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Citations sur Sombre sentier (10)

- Vous voyez toute cette quincaillerie que Mado trimballe ? Eh bien, tout est en or véritable et en pierres précieuses. Même ses lunettes ne sont pas en toc : diamants et platine. Elle ne fait pas confiance aux banques et préfère porter sa fortune sur elle. Et elle garde tous ses bijoux quand elle baise, sauf ses lunettes.
(p. 220)
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[ 1980, grève des ouvriers turcs clandestins, dans le Sentier ]
Pas un flic à l'horizon. C'est l'ivresse. Les clandestins occupent la rue, et personne ne vient les en chasser. Les hommes hurlent 'Yasasin grevi', vive la grève. Carte de séjour, carte de travail. Les sonos circulent, tout le monde veut dire son mot. Soleiman tremble au soleil. Il l'avait voulu de toute sa force ce moment, mais il n'y croyait pas. Ce moment de vertige où les masses commencent à exister, hors de toute abstraction, où il devient possible, peut être... le monde va changer de base.
(p. 16)
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[mars 1980, clandestins ouvriers du textile à Paris]
Soleiman commence à parler, en turc. Il raconte la clandestinité, se déguiser en touriste avec un appareil photo en bandoulière ; la peur qu'il faut surmonter quand on voit un flic dans la rue, continuer à marcher, les fouilles, les nuits dans les postes de police, les arrêtés d'expulsion. Terminé. Nous ne voulons plus. Nous sommes ici, nous travaillons, nous voulons carte de séjour, carte de travail. La dignité.
(p. 15-16)
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[ au commissariat, témoin violée par un policier ]
- Vous désirez porter plainte, mademoiselle ? (Quelques secondes). Je ne suis pas franchement sûr que ce soit la meilleure solution. En jouant aux jeux dangereux qui sont les vôtres, vous ne vous attendiez sans doute pas à ne rencontrer que des petits marquis. Si vous portez plainte contre mon inspecteur, ce qui est votre droit, moi je vous coffre immédiatement pour trafic de drogue. Mon inspecteur sera muté, mais vous, vous en prendrez pour quatre ans, au bas mot.
(p. 60)
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[ 1980 ]
- Vous connaissez un peu le milieu professionnel du Sentier ?
- Absolument pas. Depuis trois ans, je suis à la Financière, et je travaille sur les délits d'initiés à la Bourse. Ma présence ici, si j'ai bien compris, est le résultat d'un compromis dans les hautes sphères. Les uns veulent absolument qu'on assainisse le Sentier, pour ne pas laisser le terrain complètement libre à ceux qui revendiquant la régularisation des clandestins. Les autres pensent que c'est de la foutaise, et qu'il faut laisser tourner un secteur qui marche bien, et qui ne pourrait pas le faire sans clandestins. Alors ils se sont mis d'accord pour désigner quelqu'un, mais ils ont pris un jeunot naïf, qui n'y connaît rien, et qui a donc toute chance de se noyer. Voilà. C'est moi.
- Et vous, vous pensez quoi de cette affaire ?
- Moi, je suis là pour trouver, c'est la façon dont je considère mon métier de flic, et je peux vous dire que je vais me déchirer la gueule pour sortir quelque chose de ce merdier.
- Vous parlez curieusement, pour un costard-cravate.
- Je n'ai pas toujours été costard-cravate.
- Ah bon ? Et que faisiez-vous avant la Financière ?
- J'étais loubard.
Un temps de silence.
- Je voulais dire : que faisiez-vous dans la police avant la Financière ?
- C'est mon premier poste.
- C'est très indiscret de vous demander pourquoi vous êtes à la Financière ?
- Non, ce n'est pas indiscret. J'ai toujours eu la haine de ceux que vous appelez les costard-cravate. Et je ne veux pas taper sur les petits voyous de banlieue.
(p. 54-55)
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Un flic en civil, pas grand, épais, la cinquantaine bien sonnée, semble commander les opérations. Soleiman s'adresse à lui :
- Je suis là pour le comité de défense [des grévistes turcs]...
- Toi, ta gueule. Je ne t'ai pas causé.
Et il [le commissaire] prend le patron [de l'atelier clandestin] par le bras, l'entraîne dans l'appartement d'en face, de l'autre côté du palier.
Soleiman demande aux Turcs de l'atelier de lui expliquer ce qui se passe. Des rires. En face, c'est l'appartement du patron. Le commissaire le connaît bien parce qu'il vient, tous les vendredis à midi, baiser la femme du patron, une blonde française, justement dans l'appartement d'en face. Le patron et le commissaire sont très copains. Le patron paie, et en plus le commissaire baise sa femme, jamais un contrôle dans l'atelier, une affaire prospère...
(p. 286-288)
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- Patron, la combine est géniale. Moreira déclare vingt-deux travailleurs qu'il n'emploie pas, les Turcs. Et il en fait travailler vingt-deux, qu'il ne déclare pas, mais qu'il ne paie pas non plus, les Marocains.
[...]
- Comment ça, il ne les paie pas ?
- Non, je suis sûr que non. Il les loge, faut voir comment, il les nourrit, mais il ne les paie pas. Ils sont tous originaires du même village. Moreira doit être de mèche avec un grand propriétaire marocain qui a probablement organisé leur passage, en leur faisant payer le prix fort. Les familles sont toutes restées au village. Comme ça, si un travailleur avait l'idée de protester, ce qui arriverait à sa famille là-bas lui en ferait vite passer l'envie. Son entreprise a l'air en règle, personne ne l'emmerde, ni le fisc ni l'inspection du travail. Les Turcs de la filière ont l'air de travailleurs innocents, et le patron fait un énorme bénéfice sur des travailleurs pour lesquels il ne paie que les charges sociales, mais pas les salaires. Ce qui nous change du Sentier, notez bien, où les patrons paient plutôt les salaires, mais pas les charges...
(p. 148-149)

[ c'était en 1980... bien sûr, ce genre de combine négrière n'existe plus en 2017... 😣]
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La totalité des travailleurs clandestins du Sentier a été régularisée. Mais les cartes sont arrivées d'abord au compte-gouttes. Puis, quand la régularisation a été bien engagée, le coup d’État militaire venait d'avoir lieu, en Turquie. Et chacun était obsédé par la violence de la répression, la-bas. Finalement, on n'a pas fait la fête, pour célébrer notre victoire. Et c'est le seul regret que j'aie gardé de ce printemps 1980.
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Une fois les deux inspecteurs partis, Daquin se plonge dans la presse. Il est convaincu qu’une partie de la solution du problème est là-bas, dans les pays d’origine, et qu’il faut essayer de comprendre ce qui s’y passe, si l’on veut arrêter les trafiquants, ici. Avec l’arrivée au pouvoir de l’imam Khomeiny, qui n’en finit pas de provoquer des troubles, les otages américains à Téhéran, l’extrême droite et l’extrême gauche qui se massacrent en Turquie, au rythme de vingt morts par jour, et maintenant l’intervention soviétique en Afghanistan, la lecture de la presse prend du temps.
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Une fois Bostic conduit en garde à vue, Thomas se retourne vers Santoni.
– Qu’est-ce que tu en penses, collègue ?
– Il a trouvé le cadavre ce matin, quand il a ouvert l’atelier.
– D’accord.
– Ça lui donne à peu près huit heures de battement.
– À peu près.
– Avant de nous téléphoner, il a vendu ses machines, pour pas qu’on les lui saisisse. Atelier clandestin.
– Toujours d’accord.
– Atelier normal pour le Sentier, moyennement crade. Mais pas la cuisine. Tu as vu comme elle est nickel ? Dans ces boulots-là, les ouvriers boivent et bouffent tout le temps. Même quand c’est bien tenu, ce n’est jamais aussi propre.
– Alors, qu’est-ce qu’on fait ?
– On y retourne, et on essaie de trouver ce qu’il a nettoyé et jeté. Et pas un mot aux génies de la Criminelle.
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