[…] Son rire déclencha les flashes et elle commença à accorder à chacun son sourire angélique. Les photographes échangèrent bientôt des regards admiratifs. Cela les changeait des vamps et de leurs œillades. Cette femme ne se contentait pas de fixer l'objectif, elle leur offrait son âme. Elle leur apportait aussi l'Amérique et son aura, avec une telle gentillesse qu'ils succombèrent à leur tour à son charme. Le cinéaste le devinait. La magie opérerait. Il s'effaça derrière la magicienne.
Au total, l'annonce du divorce Bergman-Lindström déclencha plus de trente mille articles, éditoriaux et sermons. Il y en eut des littéraires: "Ingrid revit le drame d'Anna Karénine". Des géographiques: "Sa fille ne regarde plus l'Italie sur un globe". Des déclamatifs: "Ingrid téléphone à sa fille: "je ne vivrai plus avec ton père". Il y eut également dans le journal de Bergman, à la date du 19 décembre, cette phrase laconique: "La situation ne peut pas être pire".
- Je vais retourner en Israël. Puis en URSS. Au Japon peut-être.
Capa [le photographe] continuait de fuir. Pendant deux ans, elle avait espéré: un mot de lui et elle quittait sa famille pour l'épouser. Mais s'il l'encourageait à être libre, Capa préférait plus encore sa propre liberté. Il voulait bien s'engager sur tous les fronts, excepté avec une femme, qui ne serait qu'un souvenir encombrant sur le prochain champ de bataille.