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Citations sur John Barleycorn : Le Cabaret de la dernière chance (61)

Arrivé à cette phase de mon récit, je tiens à affirmer que je ne suis ni un imbécile ni une mauviette. Tout le monde reconnaît aujourd'hui mes succès d'écrivain, plus marqués, j'ose le dire, que ceux de la moyenne de mes confrères arrivés, et il m'a fallu pour atteindre ce résultat une bonne dose d'intelligence et de volonté. Mon corps robuste a survécu à des aventures où bien des avortons auraient succombé comme des mouches. Et pourtant ce que je raconte m'est arrivé. Mon existence est un fait, mon ivrognerie en est un également. C'est une expérience vécue et non une spéculation théorique. C'est, à mon avis, un exemple frappant de la toute-puissance de John Barleycorn, - ce fléau que nous laissons survivre, bien qu'il remonte aux époques de bestialité et prélève chaque année sur la fleur même de notre race son lourd tribut de jeunesse, de force et d'enthousiasme.
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Entre mes périodes de travail, mes nerfs, mon cerveau et tout mon corps étaient si épuisés que pas une fois l'idée de boire ne se présenta à mon esprit. Je planais trop haut pour recourir aux stimulants. Sauf les heures où je me débattais avec cette infernale machine, je passais tout mon temps dans un paradis d'extase créatrice. Pourquoi aurais-je désiré boire ? Ne croyais-je pas en une foule de choses : à l'amour de l'homme et de la femme, au sentiment de la paternité, à la justice humaine, à l'art - à toute cette cohorte d'illusions qui font tourner la machine ronde !
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Une statistique complète de la proportion des suicides dû à l'alcool serait effrayante. Dans le cas d'un jeune homme tel que moi, plein de la joie de vivre, l'idée de se détruire était peu banale, mais il faut tenir compte de son apparition à la suite d'une longue orgie, alors que mes nerfs et mon cerveau étaient empoisonnés. Le mirage romanesque avait paru délectable à mon imagination surchauffée.
Or, justement, les buveurs plus âgés, plus morbides, plus blasés et plus désillusionnés qui se suicident mettent généralement leur projet à exécution après une longue débauche, lorsque leurs nerfs et leurs cerveaux sont sursaturés de poison.
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N'oublions pas non plus que John Barleycorn est d'humeur très versatile. Il s'adresse aussi bien à la force herculéenne, à la vitalité débordante qu'à l'ennui de l'oisif. Il passe son bras sous celui de n'importe qui, sans s'inquiéter de son état d'esprit. Sur tous les hommes il lance son filet de séduction. Il fait passer de vieilles lampes pour des neuves, saupoudre de paillettes les grisailles de la réalité, et en définitive trompe tous ceux qui sont en rapport avec lui.
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Tels sont les tours et ruses de John Barleycorn: il fait grouiller les larves de votre intelligence, vous murmure de fatales intuitions de la réalité, et lance des traînées de pourpre à travers la monotonie de vos jours.
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La vie ment pour vivre, la vie est un mensonge perpétuel.
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L’alcool renferme des intuitions fatales de vérité. Philippe, dans toute sa lucidité, se porte garant de Philippe ivre. Il y a, semble-t-il, en ce monde, plusieurs genres de vérités, les unes plus véridiques que d’autres, et certaines mensongères. C’est précisément celles-ci qui rehaussent la vie pour ceux qui désirent en jouir. Tu vois, ô lecteur casanier, quel royaume lunatique et impie je tente de te dépeindre dans la langue des disciples de John Barleycorn.
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Alors apparut dans ma vie la ville d'Oakland et, sur les rayons de sa bibliothèque municipale, je vis un monde immense surgir à l'horizon. Il y avait là des milliers de livres aussi bons que mes quatre merveilles, et même quelques-uns de meilleurs.
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L’alcool laisse entrevoir la vérité, mais une vérité anormale. Les choses normales sont saines – et ce qui est sain tend vers la vie. La vérité normale appartient à un ordre différent – et inférieur. Prenez, par exemple, un cheval de trait. À travers toutes les vicissitudes de sa carrière, et bien que sa pensée soit confuse et incompréhensible pour nous, il lui faut croire, à tout prendre, que la vie est bonne ; que de tirer dans les harnais est une excellente chose ; que la mort, si vaguement qu’il la pressente, est un géant redoutable ; que la vie est douce et vaut la peine d’être vécue ; et, qu’en fin de compte, quand la sienne arrivera à son déclin, il ne sera pas bousculé, ni maltraité, ni pressé au-delà de la limite de ses efforts. Il doit croire que la vieillesse elle-même conserve jusqu’au bout une certaine décence, une certaine dignité et quelque valeur. Pourtant, sa vraie forme est celle d’un épouvantail squelettique trébuchant sous les coups entre les brancards d’une charrette de revendeur, poursuivant éperdument, dans une servitude sans pitié, son calvaire de lente désintégration, jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à la dispersion de ses éléments, – de sa chair subtile, de ses muscles roses et élastiques, et de toute leur sensibilité inhérente – jusqu’à leur répartition entre le poulailler de ferme, la vannerie, la fabrique de colle et l’usine de noir animal. Jusqu’au dernier faux pas de sa carrière chancelante, ce cheval de trait doit s’en tenir aux données de cette vérité mineure qui est la vérité de la vie et rend possible sa persistance.

Le cheval de trait, comme tous les autres animaux, l’homme y compris, est aveuglé par la vie et reste le jouet de ses sens. Coûte que coûte, il veut vivre. Le jeu de la vie est bon, malgré toutes les misères, bien que toutes les existences perdent en fin de compte la partie. Voilà le genre de vérité qui gouverne, non pas l’univers, mais les êtres qui l’habitent, s’ils veulent durer tant soit peu avant de disparaître.
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Seul parmi les animaux, l’homme jouit du terrible privilège de la raison. L’homme, avec son cerveau, peut transpercer le mirage enivrant des choses et contempler un univers figé dans la plus parfaite indifférence envers lui et ses rêves. Oui, l’homme peut entrevoir cette vision, mais elle ne vaut rien pour lui. Pour vivre, pour vivre pleinement, pour palpiter de vie, pour être une créature vivante, – ce qu’il doit être – il est bon que l’homme se trouve ébloui par la vie et illusionné par les sens. Ce qui est bon est vrai. Et tel est le genre de vérité, de vérité inférieure, qu’il doit connaître et prendre pour guide de ses actes, avec la certitude inébranlable que c’est la vérité absolue et que nulle autre ne saurait prévaloir dans l’univers. Il est bon que l’homme accepte à première vue les tromperies des sens et les pièges de la chair, qu’à travers les brouillards de la sensiblerie il poursuive les leurres de la passion, sans en discerner les ombres ni la futilité, sans être terrifié par ses convoitises et ses désirs.
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