Le « hasard », toujours lui, a voulu que j'entame cette lecture le week-end de la Fête de la Nature. Dans ce cadre, j'ai participé à une Fresque de la Biodiversité, c'est vous dire si j'étais en plein dans le thème de ce livre. En quelques mots, ce « thriller » (terme utilisé sur la quatrième de couverture) évoque la révolte (d'où le titre
Colère) de la Terre, défigurée, malmenée, dénaturée, soumise à des phénomènes inexplicables : empoisonnements, tsunamis, animaux devenus agressifs, entrainant la mort de millions d'humains. Les scientifiques n'y comprennent rien et sont totalement impuissants.
Une problématique intéressante même si elle est inquiétante! Mais quel dommage que
Denis Marquet ait mis tant de temps à arriver au coeur du sujet. En effet, le démarrage du roman est très lent et le texte plus de 500 pages aurait pu être allégé, notamment du chapitre 39 qui ne m'a pas semblé apporter quoi que ce soit.
Au bout de quelques 350 pages donc, je suis parvenue au point essentiel, soulevé par un écologiste venu à la rescousse des scientifiques : il faut voir la Terre et ce qui vit à sa surface comme un tout, et non comme de multiples parties étudiées par des scientifiques différents, indépendamment les uns des autres. Mon attention a été particulièrement attirée par cette théorie parce que c'est exactement ce que je pense de l'approche du corps humain par la médecine classique qui en a rarement une vision holistique. Ce rapprochement est d'ailleurs fait dans le livre car l'écologiste explique que la planète, comme un corps, veut éliminer les cellules qui la rongent comme un cancer. Mais le problème, c'est que ce qui la rend malade et la détruit, c'est l'Homme ! Donc pour se soigner, elle va chercher à l'éliminer.
Histoire de rendre le tableau plus noir encore, l'écologiste ne sera pas écouté, sous prétexte que ce qu'il dit n'est étayé par aucun argument scientifique. L'Armée qui a pris les choses en mains préfère appliquer une méthode plus radicale : on supprime tout sur terre et on recommence à zéro ! Précisons que l'action se situe aux Etats-Unis et m'a rappelé la colonisation de l'Amérique aux temps des pères Pèlerins. On connaît la suite.
L'armée va jouer à Dieu (Play God en anglais), ignorer même les connaissances scientifiques, en prônant l'anéantissement quasi-total. En effet, quelques spécimens humains ont pu se mettre à l'abri de la catastrophe dans un bunker souterrain, organisé afin de leur permettre de rester en vie pendant une période assez longue : le Président des Etats-Unis, des militaires, quelques scientifiques et leurs familles. L'homme étant ce qu'il est, les dissensions ne vont pas tarder à apparaître. Les contradictions également puisque page 489, un haut gradé de l'Armée dit : « Nous commencerons à rebâtir sitôt que Dieu nous aura donné la victoire », et en même temps, ces hommes-là ne s'en remettent pas à Dieu, puisqu‘ils veulent créer eux-mêmes une nouvelle espèce humaine, l'Homo transgenicus. Cela fait froid dans le dos, non ?
Quelques chapitres portent sur les Amérindiens qui, eux, savent ce qu'ils doivent à la Terre, l'écouter et vivre en harmonie avec elle. Ils ont une humilité que les Blancs n'ont pas ou plus, et qui n'ont visiblement pas compris la leçon et veulent « dominer » la Nature, en être les maîtres.
Ce roman a déjà plus de vingt ans ; on ne peut pas dire que cela ne fait pas un moment que la sonnette d'alarme a été tirée. Cela vous donne-t-il envie de le lire?