J'ai toujours été pour la coexistence d'Israël et d'une Palestine, mais je suis de plus en plus affectée par ce qui se passe et ce que j'entends, je ne veux pas juger, je ne vis pas là-bas, mais pas un doute ne m'atteindra tant qu'il sera question de détruire Israël.
Je ne sais pas me détacher du monde extérieur, il m’a enlevée lorsque j’avais quinze ans. C’est une mosaïque hideuse de communautés et de religions poussées à l’extrême. Et plus il s’échauffe, plus l’obscurantisme avance, plus il est question de nous, les juifs. Je sais maintenant que l’antisémitisme est une donnée fixe, qui vient par vagues avec les tempêtes du monde, les mots, les monstres et les moyens de chaque époque. Les sionistes dont tu étais l’avaient prédit, il ne disparaîtra jamais, il est trop profondément ancré dans les sociétés
J’ai fait un film, dix ans plus tard, de ces moments-là, je voulais traverser le miroir, percer un passage, atteindre l’imaginaire de ceux qui n’y sont pas allés. Je ne suis pas sûre d’y être arrivée. Comment transmettre ce que nous avons nous-mêmes tant de mal à nous expliquer ?
Survivre vous rend insupportables les larmes des autres. On pourrait s'y noyer.
Il y avait entre nous des champs, des blocs, des miradors, des barbelés, des crématoires, et par-dessus tout, l’insoutenable incertitude de ce que devenait l’autre. C’était comme des milliers de kilomètres. A peine trois, disent les livres.
Je sais maintenant que l'antisémitisme est une donnée fixe, qui vient par vagues avec les tempêtes du monde, les mots, les monstres et les moyens de chaque époque.
Il m'en voulait de t'avoir accompagné, j'avais pris sa place, celle de l'enfant qui marche dans ton sillage. Il était malade des camps sans y être allé.
J’ai été quelqu’un de gai, tu sais, malgré ce qui nous est arrivé. Gaie à notre façon, pour se venger d’être triste et rire quand même. Les gens aiment ça de moi. Mais je change. Ce n’est pas de l’amertume, je ne suis pas amère. C’est comme si je n’étais déjà plus là. J’écoute la radio, les informations, je sais ce qui se passe et j’en ai peur souvent. Je n’y ai plus ma place. C’est peut-être l’acceptation de la disparition ou un problème de désir. Je ralentis.
En te parlant, je ne me console pas.
Je détends juste ce qui m'enserre le cœur.
Survivre vous rend insupportables les larmes des autres.