Citations sur La Storia, tome 2 (21)
L’humanité, de par sa nature, tend à se donner une explication du monde dans lequel elle est née. Et c’est là ce qui la distingue des autres espèces. Chaque individu, même le moins intelligent et le dernier des parias, se donne dès son enfance une quelconque explication du monde.
Le fait est que l’adolescent voyait l’humanité tout entière comme un seul corps vivant ; et de même qu’il sentait toutes les cellules de son propre corps tendre vers le bonheur, de même il croyait que c’était vers celui-ci que se tendait l’humanité tout entière, et que c’était là son destin. Et qu’en conséquence, tôt ou tard, cet heureux destin devait s’accomplir !
On met à nu même les intimités les plus scandaleuses que jusque-là on avait essayé de camoufler, du moins en partie. On rouvrait les prisons et on découvrait les fosses et les dolines. On revenait sur les lieux et on faisait justice. On récupérait les documents cachés. On compilait des listes et on notait des noms.
« le latin écrit, le latin oral, l’histoire et les mathématiques… la géographie… La géographie, moi, je vais l’étudier sur place. L’Histoire, c’est une comédie à eux, qui doit finir ! nous, on la fera finir ! Et les mathématiques… quel est le chiffre qui me plaît le plus ? C’est le zéro !…
Si elle exerçait encore son métier de putain, c’était pour lui ; et de même, c’était pour lui qu’aux périodes de vaches maigres, elle courait çà et là, faisant un peu de tout, blanchisseuse, infirmière ou ouvrière. Si ç’avait été pour elle seule, elle se serait laissée mourir, comme certains animaux sans maître, quand ils atteignent la vieillesse.
Leur langage ou, plutôt, leur argot plein d’allusions, se réduisait à un vocabulaire minimal ; et en particulier, au sujet des femmes, il se bornait à des plaisanteries plus ou moins obscènes.
le simple fait de voir devant lui une feuille de papier et une plume lui rappelait l’école, et sur-le-champ il avait la crampe des écrivains et des fourmillements aux doigts.
La Russie est aussi impérialiste que l’Amérique, mais l’empire russe est de l’autre côté, et par contre, de ce côté-ci, c’est l’empire d’Amérique. Leurs différends ne sont que des simagrées. En attendant, tous les deux, ils se font des clins d’œil et ils se partagent le butin !
Staline et les autres chefs, c’est du pareil au même : ils se mettent d’accord pour couillonner les autres et se couillonner mutuellement.
C’est là la position qu’il a toujours prise pour dormir, aussi bien quand il était petit qu’adolescent et adulte ; mais chaque nuit, au moment où il se pelotonne ainsi, il lui semble qu’il redevient petit. Et à la vérité, petits, grandis ou adultes, jeunes, âgés ou vieux, dans le noir on est tous égaux.