Cléante : la peste soit de l'avarice et des avaricieux!
Harpagon : Comment? que dis-tu?
ÉLISE : Qu'avez-vous à me dire ?
CLÉANTE : Bien des choses, ma sœur, enveloppées dans un mot. J'aime.
ÉLISE : Vous aimez ?
CLÉANTE : Oui, j'aime.
Il ne faut plus jurer de rien ;et je crois après cela que je suis homme à me voler moi-même.
(Harpagon)
HARPAGON. - Ah! que cela est bien dit! Approche, que je t'embrasse pour ce mot. Voilà la plus belle sentence; que j'aie entendue de ma vie : Il faut vivre pour manger, et non
pas manger pour vi... Non, ce n'est pas cela. Comment est-ce que tu dis ?
VALÈRE. - Qu'il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger.
HARPAGON, à maître Jacques. - Oui. Entends-tu? (à Valère.)
Qui est le grand homme qui a dit cela?
VALÈRE. - Je ne me souviens pas maintenant de son nom.
HARPAGON. - Souviens-toi de m'écrire ces mots : je les
veux faire graver en lettres l'or sur la cheminée de ma salle.
" C'en est fait, je n'en puis plus; je me meurs, je suis mort, je suis enterré. N'y-t-il personne qui veuille me ressuciter, en me rendant mon cher argent, ou en m'apprennant qui l'a pris?"
HARPAGON : Voilà, monsieur, qui est un honnête commissaire, qui n'oubliera rien, à ce qu'il m'a dit, de la fonction de son office. (Au commissaire.) Chargez-le comme il faut, monsieur, et rendrez les choses bien criminelles.
Acte V, Scène 5.
Ah! Valère, chacun tient les mêmes discours. Tous les hommes sont semblables par les paroles; et ce n'est que les actions qui les découvrent différents.
BRINDAVOINE. – Monsieur, il y a là un homme qui veut vous parler.
HARPAGON. – Dis-lui que je suis empêché, et qu’il revienne une autre fois.
BRINDAVOINE. – Il dit qu’il vous apporte de l’argent.
HARPAGON. – Je vous demande pardon. Je reviens tout à l’heure.
Elise : Hélas ! qu'avec facilité on se laisse persuader par les personnes que l'on aime !
N'a-t-il point de honte,à son âge, de songer à se marier ? Lui sied-il bien d'être encore amoureux ? Et ne devrait-il pas laisser cette ocupation aux jeunes gens?
.Cleante.