Citations sur Ce pays qui te ressemble (77)
Les hommes remplacent si souvent la tristesse par la fureur.
Lors d'un diner, Farouk lui avait glissé : "Méfiez-vous de votre mari, il a déjà fait disparaître deux épouses."
Elle avait éclaté de rire et avalé son verre d'un trait. "Ne vous en faites pas pour moi, Sire ! Une vraie femme est comme la terre. Elle survit à ceux qui la piétinent. "
Les deux enfants rivalisaient pour la mémoire des détails, ceux des règles religieuses, des interdits alimentaires ou des rites, et pouvaient réciter dans leur intégralité les prières quotidiennes. En lecture hébraïque Joe surpassait Zohar, lui qui quelques mois plus tôt ne déchiffrait pas une seule lettre. Alors que Zohar était meilleur en mémorisation, lui qui écoutait chaque jour des prières chantées par son père. Ils apprenaient en jouant, leur jeu était un apprentissage, leur apprentissage, un jeu. On aurait dit deux lionceaux s’initiant à la chasse et se mordillant les oreilles.
Nous autres, Juifs d’Égypte, nous étions là avec les pharaons, puis avec les Perses, les Babyloniens, les Grecs, les Romains ; et lorsque les Arabes sont arrivés, nous étions encore là… et aussi avec les Turcs, les Ottomans… Nous sommes des autochtones, comme les ibis, comme les bufflons, comme les milans. Aujourd’hui, nous n’y sommes plus. Il n’en reste plus un seul.
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L'enfant n'est qu'une manifestation de l'être.
Il était ainsi, ce roi enfant, impulsif et versatile, qui exhibait ses instincts comme des décorations, qui confondait ses désirs et les besoins du pays, qui croyait que, lorsqu’il mangeait, l’Égypte engraissait et que, lorsqu’il éprouvait du plaisir, la terre en était fécondée.
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Parfois la beauté est plus violente que la force.
Pour prier, chaque peuple est différent, mais pour se protéger de la mort, nous sommes tous semblables !
S’ils faisaient partie des plus pauvres du quartier, ils ne manquaient jamais de donner une pièce. Car, comme on dit, Dieu fait en sorte qu’il y ait plus pauvre que toi pour que chacun puisse donner l’aumône, qui est une obligation.
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Le djihad ? s’étonna Nino, le lettré, pour qui ce mot signifiait seulement « l’effort de l’ascèse ». – Notre prophète est un chef de guerre. Il nous guide par l’exemple. La communauté se réveillera par la guerre. Le djihad est l’exigence de la guerre… et la mort, notre plus fidèle alliée. – Que veux-tu dire ? – Il te faut comprendre, mon frère, si tu veux nous rejoindre. Notre amour de la mort, c’est la présence de Dieu. Tel est l’enseignement du Prophète. Et il répéta : – Tu dois aimer la mort ! Nino restait perplexe. La mort est une éventualité pour n’importe quel combattant. On tâche de l’éviter, on s’en protège. On peut certes désirer la mort de son ennemi ; on peut même tout mettre en œuvre pour le tuer… Mais que signifie « aimer la mort » ?
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