Comment aborder la double question de la différence culturelle et cultuelle ? Comment évoquer l'Angleterre brumeuse et stricte et la Jamaïque ensoleillée et paillarde ? Comment lier Pearline Portious et Adamine Bustamente ? Comment retisser le lien mère-fille incisé dès la naissance ?
C'est un même geste, l'enfant remplace les parents et tout se trouble dans un délire de personnalité. Adamine Bustamente va passer sa vie à revendiquer qui elle est et se heurter d'emblée à l'Etat Civil. Erreur de ligne ou de case, erreur administrative, sur ses papiers Adamine sera Pearline, et la crieuse de vérité, passerelle entre le monde des esprits et le monde des hommes en oubliera parfois jusqu'à son vrai nom.
Qui est-on ?
Lorsqu'on est jamaïcaine et qu'on débarque dans l'austère Angleterre ? Qui est-on lorsqu'on est revivaliste et que cet art est ici une folie, là-bas un don ? Qui est-on lorsqu'on crie les paroles de Dieu tout haut et qu'ici, c'est l'asile, là-bas le respect infini ?
Adamine va voyager pendant tout le roman et l'écrivain jouer avec elle, et nous. En chapitrant son livre en parties distinctes, d'abord au style direct, façon confession et ensuite par le recueil malin des paroles d'Adamine,
Kei Miller brouille la perception. Il propose un récit aussi tarabiscoté que l'esprit de son personnage et montre combien le trouble de l'esprit est une souffrance infinie.
L'authentique Pearline Portious est un roman délicat dont l'écriture, fortement évocatrice, renvoie le lecteur à sa propre attention. Chaque mot pèse et chaque anecdote peut se révéler capitale par la suite.
Un dernier mot sur l'objet, quelle belle collection ! Format, couverture, papier, tout est parfait ! Bravo à Zulma pour ça, et merci pour le livre Masse Critique.