Citations sur Lumière du Moyen Age (21)
Si l'on ne prenait pas son bain tous les jours au Moyen Age, du moins les bains faisaient-ils partie de la vie courante ; la baignoire est une pièce du mobilier ; ce n'est parfois qu'un simple baquet. L'Abbaye romane de Cluny, datant du XIe siècle, ne comportait pas moins de douze salles de bains ; des cellules voûtées contenant autant de baignoires de bois. On aimait aller, en été, s'ébattre dans les rivières, et les Très riches heures du duc de Berry montrent des villageois et villageoises en train de se laver et nager par une belle journée d'août, dans le plus simple appareil, car l'on avait alors une tout autre idée de la pudeur que celle que l'on se fait de nos jours, et l'on se baignait nu, comme l'on dormait nu entre les draps.
Dans l'ensemble, l'étudiant du 13e siècle n'a pas une vie très différente de celui du 20e on a conservé publié des lettres adressées à leurs parents ou leurs camarades qui révèlent les mêmes préoccupations qu'aujourd'hui à peu de choses près : les études les demandes d'argent et de ravitaillement les examens. L'étudiant riche logeait en ville avec son valet ceux de condition plus modeste prenez pension chez les bourgeois du quartier Sainte-Geneviève et se faisait exonérer de tout ou partie de leur droit d'inscription à la faculté. On trouve souvent en marge dans les registres une mention indiquant que tel ou tel n'a rien versé ou n'a versé que la moitié de la rétribution propter inopiam à cause de sa pauvreté.
En fait, c'est au Moyen Âge que s'est élaborée l'une des plus vastes et des plus audacieuses synthèses qu'ait connues l'histoire de la philosophie. Cette conciliation entre la sagesse antique et le dogme chrétien, aboutissant aux grandes œuvres des théologiens du XIIIe siècle, ne représente-t-elle pas, toute préoccupation d'ordre religieux mis à part, un magnifique effort de l'esprit ?
Ce sens de la nature eet de son perpétuel miracle, ces élans d'amour au renouveau du printemps dans les branches, à la fraîcheur des rosées matinales, à la splendeur du couchant, animent toutes nos lettres médiévales du grand souffle de la vie :
Le nouveau temps et mai et violette
Et rossignol me semont de chanter
Nature aimable et toujours surprenante, fleurs sauvages que tressa Nicolette, branche de "chièvrefeuil" dont Tristan traduisit son amour, bosquets de verdure où vint se retraire l'amant désespéré de la Belle Dame sans Merci, - ces champs, ces jardins, ces rivières que peignirent exquisement les enlumineurs, n'ont pas été moins goûtés par les conteurs et les poètes. Un mot leur suffit pour évoquer les campagnes, les saisons, l'ombre de l'olivier, l'herbe tendre "qui verdit quand le temps meuille".
Et la mauvis qui commence à tentir
Et le doux son du ruissel sur gravelle.
Leur vision est directe, une simple touche, mais toujours évocatrice, même La Fontaine ne paraît pas avoir eu plus heureuses trouvailles que nos ancêtres du Moyen Age, passionnés de verdure et de grand air.
On se groupait autour des monastères plus volontiers encore qu'autour des seigneuries laïques. "Il fait bon vivre sous la crosse" disait un dicton populaire, traduisant le proverbe latin Jugum ecclesie, jugum dilecte.
"Faire des livres est un travail sans fin", disait l'Ecclésiaste, au temps où la Bible s'appelait la Vulgate.
Un élément essentiel de la vie médiévale a été la prédication. Prêcher, à cette époque, ce n'était pas monologuer en termes choisis, devant un auditoire silencieux et convaincu. On prêchait un peu partout, pas seulement dans les églises, mais aussi dans les marchés, sur les champs de foire, en carrefour des routes, – et de façon très vivante, pleine de flamme et de fougue. Le prédicateur s'adressait à l'auditoire, répondait à ses questions, admettait même ses contradictions, ses rumeurs, ses apostrophes. Un sermon agissait sur la foule, pouvait déchaîner sur l'heure une croisade, propager une hérésie, entraîner des révoltes. Le rôle didactique des clercs était alors immense [...]. De nos jours ceux qui manquent de mémoire visuelle, cependant plus rare, et d'un exercice plus automatique, moins raisonné que la mémoire auditive, sont handicapés dans leurs études et dans la vie. Au Moyen Âge, il n'en était rien ; on s'instruisait en écoutant, et la parole était d'or.
La façon d'envisager le mariage, d'après les idées chrétiennes, était, elle aussi, radicalement nouvelle : jusqu'alors on n'avait vue que son utilité sociale, et admis par conséquent tout ce qui n'entraînait pas de désordres de ce point de vue ; l'Église, pour la première fois dans l'histoire du monde, voyait le mariage par rapport à l'individu, et considérait en lui, non l'institution sociale, mais l'union de deux êtres pour leur épanouissement personnel, pour la réalisation de leur fin terrestre et surnaturelle ; cela entraînait, entre autres conséquences, la nécessité d'une libre adhésion chez chacun des conjoints dont elle faisait les ministres d'un sacrement, ayant le prêtre pour témoin, – et l'égalité des devoirs pour tous les deux.
De son côté, l'Église n'a pas toujours su se défendre des convoitises matérielles qui sont pour elle la plus redoutable des tentations. C'est le grave reproche que l'on peut faire au clergé médiéval, de n'avoir pas dominé sa richesse. Ce défaut a été vivement senti à l'époque.
Le principe fondamental est que, selon la doctrine de Saint Thomas : "Le peuple n'est pas fait pour le prince, mais le prince pour le peuple".