Déracinée

Mais on ne peut pas guérir une absence.

- Ils brûlaient les arbres, ajouta-t-elle, implorant la compréhension d'un être depuis longtemps disparu. Ils les abattaient. Ils les abattront toujours. Ils se succèdent comme les saisons, sans accorder la moindre considération à l'avenir.

– la jalousie règne en maître, même chez les enchanteurs.

(...) la vérité ne signifiait rien si elle n'était pas partagée : il était vain de passer sa vie à la hurler aux quatre vents si personne n'était là pour l'écouter.

Il me dévisagea, outré, et je partis d’un rire incontrôlable, m’étranglant presque d’hilarité: j’étais soûlé de magie et d’inquiétude.
- Espèce d’insupportable folle, grogna-t-il.
Puis il me saisit le visage à deux mains et m’embrassa.
Je lui rendis son baiser sans réfléchir, mon rire se déversant dans sa bouche. J’étais toujours liée à lui, nos magies entremêlées de façon inextricable. Je n’avais jamais connu pareille intimité.

Les mots ne me paraissaient plus si impénétrables. Je n'arrivais toujours pas à suivre l'histoire, et j'oubliais les phrases aussitôt prononcées, mais je commençais à avoir le sentiment que ça n'avait pas d'importance. Et si je m'en étais souvenue, certains mots au moins auraient sonné faux, comme lorsque l'on réentend son conte d'enfance préféré et qu'on le trouve décevant, ou au moins différent.

Sa main s'était refermée fermement sur la mienne; nos doigts étaient entremêlés, à l'instar de nos magies. Le sort tintait hors de nous, aussi fluide qu'un ruisseau glissant le long d'une pente. Il aurait alors été plus difficile de s'arrêter que de continuer.

— Je cherche Sarkan.
Ballo examina, surpris, les rayonnages que j'avais tripotés : m'attendais-je à trouver le Dragon coincé entre les pages d'un livre ? Cependant, ma réponse spontanée me fit l'effet d'une révélation, et je me rendis compte que c'était bel et bien ce que j'espérais. J'avais besoin de lui. Je voulais qu'il m'observe par en dessous en levant la tête de sa pile de livres et qu'il me décoche une remarque assassine concernant le désordre que j'avais provoqué. Je voulais savoir ce qu'il faisait, si le Bois avait contre-attaqué. Je voulais qu'il m'explique comment je pourrais vaincre le roi de libérer Kasia.
— J'aimerais lui parler, précisai-je, le voir. Je savais déjà qu'aucun sort dans le livre de Jaga ne le permettait, et le Dragon ne m'avait jamais rien montré de pareil. Mon père, comment procéderiez-vous si vous voulez entrer en communication avec une personne à l'autre bout du royaume ?
Mais Ballo secouait déjà la tête...

- Seul un imbécile préférerait voir Marek sur le trône, riposta Alosha.
- Les hommes sont des imbéciles par nature, affirma Sigmund. Accordez-moi votre bénédiction, et veillez sur les enfants en mon absence.

- [...] un arbre n'est pas une femme : il ne porte pas une unique graine. Il essaime autant qu'il peut, espérant que certaines prennent.