On avait toujours la vie des gens dans les oreilles, qui s’imposait quand on le désirait le moins, le jour ou la nuit, de sorte qu’on connaissait de parfaits inconnus aussi intimement que des amants grâce à leurs bruits nocturnes, leurs gémissements de salle de bains. Sans doute les connaissaient-ils, Marge et elle, tout autant, cependant elle n’aimait pas penser à cela. Mais, au moins, elles se conduisaient bien. Elles ne protestaient jamais contre le vacarme incessant des spots publicitaires, tout comme Gabe et Beatrice ne mentionnaient jamais les grincements du sommier et les rires étouffés des fins de soirée.
Mais, en vérité, les gens étaient bizarres. Quand ils le voyaient partir avec un objet provenant de leur poubelle, il arrivait que des gens crient, le poursuivent. Apparemment, on ne renonçait jamais à rien pour de bon ; si quelqu’un accordait une valeur à l’objet qu’ils avaient jeté, il reprenait de la valeur à leurs yeux.
Il ne fallait pas que sa fille et son fils entendent parler de tigre, parce qu’ils ne pourraient s’empêcher de sortir en cachette dans l’espoir de l’apercevoir. De leur point de vue, les tigres étaient jolis et gentils. L’opinion des enfants sur les tigres ne correspond pas du tout à l’opinion des tigres sur les enfants.
Bizarrement, les blagues racistes de M. Ellison étaient plus supportables que les discours de son père sur l’injustice dont les peuples indigènes avaient été victimes. C’était une race noble, avant notre arrivée. Ce sont les Européens qui ont fait d’eux des cas sociaux. Elle avait envie
Bizarrement, les blagues racistes de M. Ellison étaient plus supportables que les discours de son père sur l’injustice dont les peuples indigènes avaient été victimes. C’était une race noble, avant notre arrivée. Ce sont les Européens qui ont fait d’eux des cas sociaux. Elle avait envie