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Citations sur Un été 58 (3)

Plusieurs des péchés de Justin étaient des mensonges. Je savais qu'il mentait, pourtant son aplomb m'amenait à douter. Justin était capable de raconter 'La Belle au bois dormant' en vous affirmant que l'histoire s'était déroulée dans la cuisine de la postière, et vous regardiez ensuite la postière avec d'autres yeux.
(p. 49)
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Quand le garde-champêtre, pourtant ivre, risqua sa vie en tirant Justin de l'étang dans lequel il se noyait, il le remercia d'un « va te faire voir, sac à vin ». Si nous lui disions sa chance d'en être sorti vivant, Justin clignait ses paupières de chauve-souris et lâchait :
- Le vieux con n'avait qu'à me laisser dans l'eau.
J'étais fils d'instituteurs, au langage estampillé dictionnaire. J'écoutais de telles injures pantelant d'admiration.
(p. 15)
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Je conservai assez de présence d'esprit pour m'approcher en catimini. La voix de Justin me paralysa.
Justin engueulait le Christ :
- T'es pas juste. Pourquoi t'es pas juste ? Qu'est-ce que je fais qui ne te plaît pas ?
J'étais plus immobile que Jeanne [d'Arc] sur son destrier. La voix de Justin vibrait de colère et de rancune. Son cou, ce si long cou dévissé du corps, se tendait vers la croix d'or, au-dessus de l'autel. Justin gardait les mains dans les poches, mais je ne compris qu'après pourquoi il conservait une position si inconfortable. Justin parlait au Christ comme s'il s'adressait à un garçon de notre bande :
- T'as jamais été juste. T'es tranquille, t'es Dieu jusqu'à perpète. Tu fais ce que tu veux, comme tu veux, personne ne t'en empêche ou ne te punit. C'est facile d'être Dieu, à la portée de n'importe quel idiot. Moi aussi je pourrais. J'en ai marre de toi. J'en ai marre que tu me mettes sans arrêt des bâtons dans les roues, que tu ne sois jamais juste avec moi ni avec personne.
Les mains de Justin jaillirent de ses poches. Il serra les poings et les brandit vers la croix.
- Tu les vois, ces deux-là ? Si t'étais un vrai mec, je te les flanquerais sur le pif. C'est tout ce que tu mérites.
(p. 54-55)
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