Je fixai une toute dernière fois la petitesse ridicule de celui que je considérais enfant comme le plus grand des hommes, puis, m’arc-boutant par-dessus son cercueil, je lâchai le crachat que je m’étais promis. Les trois hommes n’émirent aucun mouvement de protestation ni même de surprise. Ils se contentèrent de m’observer avec leur regard de cimetière.
Ça fait beaucoup de bruit le silence d'une femme, quoi qu'on en dise
Tous les marins sont croyants, vous savez, quand ils se retrouvent face à une mer déchaînée.
Mais le temps ne cicatrice rien.Il se contente d'observer les blessures avec son air narquois et de les griffer de temps à autre pour les raviver.
(…) voir ces compagnons de route disparaître, qu’ils fussent bons ou mauvais, assourdit toujours un peu l’écho de notre propre existence. (à propos de la mort de Sylvain)
La journée pouvait se dérouler sans rien de notable, ils jugeaient pourtant que l’attente en valait la peine. L’alcool en guise de dialogue. Les souvenirs pour remplacer le présent et son temps toujours trop long. (à propos des piliers de bar)
Oh! Tu sais, les femmes, elles sont plus dangereuses que les sirènes. Les sirènes, au moins, on sait ce qu'elles veulent... Elles l'expriment. Mais les femmes...c'est leur silence qui est dangereux. Et ça, cest pire que tout. Ça fait beaucoup de bruit le silence d'une femme, quoi qu'on en dise.
Est-ce vrai, comme le prétend ta mère, que tu as besoin de plus de couleurs, qu’ici tout est gris et que c’est moi qui tiens le feutre qui attriste ton univers ?
Rien. L’abandon. Le silence. Encore et toujours. Faute d’explication, je me créai ma propre mythologie.
1995
« Regardez, la voilà… »
Les trois enfants observèrent la silhouette qui se mouvait avec lenteur. Lilly la folle longea l’orée du bois avec hésitation. Ses longs cheveux gris filandreux voletaient dans l’air au gré de la brise que l’océan soufflait depuis l’horizon.
- Elle ne se souvient plus…, suggéra Oriane.
- Si. Elle les retrouve toujours, à chaque fois. Il lui faut juste un peu de temps, murmura Gustave, attentif au cheminement de Lilly.
Bien à l’abri derrière des buissons, ils la virent revenir sur ses pas puis finalement pénétrer dans le bois avant de disparaître entre les arbres.