Citations sur La Moïra, tome 1 : La louve et l'enfant (38)
La mémoire est l'arme la plus redoutable de l'intelligence.
Tu aimes les étoiles? Ahum, regarde comme elles se cachent le jour et se réservent à la nuit pour consoler un peu les insomniaques et les allumeurs de réverbères.
Chaque jour, elle apprenait que devenir adulte, ce n'était pas devenir libre, contrairement à ce qu'elle avait espéré. Il s'agissait plutôt de céder aux obligations qu'imposait le destin. Des obligations de plus en plus nombreuses, et qui englobaient de plus en plus de gens autour de soi.
Les louveteaux naquirent au milieu de l'après-midi. Imala mit bas cinq petits qui crièrent pendant de longues minutes avant que les coups de langue de leur mère ne les calment enfin. C'étaient cinq petites boules de poils gris foncé aux reflets roussâtres, les yeux complètement fermés et le museau presque plat. Deux petits triangles discrets coiffaient leur crâne en guise d'oreilles. Leurs pattes griffues tremblaient doucement, malhabiles, s'enfonçaient dans le sol du liteau, à la recherche d'un équilibre qu'elles ne trouvaient guère.
La mémoire de la terre est étrangère à celle des hommes. On croit tout connaître de l'histoire et du monde, mais il est des âges oubliés où se croisaient encore mille merveilles aujourd'hui disparues. Seuls les arbres se souviennent, et le ciel et le vent. Et si, un soir d'été, l'âme bienveillante vous vous allongez dans l'herbe et vous les écoutez le cœur ouvert, vous entendrez peut-être cette histoire d'un autre temps, au pays fe Gaelia; celle de la louve blanche et de l'enfant qu'on appelait Aléa.
Il arrive un moment, quand on joue le jeu des manipulations humaines, où les intérêts se mélangent tellement que les acteurs mêmes du jeu sont obligés de se sacrifier.
L'archidruide dévisagea à nouveau le jeune druide en se grattant le menton.
- On ne peut pas dire que tu commences bien ta carrière. Tu as fait cela pour le protéger ?
- J'ai toujours voulu qu'il devienne mon Magistel. Erwan est mon plus cher ami. Quand il m'a avoué qu'il partait à la recherche de son père, j'ai voulu m'assurer que je pourrais le retrouver s'il lui arrivait quoi que ce soit.
- C'est généreux. Idiot, mais généreux.
- Pourquoi idiot ? s'offusqua Finghin.
- Parce qu'il est amoureux et qu'il n'y a rien de plus idiot que de prendre un Magistel amoureux.
- C'est généreux. Idiot, mais généreux.
- Pourquoi idiot ? s'offusqua Finghin.
- Parce qu'il est amoureux et qu’il n'y a rien de plus idiot que de prendre un Magistel amoureux.
Finghin ne put retenir un sourire.
Tard dans la nuit, enfin, les hurlements lointains d'une louve de son âge la rassurèrent et elle se laissa bercer par ce chant harmonieux, une note qui galopait vers les aigus, s'accrochait un moment tout en hauteur sans rien perdre de son intensité, puis retombait, en ton comme en force, et s'éteignait un instant avant de repartir. Elle avait déjà entendu ce hurlement précis.
Et même si elle n'avait jamais rencontré la louve qui chantait ainsi, elle se sentait proche d'elle et en concevait un plaisir réconfortant qui l'incita à dormir.
Tout semblait tranquille et froid, intact, presque mort, et pourtant Aldero savait que son ennemi était là, caché au cœur du palais. Il sentait sa présence, la signature de son passage, sur la face des pierres, dans l'immobilité des ombres. Son ennemi était là, prêt à tuer.