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Citations sur La parole est un sport de combat (58)

L'entrepreneur qui pitche- le mot signifie en français " bonimenteur"- ce qui est à tout à la fois révélateur et réducteur- doit montrer son sérieux sa compétence et sortir du lot pour attirer l'attention d'interlocuteurs qu'il doit transformer en partenaires.Le pitch est comme la bande annonce d'un film : il doit donner envie de voir la totalité du projet.
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C’est une évidence : l’éloquence politique – qui est, avec l’éloquence
judiciaire et l’éloquence épidictique (l’éloquence festive, d’apparat), l’un
des trois genres d’éloquence dénombrés par Aristote – a énormément
évolué ces dernières décennies.
La responsabilité en revient pour l’essentiel à l’irruption des médias
dans le débat politique.
Avec la télévision, la radio, et désormais Internet et les réseaux
sociaux, on est passé d’une parole adressée depuis une tribune, sans
micro, à des initiés, à une parole adressée urbi et orbi, en permanence,
par écrans interposés. De la logique de l’estrade à la logique du spectacle.
Et en moins d’une génération, le rapport des politiques aux médias a
lui-même singulièrement évolué. Alors que dans les années 1960 et 1970,
le discours politique s’invitait – on pourrait même dire s’imposait – dans
les médias, ce sont aujourd’hui les médias qui imposent aux politiques de
s’exprimer selon les codes du divertissement.
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D’une façon générale, le discours médiatique est soumis à des
exigences de rapidité, de clarté, de précision, de simplicité,
d’intelligibilité.
Vous n’avez souvent pas plus de 40 secondes pour faire part de votre
idée de façon compréhensible par tous. L’enchaînement est alors le
suivant : l’idée, un développement bref, un exemple, une clôture. Le tout
dans un vocabulaire très simple. Par exemple : « Je crois que les
35 heures doivent être assouplies. La réduction généralisée du temps de
travail a fait perdre de la compétitivité aux entreprises françaises et l’on
doit permettre à ceux qui souhaitent travailler davantage de le faire. C’est
ce que d’autres pays ont fait avec succès et la France ne peut pas
continuer à appliquer de façon uniforme et générale cette durée du
travail. »
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Ce qu’il ne faut pas faire
Voici une liste, non exhaustive, des scories qui peuvent gâcher un
discours.
Sont ainsi à éviter :
– Les vulgarités et les trivialités de tous ordres (dans les idées et dans
les mots). On attend d’un orateur un langage soutenu et un vocabulaire
choisi. Il ne s’agit pas d’être pédant, mais sauf très rares exceptions,
jamais une grossièreté n’a servi un discours.
– Le métadiscours ou discours sur le discours. C’est tentant, c’est
facile, mais ça ne fonctionne quasiment jamais. Bannissez les : « quand
j’ai vu le sujet je me suis dit » et autres formules équivalentes.
– Les références à l’actualité polluent le plus souvent un discours,
efforcez-vous au contraire de prendre de la hauteur et de faire rêver
l’auditoire.
– Les formules journalistiques, telles « au creux de la vague », « dans
un contexte mondialisé », « le scénario d’une crise globale », « le bras de
fer », « le baroud d’honneur », « les dés sont pipés » et autres métaphores
toutes faites.
– Les poncifs, les banalités, les lieux communs. Vous pouvez
évidemment distiller ça et là des références culturelles, mais il faut
qu’elles soient choisies et finement amenées. Par exemple au trop banal
« Comme le disait Céline… », préférez « Le docteur Destouches l’avait
déjà diagnostiqué : si les gens sont si méchants, c’est peut-être seulement
parce qu’ils souffrent. »
D’une façon générale, les citations et autres références ne sont pas
obligatoires. Ce que l’on cherche à connaître à travers un discours, c’est
la personnalité de l’orateur. Une référence ne doit pas vous masquer. Elle
est en revanche pertinente si elle est originale et si vous la maîtrisez bien.
Dans ce cas en effet, elle vous révèle.
En résumé, un discours ne sert qu’à une seule chose : convaincre
l’auditoire que votre thèse est pertinente. Tous vos efforts doivent être
tendus vers cet objectif. N’hésitez pas en particulier à rappeler
régulièrement votre thèse : une personne qui entrerait dans la pièce en
cours de discours devrait pouvoir, en moins de deux minutes, deviner le
sujet que vous traitez et la position que vous soutenez.
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Privilégiez le rythme ternaire (les formules par trois), qui est au cœur
de la rhétorique classique.
Il est par exemple employé par Barack Obama dès l’exorde de son
fameux discours Yes we can : « Je suis ici devant vous empli d’un
sentiment d’humilité face à la tâche qui nous attend [1], reconnaissant
pour la confiance que vous m’avez témoignée [2] et conscient des
sacrifices consentis par nos ancêtres [3]. »
Un point important sur cette question de rythme : on n’écrit pas pour
dire comme on écrit pour être lu. Le style oral impose certaines
contraintes d’écriture. Demandez-vous toujours si vous pourrez dire la
phrase que vous écrivez. Aurez-vous assez de souffle ? La phrase est-elle
bien rythmée ? Est-elle trop longue, trop courte ? Y a-t-il un risque
d’accroc oratoire parce qu’un mot est difficile à prononcer ? Le discours
va-t-il « passer la rampe » ? L’avez-vous parsemé de phrases courtes,
sans verbe, d’interjections, de questions oratoires ? Il est difficile de se
rendre compte de ce genre de détails sans s’entraîner à prononcer à haute
voix son discours. Répétez plusieurs fois – d’abord seul – afin
d’identifier les moments où votre texte doit être modifié dans l’optique
de sa déclamation à haute voix. Ces répétitions vous permettront aussi de
repérer les endroits où vous devez ménager des silences, hausser le ton,
accélérer ou encore ralentir le débit. Exercez-vous ensuite devant
d’autres personnes sans refuser d’emblée leurs critiques et leurs conseils.
Assurez-vous qu’elles ont compris votre propos et que celui-ci sert bien
votre objectif. C’est également l’occasion de vérifier que vos traits
d’humour font mouche… ou pas.
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Ce soir, c’est le troisième et dernier tour du concours d’éloquence de la
Conférence du barreau de Paris. J’ai trente ans. Je suis un peu là par
hasard. Je suis toujours collaborateur dans le même cabinet d’avocats au
Conseil d’État et à la Cour de cassation, et j’éprouve encore un sentiment
de fascination-répulsion pour les discours. Mais je me suis piqué au jeu.
Lors d’un dîner, un confrère m’a convié à assister aux épreuves de ce
concours ancestral, qui célèbre la tradition d’art oratoire du barreau,
auquel peuvent participer les avocats de moins de trente-cinq ans et de
moins de quatre ans d’ancienneté, et qui distingue chaque année douze
lauréats, les « secrétaires de la Conférence ».
Je connaissais ce concours de réputation, mais je ne m’y étais jamais
rendu. Je suis ressorti de cette soirée absolument ébloui. Les sujets
étaient tantôt loufoques – « Les voitures rouges sont-elles plus
rapides ? » – tantôt sérieux – « Faut-il brûler les lettres d’amour ? » –
mais toujours les candidats parvenaient à déclamer des discours
sensibles, percutants, drôles, brillants. Je me souviens en particulier
d’une jeune avocate qui avait dû répondre à la question suivante : « Dieu
a-t-il besoin des anges ? » Elle avait raconté que son père était mort
lorsqu’elle était petite, qu’on lui avait expliqué qu’il était désormais un
ange, et que depuis ce jour, pour elle non seulement Dieu avait besoin des
anges, mais que c’était là sa raison de vivre. Son discours m’avait
bouleversé.
Un petit conseil alors : si vous n’avez rien de particulier à faire un
lundi soir entre janvier et juin – ça doit bien vous arriver, de temps en
temps… – venez à 19 h 30 à la bibliothèque du Palais de justice de Paris,
escalier A. L’entrée est libre, et c’est probablement l’un des meilleurs
spectacles gratuits de Paris !
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Pour bien intégrer la structure, efforcez-vous de faire un très bref
discours qui comporte deux phrases d’exorde, deux phrases de
narration, deux phrases d’argumentation, deux phrases de réfutation,
deux phrases de péroraison.
Exemple : « (exorde) Je voudrais vous faire part d’une idée qui me
semble importante pour que l’école joue mieux son rôle au bénéfice
de nos enfants. (énoncé de la thèse) Je crois qu’il faut supprimer les
notes à l’école primaire. (narration) Combien d’enfants reviennent
de l’école traumatisés parce qu’ils ont eu une mauvaise note ?
Combien d’enfants découragés et progressivement en échec
scolaire ? (argumentation) Je crois que les notes sont inutiles et
artificielles. Elles ne servent qu’à stigmatiser les plus faibles et ne
permettent pas de valoriser la progression des élèves. (réfutation)
J’entends bien qu’il est nécessaire que les élèves puissent s’évaluer.
Mais ils peuvent le faire sans que l’acquisition des compétences
prenne une forme chiffrée, qui peut s’avérer traumatisante.
(péroraison) Alors mettons un terme à cette hiérarchisation,
préservons nos enfants de la compétition à laquelle ils seront soumis
bien assez tôt. Il y va de leur équilibre. »
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La réfutation
Il ne suffit pas de démontrer que l’on a raison : encore faut-il aussi
démontrer que l’adversaire a tort ! L’exercice de réfutation est un peu
schizophrénique, puisqu’il suppose une capacité à se mettre dans l’esprit
de son contradicteur pour imaginer les arguments qu’il va avancer et les
contrer. Mais il est essentiel. Il prend une forme très simple : « Mes
contradicteurs / opposants vous diront que…, mais c’est un argument qui
ne tient pas parce que… » Par exemple : « Les tenants du retour à
l’uniforme à l’école pensent que cette mesure effacerait les inégalités
entre les élèves. Mais comment penser que les inégalités sont seulement
vestimentaires, quand elles résident en réalité bien davantage dans les
différences d’investissement éducatif des familles, qui ne sont pas
gommées par l’uniforme. »
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J’essaie d’allier exigence et bienveillance. C’est une ligne de crête
parfois délicate. J’estime que l’exigence est un hommage qu’on rend aux
élèves, à leur capacité à faire toujours mieux. À quoi cela sert-il si je leur
adresse seulement des compliments ? J’assume de les bousculer parfois,
et je crois que c’est fécond. Mais la bienveillance est également
essentielle. Dès lors que l’enseignement de l’art oratoire se fait sur un
matériau humain, comment susciter la confiance si l’on est dans un
registre d’agression ?
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Parler, c’est d’abord être vu. Chacun peut en faire l’expérience :
regardez un orateur à la télévision, coupez le son, et rien qu’en observant
son attitude, ses gestes, ses mimiques, vous aurez une idée assez précise
de la tonalité de son propos. Mettez le son en écoutant un discours dans
une langue que vous ne connaissez pas, et l’impression sera encore plus
frappante. C’est dire que les mots ne font pas tout. Des études très
sérieuses ont été menées sur cette question, et ont conclu que la force de
conviction d’un discours passait à 60 % par le langage du corps, à 30 %
par les inflexions de la voix (ce que l’on appelle la prosodie) et à 10 %
seulement par les mots eux-mêmes. En somme, un orateur est d’abord
vu, ensuite entendu, et enfin seulement compris.
Le discours, au sens le plus large, commence donc dès que l’orateur
apparaît aux yeux de l’auditoire.
D’où l’importance de soigner les conditions de cette apparition. La
parole est nécessairement mise en scène, et dans cette mise en scène, tout
compte, tout fait sens, tout est signifiant.
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