-Réjouissez-vous de posséder ce cœur humain, Feyre, répondit-il enfin. Et plaignez ceux qui ne ressentent rien.
- J'ai songé à bien des manières de vous torturer quand vous serez à ma cour, reprit-il. Si je vous forçais à apprendre à lire, est-ce que ce serait aussi douloureux que ça en avait l'air ce soir ?
Il s'évanouit dans l'ombre sans me laisser le temps de me jeter sur lui.
Certains me recherchent sans jamais me trouver ;
J'en embrasse d'autre qui, ingrats, me foulent aux pieds.
Je semble préfère l'intelligence et la beauté,
Mais je bénis les audacieux et les têtes brûlées.
Mes soins sont presque toujours d'une douceur indicible ;
Dédaigné, je deviens féroce et presque invincible.
Chacun des coups que je porte est puissant,
Et quand je tue, c'est toujours lentement. ..
Ne regrettez jamais ce qui vous rend heureuse, murmura-t-il.
- Tout ira bien, répétai-je.
Le blessé ferma les yeux et je serrai sa main. Je sentis une chaleur à mes pieds et n'eus pas besoin de baisser les yeux pour savoir que le sang formait une mare autour de moi.
- Mes ailes, chuchota l'immortel.
- Vous les retrouverez.
Il fit un effort pour ouvrir les yeux.
- C'est juré ?
- Oui, chuchotai-je.
C'était a première fois que je faisais une promesse mensongère et je me haïssais. L'immortel esquissa un pâle sourire et referma les yeux. Mes lèvres tremblaient. J'aurais aimé avoir autre chose à lui offrir que des promesses en l'air.
– Si cela vous fait souffrir, cela n’a rien de ridicule.
- Je t'aime, chuchota-t-il, et il embrassa mon front. Je t'aime avec tes épines et tout le reste.
Quand je me réveillai, il était parti et j'étais certain que tout cela n'avait été qu'un rêve.
Tamlin s'en approcha et le sourire qu'il m'adressa dépassait en beauté toutes les prairies enchantées et toute la lumière d'étoiles de l'univers.
- Réjouissez-vous de posséder ce coeur humain, Feyre, répondit-il enfin. Et plaignez ceux qui ne ressentent rien.
Non, c'était impossible. J'étais incapable de passer à l'acte. Ce n'était pas comme à la chasse. Ce n'était pas une question de survie. Je devais assassiner de sang-froid des innocents et perdre mon âme par ces meurtres. Mais (...) pour Prythian, pour Tamlin, pour leur monde et le mien... ces morts ne seraient pas inutiles, même si elles devaient me damner pour l'éternité. [...].
Des larmes ruisselaient sur mon visage, dans mon cou et sur le col crasseux de ma tunique. Alors qu'elle prononçait ces paroles, je savais que cette terre immortelle me serait désormais inaccessible, qu'en sauvant Tamlin, je me damnais. [...]
Encore un immortel, et nous serions tous libres. Un dernier coup à porter... [...]
Le serviteur me présenta le dernier poignard. J'allais le prendre quand le garde ôta le sac de la tête de l'immortel. [...]. Des yeux verts tachetés d'ambre se levaient vers moi.
Tout vola en éclat alors que je regardais Tamlin. [...].
Il était là, mon Grand Seigneur, mon bien-aimé, agenouillé devant moi.
-Je t'aime, lui dis-je avant de le poignarder en plein cœur.