Citations sur La pensée sauvage (21)
Les facultés aiguisées des indigènes leur permettaient de noter exactement les caractères génériques de toutes les espèces vivantes, terrestres et marines, ainsi que les changements les plus subtils de phénomènes naturels tels que les vents, la lumière, et les couleurs du temps, les rides des vagues, les variations du ressac, les courants aquatiques et aériens.
L'utilisation des ressources naturelles dont disposaient les indigènes hawaiiens était, à peu de choses près, complète ; bien plus que celle pratiquée dans l'ère commerciale actuelle, qui exploite sans merci les quelques produits qui, pour le moment, procurent un avantage financier, dédaignant et détruisant souvent tout le reste.
L’histoire mène à tout, mais à condition d’en sortir.
Nous acceptons le qualificatif d'esthète, pour autant que nous croyons que le but dernier des sciences humaines n'est pas de constituer l'homme, mais de le dissoudre.
Voici donc en quoi consiste le primat des infrastructures. D'abord, l'homme est pareil au joueur prenant en main, quand il s'attable, des cartes qu'il n'a pas inventées puisque le jeu de cartes est un "donné" de l'histoire et de la civilisation. En second lieu, chaque répartition des cartes résulte d'une distribution contingente entre les joueurs, et elle se fait à leur insu. Il y a des "donnes" qui sont subies, mais que chaque société, comme chaque joueur, interprète dans les termes de plusieurs systèmes, qui peuvent être communs ou particuliers : règles d'un jeu, ou règles d'une tactique. Et l'on sait bien qu'avec la même donne des joueurs différents ne fourniront pas la même partie, bien qu'ils ne puissent, contraints aussi par les règles, avec une donne quelconque, fournir n'importe quelle partie.
Les archives sont l'être incarné de l'événementialité.
Le marxisme — sinon Marx lui-même - a trop souvent raisonné comme si les pratiques découlaient immédiatement de la praxis. Sans mettre en cause l’incontestable primat des infrastructures, nous croyons qu'entre praxis et pratiques s’intercale toujours un médiateur, qui est le schème conceptuel par l’opération duquel une matière et une forme, dépourvues l’une et l’autre d’existence indépendante, s’accomplissent comme structures, c'est - à - dire comme êtres à la fois empiriques et intelligibles. C’est à cette théorie des superstructures, à peine esquissée par Marx, que nous souhaitons contribuer, réservant à l’histoire - assistée par la démographie, la technologie, la géographie historique et l’ethnographie - le soin de développer l'étude des infrastructures proprement dites, qui ne peut être principalement la nôtre, parce que l'ethnologie est d'abord une psychologie
Les êtres divins primitifs étaient informes, sans membres, et fondus ensemble, jusqu'à ce que survînt le dieu Mangarkunkerkunja (le lézard gobe-mouche) qui entreprit de les séparer les uns les autres et de les façonner individuellement.
Les gens du clan du poisson étaient censés vivre longtemps, avoir le cheveu fin ou rare : tous les chauves étaient présumés membres de ce clan. Au contraire, les gens du clan de l'ours se distinguaient par leurs cheveux longs, noirs et épais, ne blanchissaient pas avec l'âge, et par leur tempérament coléreux et combatif. On attribuait au clan de la grue une voix criarde, et c'était celui d'où provenaient les orateurs de la tribu.
Les clans du casoar, du crocodile, du serpent, du requin, et du poisson-marteau, avaient une nature belliuqueuse, ceux de la raie, de la raie à spatule, et du poisson rémora, étaient dits pacifiques. Du clan du chien on ne pouvait rien affirmer, car les chiens ont un caractère instable. On tenait les gens du crocodile pour forts et sans pitié, on prétendait que ceux du casoar avaient de longues jambes et excellaient à la course.