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En Baobabia, à la fin du XIXème siècle , la vie est plus que dangereuse. Si la traite négrière des blancs semble se tarir , elle est remplacée par celles des arabes qui ne reculent devant aucun subterfuge pour asservir les riverains du lac Tchad, la grande Eau. Parmi eux Zeïtoun dont le chemin va croiser celui de la belle Yasmina et de l'eunuque Tomasta. A trois ils s'installent sur une ile de la Grande Eau et s'engagent à fonder un monde nouveau.

Quelle claque ! D'autant plus magistrale qu'elle vient d'un roman dont je n'attendais rien de particulier.

Tout d'abord , l'histoire .
Autour des trois héros suscités , l'auteur déroule l'histoire des riverains du lac Tchad , des empires négriers à Boko Haram, en passant par la 'Dipanda ' (indépendance) , la colonisation , le poids de la religion.
On plonge dans cette Afrique que l'on pourrait penser candide mais qui aurait tant à nous apprendre, ne serait ce que la sagesse. On plonge les yeux fermés dans ces histoires qui tissent le coeur et l'âme d'un pays, entre mythe et réalité. On traverse un siècle avec cette tribu qui ne demande rien, que la tranquillité , le respect de ses croyances et l'érudition via un système communautaire. Qui ne vise qu'à s'élever sans ombrager le voisin.

L'auteur nous offre un chef d'oeuvre qui marie admirablement l'histoire et L Histoire , sans aucune longueur. Il crie à travers ces lignes l'horreur continuelle subie par ces peuples rivés à d'ancestrales croyances et coupés du monde.
Mais ce qui magnifie encore plus l'ensemble , c'est cette langue sublime qu'utilise l'auteur . Admirables tournures où se mélangent la pensée des autochtones et son talent.

Un immense coup de coeur , qui je l'espère , rencontra son public et qui pourrait remplacer quelques ouvrages poussiéreux dans les programmes scolaires !

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Ça pourrait être un roman historique sur le passé du Tchad, depuis le temps de l'esclavage jusqu'à nos jours, en passant par la colonisation et l'indépendance.
Ça pourrait être un récit de voyage. Ça pourrait être une histoire d'amour, ou une saga familiale. Ça pourrait être une utopie. Ça pourrait être…
Et c'est tout cela à la fois.
Parce que le roman commence avec des esclaves évadés entamant le difficile voyage de retour vers la terre natale.
Parce que la cachette qu'ils vont trouver, c'est une extraordinaire île flottante sur le lac Tchad.
Parce que leur île va accueillir chaleureusement, au fil des décennies, tous ceux et celles qui ont besoin d'un refuge.
Parce que, de loin en loin, un voyageur apporte d'incroyables nouvelles du monde...
Parce que l'écriture de Nétonon Noël Ndjékéry est magique, poétique, qu'elle m'a embarquée, captivée et émue.
Une très, très belle découverte.

Challenge Globe-trotter (Tchad)
Challenge Plumes africaines
Club de lecture avril 2024 : "Un livre offert ou emprunté"
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A la fin du 19ème siècle, la traite négrière subsaharienne est en plein essor. Les royaumes islamisés au coeur de l'Afrique pratiquent ce commerce lucratif au profit de leurs commanditaires arabes d'Egypte et du Moyen-Orient.
Trois esclaves en fuite, un eunuche, une jeune yéménite et un adolescent se réfugient sur une île au milieu du lac Tchad, bientôt rejoints par une poignée de jeunes arrachés à leurs ravisseurs. Sur cette île mobile, dérivant au gré des courants, ils fondent une communauté basée sur la tolérance et la fraternité, loin des atrocités qui règnent dans ce coin du globe. Cet éden à l'écart des bouleversements techniques et des deux guerres mondiales verra bientôt son unité fracassée par les folies nationalistes qui frappent les jeunes états africains auxquelles s'ajouteront les délires religieux de Boko Haram et ses prédations sur les populations.
Avec beaucoup d'humour et dans un style imagé et enlevé, l'auteur nous raconte plus de cent ans d'exploitation et de pillage en Baobabia, nom donné à une région comprenant le Tchad actuel. Il nous rappelle que les populations autochtones ont eu à souffrir de leurs propres rois plus enclins à s'enrichir qu'à gouverner, puis du colonialisme occidental accapareur des richesses locales et de main d'oeuvre bon marché et enfin de dictateurs assoiffés de puissance et de sang. Ces évènements sont vus par le prisme de ce microcosme qu'est cette société utopique créée par des esclaves en fuite. Leur éloignement de tout progrès technique donne lieu à des situations comiques quand celui-ci fait irruption dans leur monde. Ainsi l'apparition d'étranges oiseaux dans le ciel suscitent des questionnements et des hypothèses farfelues. La naïveté et le pacifisme des habitants de l'île contrastent avec la folie ambiante à laquelle ils finissent par être exposés dans des scènes de confrontation, parfois comiques par leur absurdité.
Hélas, s'il n'y pas d'arc-en-ciel au paradis, il n'y a pas non plus de paradis sur terre.
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Un monument !
Une urgence de lecture.
Incontournable, superbe, « Il n'y a pas d'arc-en-ciel au paradis » est d'une force inouïe. Un livre qui surpasse le toit du monde. Une fierté éditoriale hors norme. Entre le chant du conte qui arrime une histoire riche de signaux et les faits vrais qui persistent encore de nos jours. Cet hymne mémoriel est une barque voguant sur le fleuve des rappels et des insistances. Ce kaléidoscope est l'expression même d'une littérature de pouvoir, essentielle et historique.
« Face au premier Européen à rafraîchir le bleu de ses yeux à l'onde de ce lac hors norme, un autochtone, un de tes lointains ancêtres, embrassant l'horizon de ses bras, s'est écrié « Tchad », ce qui signifie « grande étendue d'eau » en langue Kanouri. Quelques décennies plus tard, les descendants de ce Blanc ont trouvé que ce nom, véritable haïku, ne pouvait se suffire du seul bassin aquatique aussi vaste soit-il. Ils l'ont donc étendu à une partie considérable de la Baobabia (Terre du baobab) ou Afrique subsaharienne. Ainsi naquit ton pays le Tchad. »
Écoutez Nétonon Noël Ndjékéry, le périple retour de Tomasta Mansour.
Zeïtoun, jeune esclave, porte-drapeau d'une terre de sable et d'errance. L'exil forcé, chaîne autour du cou, l'enfant volé à des fins de profits par les négriers. Lui, d'amandes et de sucs, de malice et de débrouillardise, l'enfant désert et de communauté, fuir les vils, se cacher et être enfin sauvé.
L'auteur surdoué dévoile l'idiosyncrasie de l'esclavage de tous ces peuples meurtris dans leur chair. On est captivé par Zeïtoun, sa rencontre fortuite avec Tomasta Mansour qui a recueilli ce petit être enfoui sous les sables mauvais.
« Yasmina et Tomasta Mansour recueillent un adolescent à l'article d'inanition, pour ne pas dire plus. Au collier de sang coagulé qu'il portait au cou, ils reconnurent un petit esclave en fuite et en eurent le coeur serré. »
On ressent l'altruisme de cet homme, lui-même ancestral esclave en partance avec Yasmina, fugitifs emblématiques. le périple initiatique est le fil rouge entre Khartoum, la région du lac Tchad, ce qui se murmure ici, est l'exactitude, la réalité à peine floutée. Et pourtant , ce livre socle est une fable utopique. Une déambulation qui mène aux constructions d'ivoire, d'essences et de résilience.
« Bientôt, ils commencèrent à zigzaguer entre un nombre de plus en plus croissant de marais parsemés ou bordés de bouquets de papyrus. C'était un indice qui ne pouvait tromper. La Grande Eau ne se trouvait plus loin. »
Ce récit captivant, caravane littéraire dont on ne lâche pas les yeux un seul instant. Personnages indélébiles et entre les virgules, le point d'appui crucial , la fresque d'une communauté qui va éclore sur l'île nomade. « Une personne, toutes les personnes. Socle du savoir vivre à Keyba. »
Elle dérive cette île , tout comme l'histoire qui enfle, tsunami, les religions, les oppressions, les soumissions sur l'autre rive à portée de vue, de craintes irrévocables.
Pourtant « le fameux royaume affranchi de toutes les servitudes terrestres » oasis et antre fraternel, de coutumes et d'habitus loyal ne résistera pas aux faux-frères de Boko-Haram.
Fleuve de lycéennes jetées en pâture, l'île assiégée et décapitée, l'utopie égorgée vive.
On pourrait par la grâce de la plume de Nétanon Noël Ndjékéry croire à une légende. La contemporanéité survole les mythes et prend place dans cet écrin monde.
Ce grand livre lucide et engagé lève le voile sur les tragédies des empires négriers, aux mouvances djihadistes. Baobabia, le drapeau des utopies et d'une société modèle mais éphémère. Un siècle au travers de Tomasta Mansour, un homme qui n'a jamais mis le genou à terre.
Un livre phénoménal, précieux, rare. Publié par les majeures éditions Hélice Hélas.
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N°1702 – Janvier 2023

Il n'y a pas d'arc en ciel au paradisNétonon Noël Ndjékéry. - Helice Helas Editeur.

A travers l'errance de Tomasta Mansour, un esclave eunuque en fuite qui se fait passer aux yeux des populations rencontrées pour un dignitaire religieux et belle et blanche Yasmina, fugitive elle aussi, échappée d'un harem, l'errance de ce couple hétéroclite croise la route de Zeïtoun, jeune esclave fuyant les trafiquants esclavagistes arabes. Des rives de la Mer Rouge au lac Tchad, le voyage de ce désormais trio à travers le désert comme à travers le temps où l'Histoire se mêle à la fiction, entre colonisation française et trafic d'êtres humains a quelque chose d'initiatique. Ce long voyage se transforme en une lutte pour la vie entre la mystification religieuse, la soif omniprésente et la constante volonté de ne pas revenir à l'état d'esclavage en tombant entre les mains des négriers arabes.
Dans l'évocation de son parcours se mêlent le merveilleux de la fable, le réalisme du témoignage, la magie et les légendes de l'Afrique, la tradition, l'occulte et les mythes. Cette île qui dérive au milieu du lac Tchad fait figure de terre d'où l'esclavage est absent et où règne la paix la liberté et la tolérance  , mais cette fable quelque peu utopique s'arrête cependant brutalement quand les querelles de territoires prennent le dessus et que l'instabilité politique s'installe. La traditionnelle tranquillité de ce lieu insulaire est même bousculée par l'émergence de la foi islamique et avec elle de l'instauration d'un califat terroriste et confessionnel qui entend asservir au nom du Coran et de ses promesses ce peuple qui ne demandait qu'à vivre en paix. C'est l'image de ces pays jadis colonisés qui aujourd'hui peinent a trouver une indépendance et un ordre public et sont la proie de toutes les manipulations politiques et religieuses qui les asservissent toujours autant.

Cette saga africaine qui est agréablement et poétiquement écrite fait voyager le lecteur dans le temps et dans l'espace. L'épilogue quant à lui m'évoque les malheureux massacres perpétrés au nom de l'enseignement tronqué d'une religion qui se veut celle de la paix autant que les promesses illusoires de son enseignement.
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Une fable utopique sur un siècle. Portée par des protagoniste forts ne se laissant jamais détourner de leur but suprême celui de la paix, d'une vie en collectif sans domination, d'une vie débarrassée de l'esclavage ancestrale (négriers happants au hasard des routes)
moderne( issu de la colonisation, du capitalisme et des religions qui se frottent et se piquent sans jamais mains à mains).
Les hommes violence qui écrasent ou s'écartent du monde
La Keyba qui attire, qui rassure, qui tourne dans l'eau sans attache que celle de l'humanité
jusqu'à l'invasion.
Une idée qui réchauffe tout en désespérance face aux attaques auxquelles elle doit sans cesse faire face. Cette intrusion de l'ordre de l'asservissement permanent des puissants sur les plus discrets, renouvelée, perpétuelle.

Un beau roman à la langue juste et exigeante pour rendre compte et dénoncer.
L'humain en prend pour son grade. Il est faible et doux, amer et tendre, brutal et ingénieux.

L'introduction aurait pu me faire fuir tant le regard sur les corps de femmes, objets, m'était brutal, il fallait nécessairement dépasser pour comprendre.

Une très belle suite ou introduction à Exterminez toutes ces brutes de Raoul Peck, documentaire actuellement sur Arte.

En prime l'objet/livre est beau.
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Le récit de ce livre a été très bien fait avant moi, je n'y reviendrai pas. Tombée dessus au hasard de propos à la radio, j'ai d'abord été intriguée par le titre puis j'ai découvert qu'il s'agissait d'un tchadien: je ne connaissais que Nimrod.
J'ai souvent apprécié l'écriture mais j'ai été déroutée par le mélange de légendes et de réalités et cela m'a paru un peu long. J'ai beaucoup appris sur cette période d'une centaine d'années qui va jusqu'au Boko Haram. Colonisation, esclavagistes noirs, les indépendances. Ils étaient tranquilles sur leur île flottante où ils avaient fondé une société sympathique mais les pays jouxtant le lac Tchad (la Grande eau) les envahissent à tour de rôle.
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On pourrait parler de contes et légendes africaines mais malheureusement ce livre nous livre de façon romancée l'histoire réelle du Tchad de la fin des années 1800 jusqu'à nos jours.
On revisite cette histoire à travers la vie familiale de Tomasta et Yasmina, deux esclaves qui se sont sauvés et ont crée une communauté pacifiste sur une ile du lac Tchad. La grande histoire du monde se déroule sans qu'ils n'en sachent rien, découvrant au hasard des accostages des bribes de l'évolution humaine et technique.
Un très beau roman humaniste, bien mené et écrit où on apprend ou redécouvre ce que fut l'Afrique coloniale.
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Roman intéressant balayant l'histoire du Tchad et des pays environnants, écrasés sous le joug de l'esclavage organisé par les Arabes du Nord, puis par la colonisation européenne, également racistes et assassins.
Le fantôme de l'indépendance hante le roman, avec ses rendez-vous manqués et les guerres entre nouveaux pays issus de la décolonisation, pour aboutir à Hissen Habré, Boko Haram et compagnie.
L'Histoire est vue à travers des personnages en quête de liberté : l'eunuque Tomasta, père spirituel de Zeitoun et Yasmina, esclaves en fuite. Ils fondent une communauté sur une île qui se déplace sur la Grande Eau (futur Lac Tchad) , évitant ainsi les drames des guerres et de la colonisation. Mais le monde réel fait irruption dans l'oasis de paix, les pays limitrophes s'arrachent la possession de l'ile qui finit tchadienne. Les descendants des fondateurs n'échappent pas à la violence.
Un regret cependant, une écriture parfois alambiquée ("les leucodermes = les Blancs, par exemple), qui m'a gênée dans ma lecture.
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Même si j'ai trouvé ce livre un peu long, dans lequel j'ai parfois eu du mal à m'y retrouver avec les personnages, c'est une longue épopée qui m'aura donné un autre regard sur l'Afrique tout particulièrement de la région du lac Tchad. En effet l'auteur, dans ce roman historique, nous relate l'histoire tragique de ces peuples maltraités, soumis à l'esclavage, à l'appétit colonial, aux déchirements entre ethnies, religions, pour souffrir toujours un peu plus ! Cela peut paraitre triste et déprimant, dit comme cela, mais c'est sans compter sur le talent littéraire de l'auteur qui nous emporte dans cette épopée.
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