Le garçon qui se taisait

Et je me demandais alors, comme je me demande encore aujourd'hui, ce qu'était devenu celui qui m'avait fait cadeau d'un petit chat et avait à jamais changé ma vie. Il s'appelait Jacob Stoltz. C'est son histoire que je vais raconter.

"Et je me demandais alors, comme je me demande encore aujourd'hui, ce qu'était devenu celui qui m'avait fait cadeau d'un petit chat et avait à jamais changé ma vie. Il s'appelait Jacob Stoltz." Pages 12 et 13

" - Papa ? C'est vrai que Jacob est débile ? C'est ça, être détraqué ?
- Je ne dirais pas ça de Jacob, déclara mon père avec fermeté. Un débile est quelqu'un qui manque d'intelligence. Jacob, lui, est différent, c'est vrai, mais il sait aller vers les choses qu'il aime et s'en approcher avec prudence. Il faut être intelligent pour cela." Pages 39 et 40

" Mais Jacob avait seulement voulu sauver le bébé de Nellie en l'amenant à ma mère. J'en avais la certitude. Seulement le bébé était trop petit et il faisait trop froid et trop humide, cette nuit-là. Et le voyage avait été trop long." Pages 165 et 166

" Je ne revis jamais le garçon détraqué. Le tribunal décida qu'il fallait l'enfermer à l'Asile, à la périphérie de la ville, et je l'imaginais, dans ce bâtiment de pierre aux nombreuses fenêtres, où les gens hurlaient ou restaient assis, silencieux. J'espérais qu'ils le laisseraient se promener dehors, mais je savais que j'espérais en vain. J'espérais qu'on lui donnerait un petit chat, tout en sachant qu'on ne lui en donnerait pas.
Il avait quatorze ans à l'époque. C'était en 1911. Presque cinquante ans plus tard, l'Asile a fermé ses portes. Calmés par de nouveaux médicaments, les derniers patients furent renvoyés dans leur famille ou placés dans d'autres établissements. Mais son nom n'apparaît sur aucun des registres que j'ai consulté et il semble qu'il n'y ait jamais eu d'inscription au nom de Jacob Stoltz. On aurait pu le trouver peut-être dans des dossiers depuis longtemps détruits, preuve qu'il avait existé, qu'il avait aimé les animaux et qu'un jour, il avait essayé de sauver un bébé sans nom, mais n'y était pas parvenu." Page167 - FIN