A peine exprimons-nous quelque chose qu'étrangement nous le dévaluons. nous pensons avoir plongé au plus profond des abîmes, et quand nous revenons à la surface, la goutte d'eau ramenée à la pointe pale de nos doigts ne ressemble plus à la mer dont elle provient nous nous figurons avoir découvert une mine de trésors inestimables, et la lumière du jour ne nous montre plus que des pierres fausses et des tessons de verre; et le trésor, inaltéré, d'en continue pas moins à briller dans l'obscur. MAETERLINCK
Ce qui le tourmentait, c'était que les mots se dérobaient, la vague conscience déjà qu'ils n'étaient que des échappatoires occasionnelles, et qu'ils trahissaient l'émotion.
Immanquablement, ce que nous avons vécu l'espace d'un instant comme un tout et sans nous poser aucune question devient incompréhensible et confus dès que nous voulons l'enchaîner par la pensée pour nous en assurer la propriété.
Il savait distinguer maintenant entre le jour et la nuit ; en fait, il l'avait toujours su : il avait fallu qu'un rêve oppressant déferlât sur ces démarcations pour les absorber, et cette confusion lui faisait honte. Toutefois, l'idée qu'elle était possible, que certaines murailles autour de l'homme étaient aisément renversées, que les rêves fiévreux qui rôdaient près de l'âme pouvaient s'y employer et y ouvrir d'étranges brèches, cette idée s'était elle aussi ancrée profondément en lui, et les ombres pâles qu'elle répandait ne s'effaçaient pas. (Page 236)
Pourtant, au moment où il fut emporté, il s'éveilla quelques secondes, et s'accrocha désespérément à cette seule pensée : "Ce n'est pas moi ! Ce n'est pas moi ! Demain, je redeviendrai moi-même ! Demain !" (Page 179)
Tout ce qui, vu de loin, nous semble si vaste et si énigmatique, finit toujours par nous paraître absolument simple, par retrouver un équilibre et des proportions normales, banales même. Comme si une frontière invisible était tracée autour de l'homme. Tout ce qui se trame au-delà de cette frontière et paraît venir à nous du bout du monde est comme une mer brumeuse peuplée de formes gigantesques et changeantes ; tout ce qui franchit cette frontière, tout ce qui devient action et entre en contact avec notre vie est clair, avec des formes et des dimensions parfaitement humaines. Entre la vie que l'on vit et celle que l'on sent, que l'on devine, que l'on voit de loin, il y a cette frontière invisible, telle une porte étroite où les images des événements doivent se faire aussi petites que possible pour entrer en nous... (Page 175)
Dans cette période critique, toute sa vie ne fut qu'un effort sans cesse recommencé pour singer la brutalité et la virilité plus affirmée de ses amis et, en secret, une profonde indifférence pour ce même effort.
Il eût méprisé cet homme non point d'être un débauché, mais de ne rien être de mieux;
Son attention était tout entière appliquée à retrouver le point, en lui, où s'était produite soudain cette modification de la perspective intérieure.
L'idée de l'irrationnel, de l'imaginaire, des parallèles qui se rejoignent à l'infini, donc quelque part, me déconcerte.