Très bel objet de l'éditeur suisse Noir sur Blanc, dirigé par la grande Vera Michalski, bravo au concepteur graphique Paprika et à Jean-François Martin pour ses illustrations, pour ses ombres, il y a du Magritte chez lui, bravo. Il faut juste éviter de lire le texte. On dirait un journaliste qui essaie de faire l'artiste. En soi rien de rédhibitoire : les acteurs font souvent de bons réalisateurs; les critiques de cinéma, jamais. Irrité par les trois premiers chapitres, le lecteur arrive enfin à ce qui l'a attiré là, les extraits de romans de gare choisis pour amuser, la promesse d'une prose désopilante. Hélas. Ca ricane et c'est pédant. Un peu comme une commère persiflante qu'on évite de croiser au bureau: on plaint l'auteur en se disant qu'il doit être bien malheureux. Il paraît que c'est « une plume du Monde des Livres ». J'ai cliqué un peu pour lire ses critiques : il conspue Gavalda « assez pathétique » à ses yeux parce qu'elle évoque la « souffrance des vrais gens ». Je n'ai jamais lu Gavalda, mais il me l'a rendue sympathique.
John Steinbeck n'a fait qu'écrire la souffrance des vrais gens, comme
Zola, Dickens et Llewellyn. Même ridicules, les extraits moqués sont humainement - donc artistiquement - supérieurs à chacune des phrases snob de l'auteur, qui se croit astucieux. le titre tarte aurait dû m'alerter.