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EAN : 9782369142768
260 pages
Libretto (03/10/2016)
  Existe en édition audio
4.09/5   5186 notes
Résumé :
Dans le Grand Nord sauvage et glacé, un jeune loup apprend à lutter pour la vie. Les premiers hommes qu'il rencontre, des Indiens, le baptisent Croc-Blanc. Auprès d'eux, il connaît la chaleur du feu de camp, mais aussi le goût du sang. Racheté par un Blanc cupide, il est dressé pour le combat et découvre la haine. Un homme pourtant le sauve de cet enfer. Croc-Blanc lui vouera un amour exclusif.
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Critiques, Analyses et Avis (338) Voir plus Ajouter une critique
4,09

sur 5186 notes
On ne parle pas très souvent de la technique narrative des auteurs. On réserve généralement ce sujet aux auteurs qui, ouvertement, décident d'enfreindre les règles " habituelles ", c'est-à-dire les Faulkner, les Cortázar et consort. J'ai rarement lu qu'on faisait grand cas de la technique narrative de Jack London. Et pourtant…

Voici un auteur, qui fut longtemps étiqueté " jeunesse ", avec une certaine nuance de condescendance dans ce terme alors que les écrits pour la jeunesse devraient justement être ceux auxquels on apporterait le plus grand soin. C'est aussi un auteur étiqueté " aventure ", avec au moins autant de sous-entendus méprisants que je ne vais pas m'attarder à battre en brèche mais qui sont à mes yeux tout aussi déplorables que les précédents.

Alors pour tâcher de contrecarrer certaines idées reçues, je vais argumenter le fait que, selon moi, Jack London est un grand, grand maître de la technique narrative. Si je vous pose la question à brûle-pourpoint, comment vous y prendriez-vous pour nous présenter la vie difficile d'un chien-loup des environs du Yukon au confluent des XIXème et XXème siècles ?

Pas facile, n'est-ce pas ? Comment intéresser son lecteur (ou son auditeur si l'on raconte oralement) ? Sincèrement, faites l'expérience, vous verrez que c'est loin d'être évident. Jack London, lui, a trouvé. Sa réponse se situe au niveau de la technique narrative. Pour ça, il a dû résoudre au moins trois problèmes majeurs :

Premièrement, faire en sorte que le lecteur s'identifie ou du moins éprouve une certaine dose d'empathie pour le protagoniste principal, en l'occurence, un chien-loup pas hyper sympa, qui égorge son prochain pour un oui pour un non. Déjà, c'est coriace comme affaire.

Deuxièmement, faire ressentir au lecteur la sensation d'écoulement du temps, de modification progressive du comportement ou de la relation, qui se noue ou se dénoue avec différents protagonistes au cours de la narration. Car une vie de chien, ce n'est pas fantastiquement long, et présenter le lent et progressif travail des interactions, voilà de quoi occuper vos soirées à vous arracher des cheveux pour découvrir la formule de la fameuse quadrature du cercle.

Troisièmement, il faut parvenir à nous faire pénétrer dans le cerveau de l'animal sans recourir à la formulation directe ni au dialogue, ce qui, convenons-en, est bien pratique d'ordinaire pour parler d'un héros. Imaginez, votre histoire parle d'un héros dont vous ne pourrez jamais faire entendre la voix, au sens articulé et signifiant du terme. Drôle de gageure, non ?

Premier coup de génie de l'auteur, faire débuter sa narration avant la naissance du héros, peut-être même avant sa conception, en prenant le point de vue des humains. le lecteur expérimente le grand Nord, vit le grand Nord, souffre du grand Nord, de son obscurité, de la rudesse de ses températures, de sa famine latente, etc., etc.

Et, là-dessus s'ajoute la peur ; la peur de la bête fauve ; la bête qui souffre plus encore que vous, humain, de la famine ; la bête qui joue sa survie auprès de la vôtre ; la bête qui n'a d'autre choix que de risquer de vous attaquer ; la bête qui en connaît pourtant tous les risques ; la bête qui doit sa survie à une intelligence peut-être pas aussi aiguisée que celle des humains mais qui s'en approche. Et vous, l'humain, vous savez, vous sentez que vous êtes sur le terrain de la bête, que votre belle intelligence vous sera peut-être moins utile que des sens aiguisés et deux bonnes rangées de crocs. Vos mains commencent à trembler, votre sommeil n'est plus ce que l'on peut appeler reposant : c'est une lutte.

Voilà exactement ce que Jack London cherche à vous faire éprouver, la lutte, l'âpre lutte pour la moindre miette de viande, manger ou être mangé. Et une fois que vous avez compris, en tant qu'être humain, vous êtes mûr, vous êtes prêt pour enfiler le costume de la bête. Vous avez compris que pour elle aussi, pour elle surtout, c'est une lutte de tous les instants, vous savez ce que c'est que de courir les pattes dans la neige pendant des heures et des heures sans même l'assurance d'une demie bouchée de viande au bout de la course.

On suit la louve, demie louve d'ailleurs ; on découvre le loup, un vieux borgne qui en a vu beaucoup avec son oeil avant de le perdre au combat ; on comprend que la lutte ne concerne pas que la nourriture : elle touche aussi l'accouplement. Tout n'était qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté chez Baudelaire, ici, mes petits amis, hormis la beauté vous pouvez oublier tout le reste. Et c'est de ça qu'il nait notre Croc-Blanc, de deux géniteurs qui auraient fait un malheur dans Survivor et auraient atteint la finale, soyez-en certains.

Et comme si ça ne suffisait pas, viennent se greffer une série d'embuches qui sont autant de chances que de douleurs. On finit même par se demander si rester en vie dans le grand Nord, dans cet authentique Wild, oui, on finit par se demander si c'est vraiment une chance, si finalement, tous ceux qui sont morts en bas âge n'ont pas tiré un meilleur numéro. Mais Croc-Blanc, lui, semble né pour la souffrance, c'est un champion toute catégorie dans ce domaine.

Il se fait recueillir par une poignée d'Indiens qui lui attribuent au passage son nom de scène. Il expérimente auprès des tipis la loi des chiens-loups plus gros que lui, notamment celle de cette peste incarnée de Lip-Lip, mais également la rude sympathie de son maître Castor-Gris qui n'est pas beaucoup plus tendre qu'une planche à laver lorsqu'il envoie des beignes au petit chiot.

(L'épisode des batailles répétées de Croc-Blanc avec Lip-Lip est extraordinairement ressemblant à celui du chapitre XV de Martin Eden où le héros, dans sa jeunesse, se bat jour après jour contre plus âgé que lui, Tête-de-fromage. Le jeune Martin s'en prend plein la figure pendant des années avant de lui mettre une raclée définitive. Un indice, probablement, du fait que l'auteur aura puisé ce motif de sa propre expérience personnelle tant on sait que Martin Eden colle à beaucoup d'égards à la biographie de Jack London.)

Et de tout cela, Croc-Blanc se forge un corps et un caractère d'airain trempé. Il devient rapidement un leader de meute des plus efficaces quand il est branché sur un traineau, et, bien sûr, doublé d'un batailleur des plus redoutables. Si redoutable que lorsqu'il échoue avec son maître dans une petite ville où les Blancs font étape avant de se lancer dans la ruée vers l'or en Alaska, un sinistre hère répondant au nom de Beauty Smith s'imagine qu'il ferait un as du ring en qualité de chien de combat.

Mais c'est sûrement mal connaître les liens indéfectibles qui unissent l'Indien et son meilleur chien. Peut-être connaissons-nous mal également jusqu'où peut aller un Beauty Smith qui a flairé un magot ? le flair de l'un surpassera-t-il le flair de l'autre ? Je m'en voudrais de vous le révéler si vous ne connaissez pas cette histoire, pourtant archi classique.

Ce que j'en sais, pour ma part, c'est que Croc-Blanc est une sorte de symétrique inversé du précédent grand succès de l'auteur : j'ai nommé L'Appel de la forêt (ou L'Appel sauvage dans la nouvelle traduction de chez Libretto). Il a su renouveler l'histoire tout en adoptant une architecture relativement similaire mais en sens inverse (Buck devenait de plus en plus sauvage tandis que Croc-Blanc se civilise peu à peu).

Mais surtout, et c'est ce que j'ai développé tout au long de cet avis, en l'améliorant grandement tant sa narration au moyen d'une technique irréprochable, que la crédibilité du personnage principal, à savoir ici un animal. (Buck, à beaucoup d'endroits, apparaissait comme par trop exceptionnel.)

Ce que j'en sais encore, eu égard à ce qui vient d'être écrit, c'est que ce John Griffith Chaney, qui s'est fait connaître en littérature sous le pseudonyme de Jack London est un véritable orfèvre de la technique narrative. Si j'avais un petit reproche à lui faire, ce serait peut-être au niveau de la caractérisation de ses personnages humains : que ses méchants soient peut-être un peu moins méprisables et que ses gentils soient peut-être un peu moins exemplaires.

Mais pour le reste, un vrai bon roman efficace et joliment retraduit par l'éditeur Libretto, que je tiens à saluer au passage pour cette entreprise. Toutefois, souvenez-vous, qu'un avis ait la dent dure ou molle, qu'il arbore d'horribles chicots ou d'étincelants crocs blancs, ce ne sera toujours qu'un malheureux avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Alors là, je dois avouer que j'en reste comme deux ronds de flan... Whaou, si on m'avait dit qu'à la lecture d'un roman mettant en scène la vie d'un animal je ressentirais autant d'émotions et que je me fendrais même d'une petite larme, je ne l'aurais jamais cru. Et pourtant... petite nature, va.

La Nature justement, parlons-en. Elle occupe tout le paysage du roman. Le Wild, le Grand Nord, territoire hostile et sauvage, livre ses secrets sous la houlette d'un écrivain de grand talent. L'écriture est simple et précise, elle fait mouche à chaque phrase. Le début du roman, incroyablement fort et angoissant, happe instantanément le lecteur le plus impavide. La suite ne démérite en rien, où l'on suit la croissance puis le parcours de Croc-Blanc, un jeune loup abâtardi de sang canin. Un voyage au royaume des hommes qui donne à réfléchir encore aujourd'hui.

Ma première réaction une fois ma lecture achevée fut l'étonnement. Je suis en effet très surprise que ce roman soit classé en catégorie jeunesse car je le trouve d'une violence terrible et les émotions qu'il fait naître me semblent de nature à fortement impressionner les jeunes lecteurs.

J'aime quand un livre me surprend, surtout en bien. J'avais ouvert "Croc-Blanc" parce qu'il évoquait des souvenirs d'enfance ; j'ai découvert un roman brillant que je ne suis pas prête d'oublier.


Challenge de lecture 2015 - Un livre de votre enfance
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ATTENTION ! Si vous lisez ce livre dans les transports en commun (genre métro comme moi) assurez-vous d'avoir une bonne âme (mon mari dans mon cas) à vos côtés pour vous signaler que vous arrivez à destination !

Oui, j'étais tellement plongée dans ma lecture que je ne me rendais même pas compte que le métro allait arriver à la station de destination...

C'est vous dire comme il fut prenant ! Pourtant, ce livre n'étant dans ma PAL que depuis deux mois, il n'aurait pas dû être lu aussi tôt.

Bizarrement, j'ai eu une envie folle de le lire, de le découvrir puisque je n'ai jamais vu le film. Pourquoi cet empressement ?

Et bien, le temps étant à la canicule - au moins 11 degrés - (mhouahaha), je me suis dit qu'un peu de fraîcheur serait la bienvenue et me voilà partie pour le Grand Nord, les pieds enfoncés dans la neige, les loups à mes trousses.

Cette première partie avec un traineau tiré par des chiens, poursuivi sans relâche par une meute de loups affamés - dont un viendra manger avec les chiens sans que le musher s'en rende compte tout de suite - était plus que prenante.

Comme dans "Dix petits nègres" et ses invités qui meurent l'un après l'autre, ici, c'est un chien qui disparaissait chaque nuit, dévoré après avoir été entrainé par la louve qui n'a pas peur de l'homme (la mère du futur Croc-Blanc). Elle est à moitié louve, à moitié chien et a grandi parmi les hommes. La ruse, elle connait. Les hommes aussi.

D'emblée, cette entrée en matière avec la course poursuite entre des loups affamés, hurlants et le traineau avec les deux hommes était flippante... Pourtant, c'est considéré comme littérature jeunesse. Nous sommes loin de l'univers de la Bibliothèque Rose, là !

Cet aparté terminé, je dois vous avouer que ce que j'aime dans ces livres de Jack London, c'est que cet auteur a une manière de vous parler du Grand Nord qui fait que, même si vous étiez au bord d'une piscine par 40 degrés à l'ombre, vous vous croiriez dans le blizzard en train de grelotter, le trouillomètre à zéro, la vision du Petit Chaperon Rouge, dévoré, dansant devant vos yeux épouvantés.

Nous sommes dans le Grand Nord, oui, et il ne fait pas de cadeau. Un jeune louveteau va le découvrir très vite, lui qui sera le seul survivant de la nichée. Pas le choix, faut manger si on ne veut pas être mangé. Sa rencontre avec une belette sera décisive, la bête étant vicieuse et vindicative (hem, c'est mon totem).

Les premiers hommes qu'il rencontre seront des Indiens qui le baptiseront Croc-Blanc. Auprès d'eux, il connaîtra la chaleur du feu de camp, mais aussi le goût du sang et la main qui frappe au lieu de caresser.

Sa condition de "plus loup que chien" fera qu'il sera rejeté par les autres chiots, agressé et mis à l'écart. Pas d'amour, pas de tendresse, mais des bagarres. Cela va déjà lui forger le caractère.

Comme dans "L'appel sauvage", cette histoire nous est contée à travers l'animal, ici, Croc-Blanc, ce qui donne au récit une émotion qui vous prendra aux tripes plus que si c'était raconté par un narrateur humain.

Oui, j'ai souffert avec Croc-Blanc, j'ai partagé ses émotions, ses peurs, ses découvertes, ses ruses, j'étais dans sa peau et j'avais envie de mordre les autres chiens qui l'emmerdaient. Oui, j'ai regardé les humains avec un regard de haine brûlante, avec l'envie d'en mordre certain et de leur trancher la jugulaire.

Je n'ai pas l'âme d'une violente, mais le récit atteint une intensité tellement féroce à certains moments que vous ne pouvez vous empêcher de vous dire que l'être humain peut-être une crapule.

Jack London nous dépeint plusieurs facettes de l'homme : l'indien qui deviendra aussi con que l'homme blanc après avoir goûté à l'eau-de-feu et qui vendra Croc-Blanc à l'homme cupide et pleutre qui veut le loup pour se sentir puissant et organiser des combats. Après cette brute et ses airs de truand, viendra le bon.

Mais dressé pour le combat, notre Croc-Blanc a basculé du côté obscur de la Nature et à cause des hommes, il a découvert la haine, il est devenu sauvage, hargneux.

Pas besoin de dictionnaire, il a vite compris ce que voulaient dire "injustice", "cruauté gratuite" et "vraie sauvagerie". Dans la nature, jamais il ne serait parvenu à un seuil pareil, le rendant irrécupérable tant la rage coule dans ses veines, tant il n'a plus confiance en l'homme.

Et pourtant...Tout le monde a droit à une rédemption.

Je remercie Jack London de m'avoir plongé dans cette aventure mi-humaine et mi-animale très bouleversante, sans m'épargner la vision de la cruauté humaine envers l'animal.

Les civilisés ne sont pas ceux que l'on dit. C'étaient les hommes qui hurlaient leur plaisir lors des combats de Croc-Blanc contre des ours, des lynx, un bouledogue... Eux qui voulaient voir le sang couler.

Un roman fort, prenant, dur, violent, sauvage, mais avec de l'espoir et des grands espaces. Tous les hommes ne sont pas des salauds...

Maintenant, je change de registre et je vais aller le dorer la pilule en Afrique du Sud avec le roman "Zulu". C'est l'agence de voyage de Caryl Férey qui m'y emmène.

Avec cet auteur bucolique, ce sera petites fleurs, poésie et douceur au menu. Un peu de douceur dans ce monde de brute. Tiens, pourquoi ceux qui ont lu "Zulu" toussent-ils aussi fort ?

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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J'ai toujours pensé que je ne lirais jamais « Croc blanc ». Pourquoi ? Pour plusieurs raisons, la principale étant que ce livre n'était pas passé à ma portée à l'âge où on le lit habituellement.
Ensuite, au fil des années je me suis persuadée qu'il était trop tard pour moi pour ce genre de lecture.
En réalité, je crois que la seule véritable raison de ce « rejet » est mon extrême sensibilité à la souffrance animale.

La nouvelle traduction proposée par les Editions Libretto, mise en valeur par une magnifique couverture ont eu raison de mes réticences.

Et quelle découverte ! Quel bonheur ! Ces quelques heures passées en compagnie de ce chien font désormais partie de mes grands souvenirs de lectrice.
Bien sûr, j'ai souffert avec lui, j'ai eu peur pour lui. le destin de Croc Blanc qui ne connaît, dès son plus jeune âge, que la dureté du Grand Nord, la violence des coups et la cruauté des hommes pour devenir un loup sauvage et féroce m'a émue, jusqu'aux larmes parfois.

J'ai savouré les descriptions de cette nature belle et hostile, majestueusement servie par la plume d'un auteur exceptionnel que je n'avais, j'ose à peine le dire, jamais lu.



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Quel excellent moment de lecture ! Tout m'a plu dans ce roman culte. L'histoire de Croc-blanc, des prémisses de sa naissance jusqu'à sa vie de jeune loup est passionnante. Riche en informations aérées sur l'univers des loups jusqu'à son destin scellé aux chiens, cette histoire est un hymne aux grandes étendues du nord, aux loups détonnants et surprenants.

On suit ici toute l'histoire de ce jeune loup, ses rencontres dans le monde sauvage, le Wild à ses rencontres avec une tribu indienne puis humaine (les Dieux). Croc-blanc évoluera et sera façonné par ses rencontres. La haine appelant la haine, l'amour rendant à ce loup sa juste valeur et lui vaudra le surnom de Loup au coeur d'or.

Ce livre devrait être lu par tous les âges tant il nous procure une expérience littéraire exaltante et bouleversante à la fois. Jack London parvient grâce à sa plume aiguisée et imagée à nous plonger en totale immersion et empathie auprès de Croc-blanc.

Je suis ravie d'avoir découvert ce classique et d'avoir surtout ressenti toute une panoplie d'émotions moi qui aime tant les animaux.
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Citations et extraits (179) Voir plus Ajouter une citation
Beauty Smith connaissait bien les manières des Indiens. Il rendit souvent visite à Castor-Gris, avec toujours une bouteille noire cachée sous le manteau. L'une des propriétés du whisky était de donner soif. Et on peut dire que Castor-Gris était assoiffé. Ses papilles enfiévrées et son estomac en feu se mirent à réclamer des doses de plus en plus fortes du fluide brûlant, tandis que son cerveau, tout retourné par ce singulier stimulant, était prêt à tout pour s'en procurer. L'argent que lui avaient rapporté ses fourrures, ses moufles et ses mocassins se mit à fondre. Il fondait de plus en plus vite ; et plus sa bourse s'aplatissait, plus son humeur s'assombrissait.
À la fin, il perdit tout, son argent, ses biens, sa patience. Il ne lui restait plus que la soif, une possession en soi prodigieuse qui le devenait encore plus chaque fois qu'il aspirait une bouffée d'air frais. C'est le moment que choisit Beauty Smith pour discuter une nouvelle fois de la cession de Croc-Blanc ; mais cette fois-ci le prix fut en bouteilles plutôt qu'en dollars, et Castor-Gris l'écouta de toutes ses oreilles.

QUATRIÈME PARTIE : Les dieux supérieurs, Chapitre II : Le dieu fou.
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Quelle que fût cependant sa force physique et morale, Croc-Blanc souffrait d'une faiblesse de caractère insurmontable. Il ne pouvait supporter de voir rire de lui. Le rire humain était à son idée une chose haïssable. Qu'il plût aux dieux de rire entre eux au sujet de n'importe quoi, peu lui souciait. Mais si le rire se tournait de son côté, s'il sentait qu'il en devenait l'objet, alors il entrait dans une effroyable rage. Calme et digne en sa sombre gravité l'instant d'avant, il en était métamorphosé. On l'outrageait, pensait-il, et la folie frénétique qui s'emparait de lui durait des heures entières.
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Les hommes qui adorent les dieux les veulent immatériels, les placent au-dessus des lois naturelles, les font vivre dans un univers inaccessible, où s'effondrent dans un combat imaginaire le Vrai et le Faux, le Beau et le Laid, le Bien et le Mal. S'ils se perdent dans ce dédale, ou si le doute les assaille, ils peuvent briser leurs idoles et les remplacer par d'autres, tout aussi irréelles. Le chien et le loup domestique n'ont pas ce recours, ni cette versatilité. Les dieux qu'ils vénèrent sont des êtres de chair et de sang. Ils les perçoivent avec leurs sens, et partagent avec eux le temps et l'espace d'une existence bien concrète. Ce n'est pas la foi qui les crée, et le doute ne les fait pas disparaître. Ils sont toujours là, debout sur leurs pattes postérieurs, un bâton ou un morceau de viande à la main. Ils peuvent souffrir, saigner, mourir, et même être mangés. Une seule chose leur est impossible : cesser d'être des dieux.
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Incipit

Une haute forêt de sapins, sombre et oppressante, disputait son lit au fleuve gelé. Dépouillés de leur linceul de neige par une récente tempête, les arbres se pressaient les uns contre les autres, noirs et menaçants dans la lumière blafarde du crépuscule. Le paysage morne, infiniment désolé, qui s'étendait jusqu'à l'horizon était au-delà de la tristesse humaine. Mais du fond de son effrayante solitude montait un grand rire silencieux, plus terrifiant que le désespoir -- le rire tragique du Sphinx, le rictus glacial de l'hiver, la joie mauvaise, féroce d'une puissance sans limites. Là, l'éternité, dans son immense et insaisissable sagesse, se moquait de la vie et de ses vains efforts. Là s'étendait le Wild, le Wild sauvage, gelé jusqu'aux entrailles, des terres du Grand Nord.
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Les marins racontent, dit Bill, que les requins suivent les navires. Les loups sont les requins de la terre. Ils savent bien qu’ils nous auront.
- Ils t’ont déjà bien entamé, mon pauvre Bill, répondit Henry. Tu te laisses aller. C’en est fait d’un homme dès qu’il déclare forfait.
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De sa petitesse et de sa frayeur, il jetait son défi à l’immense univers.
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Conclusion : les choses ne sont pas toujours se qu’elles semblent être, il convient, en dépit de leur apparence, de faire preuve d’une extrême méfiance à leur égard, de ne jamais s’y reposer avant d’en avoir vérifié la réalité.
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C’était la loi de la nature. La viande vivait de la viande, la vie se nourrissait de la vie. Il y avait ceux qui mangeaient et ceux qui étaient mangés. La loi de la nature était la plus cruel : "Mange ou soit mangé." […] Il fallait se battre pour conquérir de la nourriture, il fallait se battre pour ne pas servir de nourriture.
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La tranquille solitude de sa première existence était finie. Ici, l’air lui-même palpitait de la vie, en un incessant murmure dont l’intensité variait brusquement d’un instant à l’autre, et dont les mots diverses lui portaient sur les nerfs et irritaient ses sens.
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Il est toujours plus facile d’appuyer son existence sur une aitre que de vivre seul.
Page 54 sur 122

En somme Beauté était un vrai monstre, ce dont il n’était pas responsable assurément et ne pouvais être blâmé, n’ayant pas moulé lui-même l’argile dont il était pétri.
Page 87 sur 122

Il avait été formé et durci dans la haine, il était devenu un être de fer, de prudence et de ruse. Il lui fallait maintenant se transformer tout entier sous la pression d’une puissance nouvelle qui était l’amour.
Page 100 sur 122
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"En jouant, en écrivant Molière & Cie" paru aux Editions du Seuil
« le quatre centième anniversaire de la naissance de Molière a donné lieu à quantité de publications, de représentations, de manifestations diverses pendant un an. J'ai rédigé des préfaces et des notes personnelles, répondu à des journalistes, joué Orgon dans Tartuffe et repris deux mises en scène des Fourberies de Scapin et du Bourgeois gentilhomme. J'appartiens à la Comédie-Française dont Molière est le saint patron, l'emblème et l'apanage. Ma fréquentation de l'oeuvre s'est finalement à peine intensifiée cette année-là en regard des années précédentes, mais la publicité générale que produit une commémoration m'a fait réfléchir, a suscité des questions dont ce livre est le résultat, la collection, le prolongement. Il est fait aussi et surtout du goût, de l'appétit, du besoin presque buccal que j'ai de Molière. » Denis Podalydès
Denis Podalydès est sociétaire de la Comédie- Française depuis 2000. Il a mis en scène une quinzaine de pièces, parmi lesquelles "Cyrano de Bergerac" (cinq Molières en 2007, dont celui de metteur en scène). Également acteur au cinéma, il lit et enregistre régulièrement des oeuvres littéraires : Proust, Céline, Diderot, Jack London (Grand Prix du livre audio La Plume de Paon pour "Martin Eden" en 2020). Il est l'auteur de "Scènes de la vie d'acteur" (Seuil, 2006), "Voix off" (Mercure de France, Prix Femina essai 2008), "La Peur Matamore" (Seuil/Archimbaud, 2010) et de l'Album Shakespeare (La Pléiade, 2016).
Rencontre animée par Simon Daireaux
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