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sur 932 notes
Belfast, Irlande du Nord, années 90, peu avant et après le cessez-le-feu de l'IRA.
Jack le catho vit dans Poetry Street, une large avenue sans voitures calcinées , ni patrouilles militaires. Sa compagne anglaise est partie il y a six mois, ayant eu assez de vivre dans cette ville. Lui il glande, fait des boulots merdiques à droite à gauche, en attendant que quelque chose se passe dans cette ville où la mort en public est chose fréquente.
Chuckie le protestant a trente ans, lui vit à Eurêka Street avec sa mamôn et lasse de l'incohérence de sa vie, veut organiser son existence.Sauf qu'échafauder une telle organisation écumant les bars, bourré quasi en permanence, s'avère compliqué 😆. Pourtant le mec a du talent. Il a des bonnes idées, qui peuvent aussi vous éclairer si vous aviez des ambitions capitalistes similaires , comme comment gagner un million de livres Sterling sans lever le petit doigt😆.....et ça marche !!!
Le chemin que vont emprunter ces deux-là (malgré eux 😆)pour changer le cours de leurs vies est au coeur de ce livre, où le troisième personnage est Belfast, la ville d'où est issu l'auteur. Belfast, cette ville qui donne « l'impression d'être le ventre de l'univers...un décor souvent filmé rarement vu...un monde brisé-brisé mais beau ...un simple fouillis de rues et quelques grosses collines, un simple murmure de Dieu. »
Les deux personnages sont sublimes, et leur attitude d'une lucidité couplée d'une indifférence insondable envers la vie, désarmante. Dans la noirceur d'une ville, scène d'événements tragiques, l'auteur les enveloppe d'un halo d'humour, d'humanisme et d'optimisme qui m'ont fait sourire et rire, tout en dégustant de la belle littérature. Dans son ensemble une satire très subtile de notre monde , où pour préserver notre santé mentale vaut mieux ne pas chercher de raisonnement logique. Syrie, Irlande du Nord,.....l'absurde est partout. le cours de l'histoire et celui de la politique se télescopant, les histoires individuelles sont mutilées ou tronquées à jamais. J'ai particulièrement apprécié les piques au monde des “affaires”, à l'ignorance des américains, à l'hypocrisie des politiciens et autres genres de personnages publiques plus soucieux de leur image et de leur réputations que de leurs actes et à l'absurdité des conflits politiques et religieux basés sur des fondements et justifications non tangibles.

Eurêka Street est encore une rencontre babeliote, une lecture coup de coeur, merci Bison.

"Dans Eurêka Street, les gens vivaient les uns sur les autres comme des allumettes dans une boite, mais avec chaleur et sociabilité."
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Traduction littérale d'Eureka Street : à lire de toute urgence !

Une bande de potes désoeuvrés et paumés dans un Belfast laminé par le chômage et balafré par les conflits religieux , voilà le propos cyniquement lucide d'un auteur natif de cette ville arborant presque ironiquement comme emblème un trèfle à quatre feuilles pourtant bien loin d'apporter joie , bonheur , prospérité et U2 puissamment beuglé , le corps et l'âme noyés sous des flots ininterrompus de Guinness , à chaque union protestant / catholique , assez rare il est vrai...
A part Sunday Bloody Sunday , je vois pas...

Trois héros récurrents dans ce petit bijou d'humour désabusé .
Jake le catholique et Chuckie le protestant . A priori , rien en commun mais les à priori , hein , ça vaut ce que ça vaut...Deux adultes célibataires presque trentenaires , aussi paumés et blasés qu'ils sont intimement liés par une amitié certes chaotique mais toujours bien ancrée .
Petits boulots qu'ils s'ingénient à perdre dans les plus brefs délais , beuveries , filles d'un soir quand soir il y a , beuveries , lamentables et pathétiques larcins , beuveries...
Les jours , mois , années se suivent sans véritable changement notoire ni quelque espoir futur que ce soit . Jusqu'au jour où...

Autre élément central incontournable , ce Belfast en crise que McLiam Wilson chérit pourtant tant . Renaud , tu te calmes !
Une description au cordeau de cette principale ville d'Irlande du Nord souffrant de mille maux , le terrorisme n'étant pas le moindre .

Deux stratosphériques glandeurs en puissance dans une ville susceptible de filer le bourdon à un mormon dépressif , rien de ragoûtant au menu serait-on tenter de croire .
Et là je m'inscris en faux votre honneur ! Des mecs attachants au possible , oublier les seconds couteaux serait leur faire injure , à la verve corrosive et acerbe , moi je dis benco ! Auquel je rajouterai Nesquik et Poulain , injonction du CSA oblige...
La plume de McLiam Wilson , tour à tour ironique , douloureuse et désenchantée , est malgré tout un véritable hymne au bonheur ! Chaque réplique fait mouche . L'auteur n'en fait jamais des caisses . Toujours sur le fil , il ne verse jamais dans la démonstration et contrebalance talentueusement un morne quotidien par un incroyable sens de la répartie ! Sorte de Tontons Flingueurs irlandais à la verve jouissive qui laisseraient à penser qu'aussi désespérée qu'une situation puisse être , il reste encore et toujours l'espoir...

Eureka Street : lu et fortement conseillé par Archimède ! A lire dans sa baignoire , comme de bien entendu , beaucoup plus pratique que sous la douche...
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Eurêka ! J'ai trouvé un chef d'oeuvre avec ce talentueux auteur qui nous présente sa ville. Une bande de copains, de religion différente, faite de débrouille pour vivre dans ce Belfast sous la menace du terrorisme. Chaque personnage (jeune, vieux, femme, homme, pauvre, friqué) est attachant et haut en couleur. Ces 545 pages nous apportent émotion, humour, amour, voyage, poésie, politique, religion, chômage, travail, beuveries, bagarre, insultes, violence. le chapitre 11 sur l'attentat est d'une force émotionnelle bouleversante. L'écriture est nette, précise. Bluffée par l'analyse des êtres humains. Oh comme il est difficile de faire une critique d'un livre aimé ! Exceptionnellement je n'enchaîne pas sur un autre roman. Je vais continuer à savourer Eurêka Street comme un chocolat qu'on laisse fondre en bouche en se délectant.
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« Toutes les histoires sont des histoires d'amour. »

C'est ainsi que commence ce roman, dans le genre ballade irlandaise. Les histoires d'amour c'est mon kif, alors je fonce dans le premier pub, irlandais. Ça braille, ça crie, ça gerbe, mon univers. Des gamins qui se pintent, des vieux qui se pintent, des rousses qui se pintent aussi. le ciel est gris, les nuages menaçants, la pluie arrive en trombe, les buveurs aussi. Mon élément, cette grisaille et ses bières. Et ça cause amour, des love story qui mijotent autant que l'irish stew dans une cuisine que l'on croit abandonnée. Une radio diffuse les grands titres du lion de Belfast, de quoi chavirer quelques coeurs autour d'une bonne bière, c'est que les histoires de coeurs sont au centre de toute une vie, le mien par exemple je l'ai donné à van Morrison. Un flash-info, je coupe le son. Une nouvelle déflagration qui coupe cet élan de bonheur et d'ivresse. On s'y habitue presque dans les rues de Belfast. Des graffitis au mur, des bombes qui sautent, des sirènes, des cris affolés, des pleurs chagrinés, ainsi va la vie dans ses rues. Peut-être pour cette raison que chaque week-end est rythmé au son des verres qui s'entrechoquent.

Le grand roman de l'Irlande des années quatre-vingt. Pas moins que ça ! Les jeunes sont au pub, ils se bourrent la gueule, pensent aux filles en mini-jupes, je les accompagne, je me sers une pinte, deux mêmes, jusqu'à la biture et la passion de ces rousses à la poitrine généreuse, en bonne catholiques. Mais les protestantes sont plus lubriques. Parait-il ! Car la vie à Belfast se rythme aussi au son des sermons, opposition de religions. Les murs d'usines désaffectées se tapissent toujours plus de peinture et de sigles barbares. WTF et OTG. Et puis j'arrive tout simplement au chapitre 10. Je n'ai pas fini ma Guinness alors que je sens une atmosphère différente, pesante, palpable. Ce chapitre n'est pourtant qu'une mise-en-bouche, une entrée en matière sur le chapitre 11, chapitre anthologique sur l'Irlande. Tu veux sentir le pouls de Belfast, lis juste ce chapitre 11, phénoménal et glaçant. Peut-être mon plus grand moment littéraire sur les terres irlandaises.

Après cet intermède presque musical, presque poétique, qu'est le chapitre 11 qui marquera à jamais ta vie de lec-teur-trice, la vie reprend son cours, envie d'aller aux States, mais pour un irlandais, même sous les bombes et les décombres, la vie est à Belfast, Eureka Street. Je rallume la radio, musique. La pluie triste et morose s'abat, ambiance élégiaque dans un cimetière, sauf que je bois seul ma pinte dans ce pub, mon âme enfouie sous ma propre tombe.
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À la lecture d'Eureka Street, je découvre un grand écrivain, il m'a emmenée dans sa ville, il raconte sans pudeur aucune, avec humour et émotion, la vie quotidienne de ces habitants d'une capitale secouée par les attentats.
Je découvre Belfast, les habitants d'Eureka Street qui tentent de vivre vaille que vaille, Chuckie le gros protestant qui multiplie les combines pour faire fortune, Jake, le catho, ancien dur au coeur d'artichaut qui cumule les ruptures sentimentales. Je les accompagne, avec leurs amis, dans leurs beuveries, dans leurs recherches de petits boulots vite abandonnés, dans le train de la Paix avec Jake..., j'assiste impuissante à l'éclatement d'une bombe dans une sandwicherie ..., j'admire la fraternité qui les unit.
J'aurais beaucoup à dire mais je résume tous mes non-dits par : à lire !
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Des irlandais, la trentaine chargée, collectionnent les mauvais coups et surtout les coups du sort dans un Belfast où s'affrontent les catholiques et les protestants sous la surveillances d'anglais qui ont la notoriété mondiale de foutre la merde partout où ils passent (le jour où ils arrêteront de se torcher avec la géopolitique, le monde ira un poil mieux).
Jake Jackson vient de se faire plaquer par Sarah, retournée à Londres où elle y a avorté, ce qu'il apprendra plus tard. Il décide de quitter son job de déménageur-encaisseur lorsqu'avec ses deux acolytes, ils récupèrent le lit médical d'une vieille dame atteinte d'un AVC qui n'avait pas fini de payer ses traites, en la virant par terre. Depuis il traine ses regrets, attendant de rencontrer la femme qui lui fera oublier ses déboires amoureux.
Son ami, Chuckie, rêve de toucher le jackpot mais sans avoir à passer sous un bus afin de percevoir la prime d'assurance. Il a l'idée d'une géniale arnaque. Il fait passer une annonce proposant un godemichet géant moyennant la modique somme de 9,99 £. Il ne compte bien évidemment jamais expédier l'objet du délit à l'acquéreur(se)(heureuse) mais à la place un chèque de remboursement portant la mention : « REMBOURSEMENT GODEMICHET GEANT ». Il se doute que personne n'osera déposer le chèque à sa banque. Il fait rapidement fortune…
Chuckie Lurgan est à « Eureka Street » ce qu'Ignatius J. Reilly est à « La conjuration des imbéciles ». le premier est autant obsédé par gagner du fric au travers de procédés douteux et sauter la ravissante californienne Max que le second l'est à son anneau gastrique et à ses excentricités délirantes.
Robert McLiam Wilson signe un roman d'une rare cocasserie. Il donne l'impression de régler ses comptes avec l'absurdité d'un pays divisé par une guerre de religion tout aussi absurde, sur le ton de la plaisanterie. Il aurait pu finir chacun de ses chapitres par : « Mais la vie continue… ».
Il réunit une brochette de personnages aux caractères haut en couleurs, que les travers de leur existence n'atteignent plus. Ils jonglent avec un humour corrosif et échappent ainsi à la sinistrose qui tapisse les rues de Belfast. Sur fond d'attentats terroristes meurtriers, ils sont capables de tels échanges :
« - Ta queue atteint-elle ton cul ? Demanda-t-il.
J'ai écarquillé les yeux.
- Quoi ? fit Billy.
- Ta queue atteint-elle ton cul ?
Billy ne trouvait pas ça drôle du tout.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Eh ben, si elle l'atteint, tu peux aller te faire enculer plus facilement. » D'une logique implacable…
Le roman de Robert McLiam Wilson est un véritable chef d'oeuvre de second degrés et un hymne à une humanité que rien ne saurait altérer. C'est une histoire sur l'amitié. C'est le témoignage que même au milieu d'une société dure, cultiver la dérision aide à se sortir de bien des situations sans être atteint au plus profond de soi-même.
Moralité de cette histoire : plus la connerie est grosse, et plus on y croit et plus elle marche, parce qu'on en a besoin !
Une lecture savoureuse et un auteur génial à découvrir impérativement…
Traduction de Brice Mathieussent.
Editions Christian Bourgois, 10 :18 « domaine étranger », 545 pages.
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Eureka Street est l'histoire d'une bande de potes irlandais. Les uns catholiques, les autres protestants. Mais quelle importance au final. Ils se ressemblent. On saisit le ridicule de cette haine pataude :

« Telles sont les habitudes de deux populations dotées de différences nationales et religieuses remontant à quatre ou huit siècles. le drame, c'est que toute différence jadis notable a aujourd'hui fondu et que chacune de ces deux populations ne ressemble à aucune autre, sinon à l'autre. »

Portraits d'hommes accablés et désabusés, dans ce pays tourmenté qui s'englue dans la pauvreté et le désoeuvrement. Belfast est décrite comme un personnage à part entière. Elle est comme ces hommes et ces femmes qui y habitent. Meurtrie, elle n'en reste pas moins belle et authentique. Nulle autre ne lui ressemble. Sous sa cuirasse, se cache un coeur sensible.

Les actes terroristes sont relatés de façon ironique. Ces hommes sont lucides. Ils savent qu'ils ne sont que les instruments d'une politique absurde. Certains, comme Chuckie, en profitent pour faire fortune, d'autres, comme Jake, crient parfois leur colère.

Ce roman, qui peut apparaitre dans ses premiers chapitres qu'une succession de portraits d'hommes machos et trop portés sur la beuverie, monte en puissance lors de la description d'un attentat terroriste. À ce moment, on est dans le coeur de l'histoire. On saisit le message de l'auteur. La vie d'hommes et de femmes est fauchée dans son élan. On tranche dans le vif au mépris de la vie humaine.

C'est aussi un roman sur la solitude, la détresse. Histoire où terrorisme et histoires d'amours se télescopent . Histoire d'une ville en conflits, où l'espoir et les rêves de chacun ne sont pas éteints. À Belfast où ailleurs, c'est toujours la même histoire.



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Belfast années 90.

Ville lasse, plate, grise et taguée de sigles vindicatifs d'appartenance catholique ou protestante. Une paix molle s'est installée mais le conflit reste dans les gènes, telle une gangrène impossible à enrayer: les frondes républicaine et unioniste restent larvées et la ségrégation religieuse est une position politique. L'extrémisme est présent dans les deux camps, le quotidien des habitants est une lutte insidieuse, et L'IRA fait encore sauter des bombes...

"Les irlandais tuent des irlandais pour libérer des irlandais ": ubuesque!

Le catholique Jake, mélancolique et pacifiste, rongé de solitude et de peines de coeur côtoie le bon gros Chuckie, protestant débonnaire, pas très futé mais surdoué pour les combines financières. Autour d'eux, le chaudron nord irlandais où bouillonnent des extrémistes, des pacifistes, des idéalistes, des flics belliqueux, des femmes éreintées par la détresse et la pauvreté, des gamins des rues vindicatifs et sans enfance...

Dans les quartiers populaires, les hommes tuent leur vie médiocre en buvant des litres de bière dans des pubs nauséabonds, enfumés et crasseux. Les soirées sont des gigantesques beuveries à insultes et coups de poings car l'irlandais est par nature dissipé, bagarreur, querelleur, qu'il soit catholique ou protestant.
Toute attitude pacifique est rejetée, déconsidérée, toute tentative de conciliation au coin d'un pub s'apparente à de la traitrise.

Une vision de l'intérieur, impressionnante de réaliste, de fatalisme et de violence (il faut parfois s'accrocher). Tout cela en mode narratif ironique, humoristique, sarcastique et désabusé. Un grand écart permanent entre bouffonnerie et terrorisme. Et un très beau message de foi en un avenir possible.

Et Belfast, la ville, est le fil conducteur: on croit voir les rues grises et pavées de misère, les quartiers de briques rouges, le plafond bas du ciel, les hurlements de poivrots, les injures en gaélique.

Je conseille, je conseille...meilleur livre sur l'imbroglio politico-terroriste de l'Irlande du Nord que j'ai pu lire...
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Quoi de mieux en pleine troisième vague de chaleur (atténuation du mot canicule) que de partir en Irlande du Nord ? Bon, d'accord, en pleine guerre civile dans les années 90, mais le bruit des bombes et autres déflagrations ne surprennent même plus les habitants.

De la pluie, de l'humidité, du gris et une rue de Belfast : Eureka street où vit Chuckie, protestant, chez sa mère, dans une petite maison étroite, comme toutes celles du quartier. Un peu désoeuvré, Chuckie écume les pubs avec ses potes, n'a aucun projet, pas de travail, pas de petite amie. Son copain Jack, catholique, vit dans une rue un peu mieux lotie, dans un bel appartement et travaille. Sarah sa compagne, l'a quitté mais grâce à cette relation, il habite un bel appartement avec un chat miteux qu'il n'aime pas trop. Il a repéré une serveuse d'un pub, se pose des questions existentielles sur son boulot qui consiste à récupérer des articles achetés à crédit chez des habitants de Belfast, parfois par la violence.

Les deux amis sont en bout de route de leur vie routinière et entre deux pintes et deux migraines, ils pensent à changer leur vie. Autour d'eux, la famille, les amis et les voisins gravitent. La vie du quartier n'est pas désagréable, mais tous vivent dans une misère plus ou moins prononcée.

Chuckie va avoir l'idée du siècle, pourtant stupide au premier abord, pour se faire beaucoup d'argent, et ça marche !

J'ai suivi l'évolution de Chuckie et Jack avec plaisir, la vie de leur entourage solidaire mais avec les préjugés de l'époque. J'ai moins aimé le côté politique pourtant indispensable. J'ai beaucoup ri, attendrie par ces personnages qui profitent des occasions que la vie leur donne, en se posant de multiples questions et en avançant, conscients de l'importance de prendre leur destin en main malgré la guerre et la misère.

Une lecture addictive où l'auteur mettant en scène des personnages masculins arrive à glisser entre deux lignes une pensée féministe avec le changement de vie radical de la mère de Chuckie.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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Saisissez la barre en cuivre et tirez la lourde porte du pub. Vos premiers pas dans cette salle obscure et surpeuplée sont hésitants. Vous cheminiez dans une rue grise de Belfast, noyée dans le crachin, et vous voici projeté dans la chaude ambiance d'un bar nord-irlandais. Tout est un peu flou, comme en suspens. Les vitres sont couvertes de buée, l'ambiance est enfumée. Vous sentez les effluves du tabac, de la bière bon marché et de l'urine. Les cris des commandes et le brouhaha des discussions animées couvrent le morceau de rock pourtant lancé à plein volume. Vous commencez à détailler la faune qui peuple l'établissement. Il y a le videur aux bras couverts de tatouages loyalistes, des étudiantes en goguette, des piliers de bar décatis et au fond un groupe de cinq trentenaires attablés devant leurs pintes. Approchez-vous de Chuckie, Donal, Septic, Slat et Jake, ils vont vous parler de Belfast, des Troubles et de... l'amour et de la vie. le premier, Chuckie, est bedonnant, dégarni et avouons-le, complètement décalé. Il n'a jamais vraiment travaillé et vit avec sa maman dans une bicoque située dans un quartier prolétaire et protestant de la ville. Chuckie va vous expliquer comment il a fait fortune en peu de temps. Son créneau ? La crédulité. Son talent ? La jobardise. le dernier du groupe, Jake, se remet douloureusement d'une rupture et exerce une profession qu'il déteste. Ce catholique au coeur d'artichaut traîne son spleen dans les rues de Belfast en enchaînant les désillusions amoureuses. D'autres voix vont surgir dans le récit et se mêler à celles de Chuckie et Jake. Et la prouesse de Robert McLiam Wilson est de parvenir à combiner ces voix plébéiennes pour construire un roman global sur Belfast. Il parvient à recréer le monde foisonnant et haut en couleur des quartiers populaires de la capitale de l'Ulster. Une ville meurtrie par des années de guerre civile où l'étrange amitié qui lie Chuckie le Protestant à Jake le Catholique peut surprendre. Mais pour l'auteur, le conflit nord-irlandais n'est qu'une vaste mascarade qui ne peut en aucun cas justifier l'injustifiable : la mort de victimes innocentes. Il rend avec brio toute l'absurdité d'un monde de postures, qu'elles soient politiques ou économiques. Chaque belligérant en prend pour son grade. Au diable les vieilles haines ressassées, Robert McLiam Wilson exprime tout son amour pour cette ville provinciale et ses habitants. Un roman brillant, pour une fois je n'exagère pas, ce pavé est un concentré de tendresse, d'humour et d'humanité !
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