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Critique de oceaneclaer


Je ne connaissais pas du tout Christine Orban. Pourtant, elle est l'autrice de nombre de livres très reconnus.
Blaise Pascal, comme tout le monde je l'avais étudié en première. Il ne m'avait pas laissé un souvenir impérissable. Evidemment, on ne nous avait jamais parlé de sa soeur. On avait étudié le jansénisme, on connaissait les Arnauld et les Provinciales, on avait même été voir une représentation de la pièce de Montherland, Port-Royal, mais tout cela est si loin…
Alors qu'allait-on apprendre de plus dans ce livre sur un sujet bien éloigné de nos préoccupations actuelles ?
Et bien, j'ai été bluffée.
On revoit Blaise Pascal (à défaut de le relire…) sous l'angle familial, en particulier celui de sa petite soeur. C'est un regard féministe que celui de Christine Orban. D'ailleurs elle débute en citant Virginia Woolf dans une chambre à soi (j'ai lu que Christine Orban avait joué la Pièce Virginia et Vita) « Elle était née femme dans un siècle fait par les hommes ».
Effectivement, Jacqueline, la petite soeur est une surdouée.
Son frère est fait pour les mathématiques, les projections géométriques, les expériences scientifiques, il fabrique la première machine à calculer, quand ses amis, Roberval invente la balance du même nom et Torricelli le baromètre. Il est fait pour ça. (J'ignorais tout ça évidemment)
Mais Jacqueline, elle, est une poétesse. A onze ans, elle fait des quatrains, à treize, elle est présentée à la reine Anne d'Autriche et n'a pas peur de lui déclamer une pièce de théâtre de son invention, en vers, bien sûr. Elle peut, sur le champ et à la demande, sortir des poèmes comme s'il en pleuvait. C'est un moulin à vers.
Elle séduit tout le monde, d'Anne d'Autriche à Richelieu, de Malherbe à Voiture et surtout Corneille, le grand Corneille, qui veut lui donner un prix. Mais qu'elle refuse.
Si jeune déjà, elle a une force d'âme peu commune.
« le siècle aura écrasé son talent, sa vitalité, son désir. le cercle des poètes est un cercle d'hommes » dit Christine Orban, c'est sûr. Mais Jacqueline, déjà enfant, refuse les honneurs, dit « qu'elle ne peut pas inventer les histoires puisque les histoires doivent mûrir dans l'expérience, et elle n'en connaîtra pas, puisqu'elle ne veut pas se marier. » le siècle est celui de la princesse de Clèves qui voit le triomphe de la raison sur la passion et Jacqueline écrasera toute passion (elle a juste eu un frisson bien vite étouffé dans l'oeuf). Sa passion, elle la réserve pour Dieu.
Justement, Blaise et elle vont faire la connaissance de deux « dévôts », prosélytes du jansénisme, c'est-à-dire du courant catholique le plus radical, où tout plaisir est proscrit, ils vont rentrer à pieds joints dedans.
Jacqueline n'a de cesse de prendre le voile. Dépassant le refus de son père et de son frère, elle partira à Port-Royal et vivra derrière les grilles, sans un livre, sans un vers. Blaise, lui, vivra dans les mondanités et écrira l'oeuvre que nous avons encore sous les yeux.
Comme la soeur de Shakespeare (voir Virginia Woolf encore) la soeur de Pascal aurait-elle été plus célèbre que son frère si elle était née dans un autre siècle ? Sûrement. Mais son refus de la célébrité, de la reconnaissance ne venait-il pas aussi de son aspiration vers Dieu (très datée aussi, je pense à Thérèse d'Avila par exemple, au siècle précédent)
Bref, j'ai bien aimé me replonger dans ce siècle. Ça donne un vrai coup de jeune. On voit Pascal (Blaise) sous un autre jour, souffreteux, geignard, orgueilleux. On fait la connaissance de cette petite soeur surdouée, très attachante. J'ai moins aimé ses envolées religieuses.
La documentation est fouillée. Je mettrai un bémol en ce qui concerne le style, la fluidité du récit. Il y a des allers-retours qui me déstabilisent. Peut-être est-ce du à ce type d'ouvrage qui oscille entre roman et essai.
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