, New York...
Il était fort quand même ce joint
On se fout en l’air : 1) Parce qu’on se sent vide ; 2) Parce qu’on se sent trop plein. C’est selon, mais c’est avant tout un problème de contenu et de contenant. C’est toujours le contenant qui trinque d’ailleurs : personne ne sortira d’ici vivant.
Mon pressing était tenu par un Japonais débonnaire, monsieur Kurosawa. Il avait la bonhomie légère des hommes du soleil levant et la peau plissée. Très plissée. Un détail physique pas très vendeur pour un gérant de pressing.
J’ai garé mes yeux dans les siens. Fallait savoir faire des créneaux.
Jack [représentant en alcools et spiritueux] était l’heureux propriétaire d’un gosier au design inspiré par le tonneau des Danaïdes, et ça le rendait imbourrable. C’était là un avantage considérable dans son corps de métier.
Ce jour-là, c'était en octobre. Il faisait soleil, mais pas trop, le genre de soleil faux-derche et collabo. Il y avait un fond frais dans l'air froid qui annonçait un hiver vicieux. Il passait sous la veste, s'immisçait sous la chemise, titillait les lombaires et vous donnait la crève en deux coups de cuillère à pot.
La saloperie.
Autour de la table, les heures défilaient, et avec elles, l'espoir de rester lucide. Au fond des verres, au milieu des clapotis, quelques sirènes chantaient. Elles m'incitaient à m'avancer encore plus loin dans l'ivresse. Elles tentaient de me persuader qu'en nageant, j'attendrais une île. Une île loin d'ici. Une île où Emma m'attendrait, où la vie commencerait enfin, calme et légère, comme dans les rêves que j'avais ébauchés avant de poser les panards dans ce trou à rats. Au bout du dixième verre, je nageais en crabe, et je pensais juste à boire la tasse.
Darius faisait deux bons mètres cubes et soignait sa silhouette au triple cheese-burger mayo-ketchup-bière-frites-oignons.
Son diététicien s’est suicidé et je sais pas comment tenait son cœur. Ce bout de myocarde faisait front face aux assauts répétés du cholesterol. Son cœur c’était Fort Alamo, et il était écrit qu’il se battrait jusqu’au bout.