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Citations sur Les Chiens de garde (24)

Vérité univoque exige un Dieu tout puissant..
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Tout le travail du 18e, tout le travail du kantisme manifestent cet effort de la pensée bourgeoise cherchant à se donner des titres. Quand les idées bourgeoises furent regardés comme les productions d'une raison éternelle, quand elle eurent perdu le caractère chancelant d'une production historique, elles eurent alors la plus grande chance de survivre et de résister aux assauts. Tout le monde perdit de vue les causes matérielles qui leur avaient donné naissance et les rendaient en même temps mortelles.
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Les conclusions, les démarches, les attitudes mêmes de cette philosophie la réservent au service de la bourgeoisie. Elle ne peut servir que des bourgeois, elle ne peut être embrassée que par eux, elle ne peut satisfaire qu’eux. En dépit de ses apparences, de ces grands airs d’absence et de distance qu’elle sut prendre, elle est uniquement plongée dans l’actualité de la satisfaction passive qu’un bourgeois éprouve lorsqu’il se contemple. Elle n’est jamais atteinte par le désir de se transformer, de renoncer à ce qu’elle est. Elle se trouve bonne, comme la bourgeoisie se trouve bonne : ce vaste jugement la pénètre jusque dans les replis les plus secrets de ses raisons. Ce vêtement taillé par les bourgeois est à leur seule mesure et ne saurait déguiser qu’eux. On a pu voir comment cette philosophie alimentait, et justifiait l’orgueil public des bourgeois. Ce n’est point là son unique fonction : car elle comble encore les exigences intérieures de l’intelligence bourgeoise, les exigences spéciales de la solitude, de l’orgueil privé des bourgeois.

Le bourgeois est un homme solitaire. Son univers est un monde abstrait de machineries, de rapports économiques, juridiques et moraux. Il n’a pas de contact avec les objets réels : pas de relations directes avec les hommes. Sa propriété est abstraite. Il est loin des événements. Il est dans son bureau, dans sa chambre, avec la petite troupe des objets de sa consommation : sa femme, son lit, sa table, ses papiers, ses livres. Tout ferme bien. Les événements lui parviennent de loin, déformés, rabotés, symbolisés. Il aperçoit seulement des ombres. Il n’est pas en situation de recevoir directement les chocs du monde. Toute sa civilisation est composée d’écrans, d’amortisseurs. D’un entrecroisement de schémas intellectuels. D’un échange de signes. Il vit au milieu des reflets. Toute son économie, toute sa politique aboutissent à l’isoler. La société lui apparaît comme un contexte formel de relations unissant des unités humaines uniformes. La Déclaration des Droits de l’Homme est fondée sur cette solitude qu’elle sanctionne. Le bourgeois croit au pouvoir des titres et des mots, et que toute chose appelée à l’existence sera, pourvu qu’elle soit désignée : toute sa pensée est une suite d’incantations. Et en effet pour un homme qui n’éprouve pas effectivement le contact de l’objet, par exemple les malheurs de l’injustice, il suffit de croire que la Justice sera : elle existe déjà pour lui dès qu’il la pense. Il n’y a pas un écart douloureux entre ce qu’il éprouve et ce qu’il pense. Car sa vie n’est pas moins abstraite et solitaire que sa pensée. Un abîme ne sépare point son être privé et sa personne morale. Les Droits de l’Homme expriment assez complètement le peu de réalité qu’il possède. Marx a donné des descriptions admirables de cet Homme bourgeois « membre imaginaire d’une souveraineté imaginaire, dépouillé de sa vie réelle et individuelle et rempli d’une généralité irréelle ». (pp. 83-85)
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D'autres part, il existe des oppresseurs et des opprimés. Et des gens qui profitent de l'oppression et d'autres qui ne sont pas tranquilles lorsqu'ils savent qu'elle existe.
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Quand les idées bourgeoises furent regardées comme les productions d'une raison éternelle, quand elles eurent perdu le caractère chancelant d'une production historique, elles eurent alors la plus grande chance de survivre et de résister aux assauts. Tout le monde perdit de vue les causes matérielles qui leur avaient donné naissance et les rendaient en même temps mortelles.
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Personne ne veut croire encore les voix désagréables de ceux qui disent que ce monde commence à mourir de sa vilaine mort, que sa condamnation est déjà décidée quelque part.
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Quiconque veut penser aujourd'hui humainement pensera dangereusement ; car toute pensée humaine met en cause l'ordre tout entier qui pèse sur nos vies.
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A l'abri de l'éternel, complice des oppresseurs, se complotent tous les attentats.
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« Nous visons dans une temps où les philosophes s’abstiennent. Ils vivent dans un état de scandaleuse absence. Il existe un scandaleux écart, une scandaleuse distance entre que qu’énonce la philosophie et ce qui arrive aux hommes en dépit de sa promesse (…) Elle n’est jamais là où on aurait besoin de ses services. »
« Il est temps de dire que la philosophie bourgeoise peut seulement produire des déclarations verbales, mais travaille réellement contre les grandes fins qu’elle prétend poursuivre. »
« Les bourgeois seuls ont véritablement besoin de subtilité dans leurs divisions, et de profondeur visible dans l’esprit, parce qu’ils ont seuls quelque chose à cacher et que la grossièreté est un moins bon masque que l’esprit de finesse et que les nuances. »
« Il est l’heure de dire simplement qu’il y a une philosophie des oppresseurs et une philosophie des opprimés, sans aucune ressemblance réelle, bien qu’on les puisse toutes deux nommer philosophie. »
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Ils transportent tous les débats dans un monde si pur, dans un ciel si lavé, que nul d'entre eux ne risque de s'y salir les mains. Et ils nomment cette hygiène philosophie.
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