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Citations sur La Grande Muraille (13)

- Du plaisir ? dit-elle incrédule en le scrutant attentivement. Qu'est-ce que tu racontes ? Y a pas de plaisir à ramasser des pierres, c'est ennuyeux et fatigant et si c'est valable dans les terres, ici, ça sert à rien.
Elle n'était pas loin de penser que Firmin avait reçu dans les jours précédents quelque méchant coup de soleil et que la fièvre l'avait pris subitement.
- Mais si, assura-t-il, ça sert ! C'est du travail, donc ça sert.
Il ne voulait pas sortir de là, il ne voulait surtout pas reconnaître que ce qu'il entreprenait était inutile. Il sentait, sans pouvoir encore l'expliquer, que l’œuvre qu'il voulait faire lui était désormais aussi indispensable que l'air, le pain ou le vin. Certes, il se savait toujours libre de poursuivre ou d'abandonner, mais il était certain que dans ce dernier cas, sa vie entière serait marquée par cet abandon.
- De toute façon, reprit-il, ce qui compte c'est de faire quelque chose, n'importe quoi, mais quelque chose.
Elle haussa les épaules puis se frappa la tempe avec l'index de sa main droite.
- Maintenant, dit-elle, je suis sûre que tu es fou ! Un homme normal ne s'amuse pas à ramasser des cailloux pour le plaisir.
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Ce qu'il savait également, et cela le gênait, c'était qu'il allait devoir abandonner, sans doute pour quelques semaines, le gigantesque travail qui lui tenait de plus en plus à cœur. Il allait devoir laisser son chantier tel qu'il était, c'est à dire à peine effleuré, tout juste découvert, presque intact. Certes, les pierres ne s'envoleraient pas en son absence, il retrouverait sa pièce telle qu'il la laisserait, mais l'idée de tout ce temps qu'il allait perdre l'assombrissait.
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Il resta ébahi devant Notre-Dame, ce merveilleux tas de pierres.
Il lui importait peu que des milliers d'hommes aient collaboré à ce chef-d’œuvre. Ce qu'il retint, ce fut qu'un inconnu ait un jour décidé de s'attaquer à cette tâche.
La tour Eiffel, en revanche, l'étonna sans l'émerveiller. Elle était à ses yeux trop simple, ou trop compliquée. Ce n'était que ferraille boulonnée et peinte. Ici, nulle trace de cette nature que l'on sentait dans tous les monuments de pierre et qui leur conférait tant de beauté.
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Tout à l'heure, peut-être, ce serait Edmond qui, avant de partir, prendrait un éclat dans le ventre ou une balle dans la tête. Demain ou tout de suite, ce serait lui, Firmin, qui sentirait le coup mortel du projectile qui frappe.
- Dis, demanda soudain Firmin, tu ne trouves pas que ton Bon Dieu déconne un peu de laisser faire tout ça ?
- Tais -toi, c'est toi qui déconnes, dit âprement Edmond. C'est toi, c'est moi, c'est tout ceux qui sont là, ici, en face, partout dans le monde, c'est le monde entier qui déconnes ! (La voix d'Edmond s'enfla.) Oui, tout le monde déconne parce que tout le monde est libre de le faire. Tout le monde est libre aussi de ne pas le faire, mais il est plus facile de déconner que de faire le reste ! Alors voilà ce que ça donne, des tas de cadavres. Oui ! Des tas de cadavres avec tout autour des pauvres cons comme moi qui chialent devant leur propre connerie !
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Firmin avait suivi deux obsèques en quinze jours. C'est au soir des secondes que l'oncle Alfred, frère de son père, l'avait glissé dans sa famille comme on glisse une feuille volante entre les pages d'un livre bien relié. La feuille ne s'était pas confondue avec les autres et, au fil des ans, elle avait de plus en plus dépassé du volume.
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Il aurait voulu pouvoir conserver de la société les quelques rares mais bons côtés qu'il y trouvait. Il aurait aimé bénéficier des deux plaisirs à la fois. C'était impossible. Le religieux qui s'enferme au plus profond d'un monastère pour y chercher le silence regrette parfois de ne pouvoir le rompre. Firmin, en fuyant le troupeau de ses semblables, s'était également coupé de la chaleur qui en émane.
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Firmin retrouva donc l'oeuvre de sa vie, et de ce fait, le monde s'estompa un peu plus chaque jour. Comme il l'avait dit à son cousin, ce furent les autres qui le poussèrent dans le silence, qui échafaudèrent autour de lui un autre mur, un mur d'indifférence et de mépris amusé.
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le monde il est aussi fou que moi beaucoup plus même, parce que ma folie elle ne gêne personne, elle ne fait pas la guerre ma folie, elle ne dérange pas le voisin ! je me la fais chez moi rien que pour moi
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- Et moi je te dis que tu es fou, pauvre firmin...
- Ta gueule, tu causes comme les autres, laisse-moi travailler !
- Tu parles d'un boulot oui ! Tu perds ton temps...
- C'est pas vrai, d'ailleurs ça ne regarde que moi, moi j'ai besoin de faire ça pour vivre.
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Pas une seule fois pourtant, il ne s'était senti découragé. Même pas lorsque ceux du village l'avaient traité de fada, de tournepierres ou de bagnard volontaire.
Non, plus les autres se moquaient, plus il sentait que sa seule défense était dans la poursuite de sa tâche.
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