La chose n'est pas complètement fausse. En effet, quand une personne tombe malade de la mystérieuse maladie, si cette personne n'a pas le sou, elle est folle. Possède-t-elle un honnête avoir ? C'est une malade. Mais si elle a de quoi s'offrir le sanatorium, ce n'est plus qu'une anxieuse. (p. 14)
Je ne suis pas fou, du moins visiblement, mais j’ai désiré voir la vie des fous.
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Pour soigner les fous, il faut d'abord prendre la peine de comprendre leur folie.
Il faut aussi profiter de leurs jours de lucidité pour les réadapter à la vie ordinaire.
Traiter continuellement comme un fou l'homme qui ne perd que de temps à autre le contrôle de son jugement, c'est l'enfoncer dans son infortune. (p. 67)
p.134-135/Ce matin-là, je louvoyais dans un quartier d'asile, en compagnie d'un interne.
- Les fous, me disait-il, ne sont pas ce que l'on suppose. Le public les voit mal...Ce ne sont pas toujours des forces déchaînées. Tenez, regardez ceux-ci, réunis dans cette salle.
Ils étaient une dizaine. Ils parlaient un peu haut, mais cela arrive aux personnages les plus sensés.
- Vous pouvez entrer, me dit l'interne.
J'entre. Les têtes étonnées se tournent de mon côté. Je reconnais le médecin-chef au milieu du groupe.
L'interne me saisit par le bras.
- Quoi ?
- Erreur ! fait-il en se mordant la lèvre, ce ne sont pas des fous mais des aliénistes. C'est la Ligue de l'hygiène mentale qui tient séance !
Il avait suffi de l'épaisseur d'un carreau !
VIII - Ces messieurs du Docteur Dide
La maison de Braqueville est une maison comme il n'en est pas une autre sur le territoire de la France républicaine.
Si je suis dénoncé comme fou, je demande que l'on m'interne chez le docteur Maurice Dide.
Ce savant professe que la folie est un état qui en vaut un autre et que les maisons de fous étant autorisées par des lois dûment votées et enregistrées, les fous doivent pouvoir, dans ces maisons, vivre tranquillement leur vie de fou.
Et ce savant a raison. C'est assez que l'on ne puisse pas les guérir. (...)
Dans la maison du docteur Dide la folie n'est pas considérée comme un crime.
on ne se dresse pas devant le pensionnaire pour lui dire : "Misérable ! Qu'as-tu fait ? Tu viens de perdre la raison !"
On lui dit : "Bonjour, monsieur, vous voici chez vous."
Les châtiments sont interdits.
Existent-ils en d'autres lieux ? Je vous crois. (p. 62)
On leur ôte la vie sans leur donner la mort
Comment savoir qu'un fou n'est plus fou puisqu'on ne le soigne pas. (p.159)
Si ce malade l'eût été du foie, des bronches, du ventre, sitôt guéri, il serait sorti de l'hôpital. C'est que la chose est dans les habitudes et que la médecine générale est plus vieille que la psychiatrie. Dans plusieurs siècles, la psychiatrie aura assuré ses bases. En l'an 2100, le guéri aura le droit d'être guéri. Présentement, il doit attendre son heure; la science, elle, attend bien la sienne ! Le fou est né trop tôt ! (p.142)
Les poètes, partis dans le cercle lumineux de leur inspiration, inventent des termes, les fous forgent leur vocabulaire. Les conventions séculaires, qui font qu'un même peuple s'entend parce que les individus de ce peuple accordent aux mots une signification définie, ne jouent pas pour eux. Les fous parlent en dehors des règles établies. Il n'y a pas un peuple de fous : chaque fous forme à lui seul son propre peuple.
Les « malades » docteur ne manquent pas d’asiles ils manquent de soins.