"Pourquoi s'offusquer de quoique ce soit? Rien ne nous appartient. Rien ne nous sera repris. Seules nos illusions nous font croire le contraire. Que possédons-nous réellement sinon ce que nous avons patiemment fait fructifier en nous-mêmes? C'est le seul trésor qui vaille. Tous nos rêves en s'accomplissant ouvrent sur un rêve plus radieux encore qui révèle la splendeur de la vie."
Longtemps j’ai cru écrire pour mettre quelque chose à l’abri de la mort. Puis j’en suis finalement venue à penser que j’écrivais plus volontiers pour mettre quelque chose à l’abri de la vie, m’inventer une demeure.
L'écriture, elle, ne cherche pas les faits. Elle vient touiller le réel pour en révéler une vérité encore inconnue de soi, faisant de chaque événement un événement vivant
Encore une fois appris par la pauvreté de mon corps ce qu'il en était d'être seule ; par ma pauvre langue ce qu'il en était de le dire. Ce sont eux, le corps comme la langue, qui, porteurs de toutes mes défaites, m'auront fait rencontrer les victoires les plus humbles.
On naît deux fois, du ventre de sa mère et des cuisses de sa propre conscience.
On ne guérit jamais tout à fait de ses blessures, mais l'écriture les désactive.
Ma fille est devenue adulte et si elle m'appelle alors que je suis à ma table de travail, je suspends le manuscrit en cours pour lui répondre avec joie. Il y aura tant d'autres jours où je pourrai écrire tandis que ce qui s'échange là, entre nous, ne se représentera jamais. J'en ai si parfaitement conscience que rien ne me coûte à cet instant. C'est la grâce de mûrir. La grâce de la confiance.
Que la langue s'y conjugue au présent, au passé u au futur, qu'elle emprunte le je, le tu ou le il, qu'importe, la seule condition pour y pénétrer et y demeurer est que la langue soit vraie, c'est-à-dire qu'elle soit en lien avec la vérité du corps.
Reconnaître leur part d'ombre à chacun de nos proches c'est pouvoir leur pardonner réellement leurs paroles et leurs actes. Tandis que le déni nous maintient dans un conflit intérieur insoluble.
je suis née du verbe, sans rituel ni sermon. Je suis née de ces après-midi blanches où, retirée à ma table, au centre du temps, j'écris ce qui ne peut se dire ni se taire. Les yeux fermés, habitée de mots, je descends dans les profondeurs de moi-même, à l'écoute de ce qui, aux confins de la chair, tente de s'articuler par l'esprit.