SONNET
Ha ! que je porte et de haine et d'envie
Au médecin qui vient, soir et matin,
Sans nul propos tâtonner le tétin,
Le sein, le ventre et les flancs de ma mie !
Las ! Il n'est pas si soigneux de sa vie
Comme elle pense ! Il est méchant et fin.
Cent fois le jour il la visite afin
De voir son sein qui d'aimer le convie.
Vous qui avez de sa fièvre le soin,
Parents, chassez ce médecin bien loin.
Ce' médecin, amoureux de Marie,
Qui fait semblant de la venir panser.
Qu'il plût à Dieu, pour le récompenser,
Qu'il eût son mal et qu'elle fût guérie !
Konsard
LE NEZ
Heureux comme un César je suis à cette guerre
Où l'on combat armé d'un grand pot et d'un verre :
Plutôt un coup de vin me perce et m'entre au corps
Qu'un boulet qui, cruel, rend les gens sitôt morts.
Le cliquetis que j'aime est celui des bouteilles;
Les pipes, les tonneaux pleins de liqueurs vermeilles.
Ce sont là mes canons, qui battent sans faillir
La soif, qui est le fort que je veux assaillir.
Je trouve, quant à moi, que les gens sont bien bêtes
Qui ne se font plutôt au vin rompre la tête
Qu'aux coups de coutelas en cherchant du renom.
Que leur chaut, étant morts, que l'on en parle ou non ?
De trop boire frappée, une tête en réchappe,
Sent bien un peu de mal lorsque le vent la happe.
Mais, quand on a dormi, le mal s'en va soudain.
A ces grands coups de Mars, tout remède y est vain.
Il vaut bien mieux cacher son nez dans un grand verre
Il est mieux assuré qu'en un casque de guerre :
Pour cornette ou guidon suivre plutôt on doit
Les branches d'hière ou d'if qui montrent où l'on boit.
Olivier Basselix