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Citations sur Dans la forêt (14)

Soudain on entend crier Joséphine : « Les filles… les filles, venez vite. » Elles courent à travers la broussaille et la voient qui indique quelque chose sur le sol avec son parapluie. Un soulier d’enfant, un soulier de toile rose tout crotté, qui a perdu son lacet. Sa vue leur donne le frisson. Elles forment un cercle tout autour, un cercle serré maintenant, et le soulier leur parle d’un enfant qui est passé par là dernièrement, qui a perdu son soulier et à qui on n’a pas permis de faire marche arrière pour le remettre. Il parle de hâte et de captivité, voire de violence. Elles fouillent maintenant les sous-bois, elles s’agenouillent, enfoncent les mains dans des années et des années d’aiguilles de pin entassées et humides, elles saisissent les branches basses et les secouent, espérant trouver un second soulier, le cardigan, un manteau, tout indice prouvant qu’ils auraient pu passer par là.

(p. 214)
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Un autre groupe de femmes se mit en route de très bonne heure le lendemain matin, dans une brume d’un blanc cotonneux, une présence, si bien que la traverser était comme ouvrir une brèche dans un filet. Elles se dirigeaient vers le bois de Cloosh.
(…) Apeurées, et pourtant animées d’une sorte d’intuition aveugle, certaines que leur détermination les conduira à la mère et au fils, fières d’avoir trompé la vigilance des gendarmes et des autres volontaires du pays. Elles se sont déployées en éventail, se promettant les unes aux autres de s’appeler souvent par solidarité.

(p. 213)
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Elle a eu envie de pleurer, parce qu’elle pleurait dans sa tête, mais quelque chose lui a dit de ne pas pleurer. « Si je verse des larmes, ce sera la tragédie », lâche-t-elle à voix haute à l’adresse de la tombe et des arbres qui geignent. Qu’elle retienne ses larmes, et Eily aura la vie sauve.
Relevant la tête, elle vit des visages humains entre les pierres tombales, des visages gouailleurs qui riaient, et elle sut qu’à cet instant elle aussi perdait la tête. Elle se redressa, considéra le bleu foncé de l’eau, du bleu de Prusse, et elle ne cessa de se répéter qu’elle ne devait pas pleurer parce que si elle versait des larmes ce serait la tragédie, ne cessa-t-elle de se répéter, le regard fixé sur l’eau bleu métallisé.

(p. 211-212)
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On croirait rechercher un homme-loup qui laisse des traces puis s’évanouit. La question est maintenant de savoir si on l’attrapera jamais. Possède-t-il des pouvoirs surnaturels ? C’est ce qu’on dit. La vérité, c’est qu’on se nourrit tous de nos peurs, les hommes comme les femmes, qu’on se replie dans les ténèbres comme dans une grotte obscure. (…) Au fond de nous, on croit que c’est Dieu qui nous l’a envoyé, pour nous punir.

(p. 222-224)
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Elles sautent dans l’ombre de leurs ombres et les ombres plus épaisses des pierres tombales qui semblent s’entrechoquer dans la nuit qui tombe. Il s’est remis à pleuvoir et le lac a l’agitation d’une mer avec ses lames qui s’écrasent et se retirent, et les vieux acacias courbés qui craquent en laissant échapper de petits cris de souriceaux.
Rien que des femmes, toutes à cran, épuisées, les pieds endoloris ; leur défiance n’a fait que croître depuis qu’elles ont commencé leurs recherches, ce matin, fouillant les maisons abandonnées, les caravanes, les remises, les box à chevaux, les fours à chaux désaffectés et les criques qui jalonnent les rives du lac et les petits bateaux qui tanguent et dansent dans leurs lits de roseaux.

(p. 206)
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« Vous comprenez, Eily a emménagé dans une maison que O’Kane considérait comme la sienne.
— Sa tanière, ajoute-t-il d’un ton posé.
— Sa tanière de renard, réplique-t-elle.
— Et trouve madame Renard à la maison.
— Et bébé Renard », ajoute Delia d’une voix faiblissante. Sa voix s’est éteinte, mais sa pensée s’est emballée, et son visage maigre et cireux n’est plus qu’une carte de minuscules rides.

(p. 189-190)
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Elle regarde l’éclat de l’obscurité au-delà de sa fenêtre panoramique, les plantes, les géraniums et les cactées clopinant dans leur assoupissement, elle regarde son gros verrou de laiton tout neuf, brillant comme un cercueil, et elle finit par se réveiller tout à fait, et comme elle le dit et le redit, Eily, la femme morte avec ses longs cheveux, s’avance vers elle et lui dit : « Pourquoi, pourquoi ne m’as-tu pas aidée ? – Le Kinderschreck, répond-elle, le Kinderschreck », et, le bras levé, elle tente d’effacer le regard de la femme, la lumière des yeux, cet or concassé des bougies qui se meurent.

(p. 10)
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Quand le juge rendit sa sentence, il ne la comprit pas. Un centre de détention. Qu'est-ce que ça voulait dire ? La voix du juge était très basse mais sa figure toute rouge. Le sergent remercia le juge et ils sortirent tous ensemble. Dehors, sa sœur lui expliqua qu'on allait l'envoyer à Saint-Malachi, et qu'il avait bien de la chance qu'il y ait de la place parce que c'était un coin très joli. Il pleura, cria et s'enfuit dans la rue, mais ils le rattrapèrent et le ramenèrent en le traînant.
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Elle se détourna en marmonnant, le souffle rapide, haletante. C’est dans ce silence tendu qu’une brise se leva et délogea un bout de papier coincé entre les croix. Il voltigea dans un sens puis dans l’autre, comme s’il se demandait où se poser. Finalement, il tomba tout près de lui. Il le déplia et le lut. Puis il le lui donna à lire, mais elle refusa. Il le lut à voix haute, il tenait à ce qu’elle l’entende : « Les ténèbres sont attirées vers la lumière, mais la lumière ne le sait pas, la lumière doit absorber les ténèbres et donc aller au-devant de sa propre extinction. »

(p. 319)
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« Me renvoyez pas là-bas… Je me tuerai. »
Il se le répéta alors qu’ils roulaient dans la nuit, sous la pluie. Il crut que, s’il le disait assez souvent, sa prière serait exaucée, mais il n’en fut rien. Ils roulèrent sur des routes de campagne obscures, où il n’y avait guère de voitures, et de temps à autre ils tombaient sur un renard mort, ou un chat mort, étendu de tout son long, avec sa fourrure et ses entrailles écrasées que ça faisait pitié, comme s’il y avait une chose que ce renard ou ce chat avaient terriblement besoin de dire.

(p. 34-35)
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