— Paul Lavalette ? demanda une voix avec un accent que Paul ne put identifier.
— Oui, qui est à l’appareil ?
— Ne quittez pas, je vous passe la chancelière Konrad.
— Président Lavalette ?
— Madame la Chancelière ?
— Je tenais à être une des premières à vous féliciter, Monsieur le Président.
L’homme ne put s’empêcher de sourire. Il était toujours fasciné par la cupidité de ses semblables. On pouvait trahir. Après tout certaines causes pouvaient le justifier. Mais juste pour de l’argent, cela lui semblait si…court. Quel manque de hauteur. Si tu savais combien les petites traîtrises peuvent alimenter une cause que te dépasse, tu en serais le premier surpris.
Ce que nous pensons est que si les investisseurs décident que les pays européens ne peuvent plus rembourser leur dette, c’est un séisme financier qui se prépare, bien pire que la crise des Subprimes. C’est une bombe à retardement qui pourrait exploser. Cette bombe ferait éclater la zone euro, ruinerait tous les épargnants … on assisterait à une faillite en chaîne des banques. Imaginez une faillite de la France qui entraînerait dans son sillage, l’Allemagne, puis tous les autres états membres ? On en reviendrait à une crise comme celle de 29. La cause de la grande dépression fut en premier lieu la perte de confiance dans le système et la fin du crédit.
La Défense, symbole de l’expression capitaliste du pays, se devait d’être protégée.
Nous les revenants, s’ils se repentissent on a plutôt tendance à essayer de les chouchouter. Ne me demande pas pourquoi.
Les énièmes condamnations vaines des événements par tous les partis avaient alimenté la perception déjà forte dans l’opinion que les politiciens n’y pouvaient maintenant plus rien. Que tout cela était hors de contrôle. La perte de confiance s’immisçait dans l’inconscient collectif et minait le statut de l’État protecteur. Le modèle, le repère disparaissant, il fallait bien se raccrocher à une vérité commune porteuse de cohésion sociale. Le FN proposait une mauvaise réponse à des aspirations légitimes.
Les forces de l’ordre étaient totalement dépassées. Pour protéger la population, il n’avait eu d’autre choix que d’imposer un couvre-feu et de mettre le pays en alerte maximale.