Il en avait déjà trop encaissé depuis son entrée dans l'établissement. Il était arrivé à saturation. Son âme, plus que son amour propre, n'en pouvait plus.
Matthias se réveilla en sueur. Il venait de faire un rêve étrange dans lequel il se retrouvait nu comme un ver en plein milieu d'une rue, entouré d'une foule hilare qui le pointait du doigt.
Les épreuves ne sont que des étapes dont tu sortiras grandi. Pardonne à la vie si elle te fait du mal, le bonheur n’est jamais très loin…
Surprise, Isadora leva les yeux sur l’homme qui s’était penché pour l’aider à rassembler ses achats et qui l’observait, un sourire aux lèvres.
— M… Monsieur Dupin ? C’est bien vous ?
— Tu as une excellente mémoire, Isa.
Ils se relevèrent d’un même mouvement.
— Il y a des rencontres qui marquent plus que d’autres…, avoua-t-elle.
Elle fixa avec tendresse le septuagénaire qui lui souriait. Antoine Dupin, libraire de son état, l’avait accueillie à bras ouverts dans sa boutique pendant ses trois années de lycée.
— OK… Bon, Pixel, on montre notre petit coin de paradis à la Parisienne ?
— Hé ! Ne m’appelle pas comme ça ! s’insurgea-t-elle en lançant son poing libre à l’aveuglette en direction de ce qu’elle croyait être le bras de Julien.
— Ah, non, là tu as mal visé, c’est un peu plus haut que sous la ceinture…, se moqua-t-il.
— Que… quoi ?! s’affola-t-elle en remontant l’écharpe sur son front.
Julien se tordait de rire. Il la faisait marcher, comme d’habitude, et elle courait… comme d’habitude.
— Sérotonine… Je ne vous aurais pas cru fan de Houellebecq, déclara-t-elle.
Matthias gloussa sans vergogne.
— Lui non plus, se moqua-t-il.
— Oh, ça va, toi ! se vexa Philippe.
Isa regarda alternativement les deux hommes en souriant.
— J’ai loupé quelque chose ?
À sa grande surprise, le jeune homme se retourna et lui sourit franchement.
— Mon père déteste Houellebecq. Il a tout simplement perdu un pari contre Julien.
Peu importe le mal que cette vie nous a fait, il faut lui pardonner
Rien n'arrive par hasard. Tout ce que la vie nous inflige, toutes les épreuves qu'elle sème sur notre route, tous ces détours qu'elle nous fait prendre avant d'accéder au bonheur....tout ça nous aide à construire ce que nous sommes.
— Peu importe le mal que cette vie nous a fait, il faut lui pardonner. « Pardonne à la vie ! » me disait souvent mon père, « tu n’en as qu’une et elle a encore tant de choses à t’offrir ! »
— Ne t’empêche pas de pleurer, Matthias. Ce… ce n’est pas une faiblesse de pleurer. On n’en est pas moins un homme quand on exprime sa… sa peine.