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Critique de Bookycooky


Dans « Autres rivages », récit autobiographique , Nabokov dit partir à la recherche de pistes où les courants thématiques du début de sa vie, notamment les puzzles, les échecs, les couleurs, les randonnées, l'exil…. qui structurèrent sa vie , et , qui, lui ouvrant des nouvelles voies lui permirent d'atteindre sa maturité créative. Selon lui l'objet d'un récit de mémoires est précisément ce point de rencontre, “ d'une forme d'art impersonnel et d'un récit de vie très personnel”. Mais le bonhomme est compliqué et ses dessins thématiques se perdent dans les digressions. L'abordant pour la première fois avec son « autobiographie », je m'y fraie comme dans un champs miné.
Déjà dans les premières pages il se lance dans un discours d'enfant gâté et arrogant. La Musique, Niet, «  une succession arbitraire de sons plus ou moins agaçants », La Peinture, Niet, enfin presque , vu que la mère s'y acharnera à le stimuler visuellement. Il grandit avec précepteurs et autres dans une maison avec cinquante domestiques que personne ne dirige ni ne surveille, car le père s'en fiche et la mère est occupée ailleurs à cueillir des champignons et lui offrir des crayons gigantesques avec lesquels il lui est impossible d'écrire. Toutes sortes d'articles de confort et d'agréments arrivent en procession régulière du magasin anglais de l'Avenue Nevski, à Saint-Petersbourg , la famille ne se lavant qu'au savon Pears, et ne mangeant au petit déjeuner que de la nourriture importée de Londres…. Et tout cela exprimé sur un ton désinvolte , trop désinvolte vu la personne intelligente , voir génie qu'il prétend être dans le contexte d'une enfance dans la Russie des Tzars , d'une pauvreté extrême. Et puis arrivent ses aïeules. Il semble en avoir plusieurs dans toutes les têtes couronnées de l'Europe, avec descriptions généalogiques fastidieuses. Enfant prodige il se souvient même des détails infimes de ses quatre ans, comme le grand-père qui avale des cailloux 😊…. nous sommes à la page 72 et l'ego du bonhomme est déjà au firmament , Dieu sait ce qui m'attend sur les 350 pages restantes, avec un sens de l'humour ( qu'il pense avoir) aussi douteux que le personnage 😊….

Ce livre dont le titre original est « Speak, Memory » regroupe en faites une série d'articles de magazines écrits à l'origine pour Harper's et le New Yorker, lorsque Nabokov avait besoin d'argent pour compléter ses maigres revenus d'enseignant. Quel paradoxe , n'est-ce-pas ? de plus l'arrogant Nabokov même avec ce genre, l'autobiographie, a voulu se distinguer , “ Ce sera un nouveau genre d'autobiographie, ou plutôt un nouvel hybride entre autobiographie et roman. Elle se rapprochera de ce dernier car elle aura une intrigue précise. Diverses strates de mon passé formeront, en somme, les rives entre lesquelles s'écoulera un torrent d'aventure physique et mentale. Ceci impliquera la peinture de pays, personnes et modes de vie nombreux et variés….Ce sera une succession de brefs extraits, du genre essai, qui, avec un élan soudain, formeront quelque chose de très bizarre et dynamique: les ingrédients apparemment innocents d'un breuvage tout à fait inattendu .” Inattendu ? Franchement je préfère de loin les autobiographies « Non inattendues  » mais passionnantes, d'écrivains comme Elias Canetti, Doris Lessing , deux auteurs nobelisés, écrites sans prétention avec humilité. de plus ici , Nabokov avec son dernier chapitre XVI qu'il a éliminé dans sa dernière version mais présent dans mon édition, scie la branche sur laquelle il reste assis tout au long des 15 chapitres, faisant basculer l'ouvrage du côté de la pure fiction . Décidément à force de sophistications, faisant constamment hésiter le lecteur sur le statut des chapitres qui constituent le livre , entre nouvelles, donc fiction, ou anecdotes autobiographiques , donc véridiques , il perd finalement de sa crédibilité de ses propres soins. Mais, mais….j'ai trouvé que ce chapitre XVI était en faites le chapitre le plus passionnant du livre, et là j'ai un peu raboté de mon antipathie pour le personnage, qui effectivement est très complexe.

Cette lecture je le dois à mon ami babeliote Creisi ( @creisifiction) , dont l'excellent billet a fini par me convaincre à lire un auteur à vrai dire dont je n'ai rien lu dû à mon aversion à ses différents propos mégalo et sa critique acerbe de Dostoievski qui perso j'aime beaucoup. Et finalement je ne suis pas déçue vu que le bonhomme s'est révélé comme je le pressentais 😊. Il a écrit un livre qui s'intitule « La vraie vie de Sebastian Knight » , que je n'ai pas lu, mais vu le titre je pense qu'il aurait mieux fait d'écrire aussi par la suite le sien «  La vraie vie de Vladimir Nabokov », pour récupérer et sauver Sa Vraie Vie de la fiction 😁. Une première rencontre en demi-teinte avec un romancier lépidoptériste ou plus simplement dit, assassin de papillons 😁! Et quand je pense qu'on a même donné son nom à un papillon et qu'il s'en vante dans le livre, j'enrage. C'est peut-être pour cela qu'il abhorre Freud , car si ce dernier avait pu un peu creuser cette passion ou plutôt obsession du sieur pour les papillons que , à ce qu'il dit, personne à part ses parents n'a jamais compris , Dieu sait ce qu'il en aurait révélé sur son moi profond 😁??? de plus il ambitionne être le précurseur d' espèces nouvelles et quand il apprend que tel papillon a déjà été répertorié par un Tel, il se venge de ce un Tel en lui donnant le rôle d'un aveugle dans un de ses romans. Je ne sais vraiment pas s'il faut en rire ou en pleurer , en tout cas toute cette arrogance et mépris envers autrui n'ont sûrement pas facilité sa vie.

Un livre quand même interessant vu son parcours de vie de la Russie aux États Unis, passant par Londres et Berlin, et le nombre d'anecdotes infinies qu'il enguirlande d'une prose élaborée , même si je pense qu'elles ont été largement abreuvées de son imagination fertile, du moins dans les détails 😊( p.243 il n'a que 12 ans mais apparemment il a déjà ingurgité tout Pouchkine, Lermontov et Tolstoi …., petit génie.)

« Stendhal , Balzac et Zola trois détestables médiocrités de mon point de vue. » 😁 Nabokov
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