LE POLO DES HUNS
Un sport équestre mettant aux prises des cavaliers chevronnés dotés de superbes chevaux spécialement entrainés pour l'évènement.
Des cavaliers qui se disputent âprement un enjeu.
Des points marqués lorsque qu'une ligne est franchie
Un arbitre, des spectateurs excités par l'enjeu…
Voilà donc un livre sur le polo ?!
Que nenni.
Ici point de greens britanniques ou de club réservé à des gentlemen triés sur le volet. Point de « fighting spirit » accompagné de « fairplay ». Point d'école d'équitation, d'anciens nobles en mal de sensations ou de militaires issus des écoles de cavalerie désireux de se valoriser aux yeux de quelque promise ébaudie.
Ici, c'est l'Afghanistan, la Perse, la Route de la Soie, Maïmana à la frontière du Turkménistan.
Ici, ce sont les Ouzbeks, Turkmènes, Pashtouns, Tadjiks, Hazaras, Arabes…
Ici, c'est l'école de la vie qui prévaut depuis plus de quatre mille ans en Asie Centrale.
Ici, la vie est rude, d'autant plus rude que fleurit la culture du pavot.
Ici, un homme n'existe que par son cheval. Comme les Huns d'Attila de jadis.
Ici, c'est le « bouzkashi », le sport national équestre afghan.
Ici, c'est le « Polo des Huns » !
Le terme « bouzkashi » est issu du persan et composé des mots « boz » (chèvre) et « kachi » (tirer à soi). le sport consiste, dans la mêlée des chevaux, à attraper le cadavre d'une chèvre et à le transporter seul contre tous, derrière une ligne.
Ici c'est la violence, la brutalité pure, l'absence de règles où tout est permis, y compris tuer un adversaire.
L'afghan est férocement indépendant. Il refuse de se soumettre à un pouvoir central.
Les russes, les talibans et les « démocrates » afghans mis en place par les américains peuvent en témoigner.
Ce pays n'est pas « consolidable » dans une entité unique sauf en deux occasions.
Si une menace externe nécessite une alliance temporaire de la mosaïque des tribus en place.
Mais surtout, si un tournoi de « buzkashi » a lieu dans une des provinces du pays.
Alors là, c'est l'union sacrée autour de l'événement.
Louis MEUNIER a lu
Les Cavaliers de
Joseph KESSEL et sa vie en a été changée.
Jeune diplômé, en 2002 il tourne le dos à l'orthodoxie d'une carrière occidentale et décide d'une « césure » au sein d'une ONG. La destinée l'envoie en Afghanistan. Il y retournera en 2004 pour une randonnée équestre de 1500 Km à travers le pays. Puis en 2006 pour y vivre à Kaboul.
Il y ra
conte sa vie d'humanitaire, l'impact du pays sur la santé, ses relations avec les autochtones mais aussi avec les chevaux qu'il décrit superbement.
Il relate sa soif de participer à ce même « buzkashi » puis son implication dans ce sport primitif.
Ce récit de 330 pages révèle une aventure hors normes qui se déroule en trois parties et un épilogue.
Comme quoi, au 21ème siècle, il est encore possible de vivre ses rêves comme le faisait
KESSEL le siècle dernier dans les territoires encore sauvages d'Afrique ou d'Asie Centrale.
Le style de
Louis MEUNIER est simple direct. Sa narration laisse clairement transparaître le caractère anticonformiste du narrateur et ses pulsions intimes : la recherche de l'authentique, la prise de risque, l'ouverture sur l'autre mais surtout son amour pour les chevaux
Conclusion : une superbe surprise que ce livre reçu d'une opération « Masse Critique » - dévoré d'une traite – à ne pas manquer pour ceux qui aiment les équidés et / ou les récits d'aventures hors normes – un livre dense sur l'âme de l'Afghanistan.
P@comeux - 2014/06 ©