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Magnifique texte posthume où si l'ombre et l'approche de la mort s'y profilent, l'auteur célèbre les paysages jurassiens, la nature, le vin et la poésie, ainsi que l'amour de la vie...et de l'amitié !

"J'aime le vin parce qu'il m'est étrange, parce qu'il m'est amilier, parce qu'il incompréhensible et fabuleux. J'aime le vin parce que je ne peux m'empêcher d'aimer les hommes." (p. 46)

Un texte très épuré, où Jean-Claude Pirotte exprime également à plusieurs reprises son admiration pour l'écrivain , Joseph Joubert, dont il découvrit en 1954, un "Choix de pensées"...

Les mots de Pirotte se suffisent à eux-mêmes...il suffit de se laisser bercer par leur musique unique...

"Poète d'une littérature d'ébriété et d'émiettement, Jean-Claude Pirotte a construit sa propre légende, celle d'un errant misérable, tirant tous les diables par la queue,âme sensible et souffrante, enfermée dan un corps malade à qui le tabac et le vin,les livres, la vie fragile des hommes, les étoiles et les paysages, donnaient quelques joies durables et des raisons, sinon d'espérer, du moins supporter -L'épreuve du jour-, pour reprendre le titre d'un de ses premiers et très beaux livres. Maintenant qu'il n'est plus là, il demeure ici.

Et c'est bien l'extraordinaire magie des livres que d'être de vivants tombeaux grâce auxquels, toujours, on peut entendre la voix de celles et ceux dont les yeux sont désormais clos et les bouches muettes. "(p. 11) [Philippe Claudel, septembre 2015]
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Récit posthume, le silence a été écrit entre Janvier et Mars 2011. Disparu en mai 2014, à l'âge de 74 ans, Jean-Claude Pirotte est l'auteur d'une oeuvre abondante, notamment de la poésie. Il fut récompensé en 2012 par le Grand Prix de poésie de l'Académie française et le Goncourt de la poésie pour l'ensemble de son oeuvre.

« Il n'y a que le silence qui puisse présider aux métamorphoses. »

Cet ouvrage est préfacé par Philippe Claudel qui le définit comme "Un grand frère des lettres" et lui rend dans ces premières pages un vibrant hommage. Comme le dit parfaitement celui-ci, cet ouvrage porte bien mal son nom car l'écrivain véritable est un parleur. En sa compagnie, la conversation prend le tour amical d'une immédiate intimité.

Il est très court, 80 pages, et découpé en mini-chapitres, souvenirs de la vie de l'auteur, de ses amis, des paysages, de son travail dans les vignes... tout ce qui lui aura été cher. La brièveté de l'ouvrage est une volonté assumée de l'écrivain "Je n'ai simplement pas l'âge romanesque" et qui, au détour d'un paragraphe, reprend à son compte une citation des Carnets de Joseph Joubert:

« Les petits livres, écrit-il, sont plus durables que les gros; ils vont plus loin. Les marchands révèrent les gros livres; les lecteurs aiment les petits. Ce qui est exquis vaut mieux que ce qui est ample... Un livre qui montre un esprit vaut mieux que celui qui ne montre que son sujet. »

Comment lui donner tort? On ne peut qu'être d'accord avec ces belles phrases. Pour ma part, je ne sais pas si j'aurais apprécié autant le silence s'il avait été plus long.

Le vin est omniprésent dans l'opus, comme dans l'intégralité de son oeuvre. On trouve de nombreuses allégories et on se régale avec toutes ces métaphores viticoles.

« de ce que nous ferons de notre vie, nous ne voulons rien savoir. Notre indifférence au réel n'a d'égale que notre attention passionnée aux images entrevues dans une lumière soudaine, qui est peut-être celle que diffusent les éclats troubles du vin bourru. »

Jean-Claude Pirotte était un oenophile pour qui le vin était bien plus qu'un simple assemblage de cépages...

« J'aime le vin que je bois, lorsqu'il mérite son nom. Dans ma cave, il n'y a pas de vin. Il n'y a que d'heureuses espérances. de troublantes expériences. »

« le vin, c'est le ferment de l'émeute. le comble de l'esprit d'insurrection, de civilisation. L'alcool de vin, marc, fine, c'est le sommet de l'expérience mystique. Comment pouvons-nous oublier que l'eau se change en vin? Oublier que la rose et la vigne sont les ornements du jardin d'Allah? »

L'écriture est belle, mélancolique mais jamais plaintive. La mort plane pourtant souvent... le style est riche et travaillé. La lecture n'est pas toujours fluide (souvent le cas quand un poète fait de la prose) mais tellement agréable. Il ne faut pas plus d'une heure pour arriver à la dernière page. J'ai eu l'impression par moment de m'évader, d'être hors du temps. C'est une douce et sereine sensation.

Je vous recommande la lecture de ce récit roman et laisse le dernier mot à l'auteur qui, en 5 phrases, résume et conclut magnifiquement ce qu'aura été sa vie.

« Je n'ai pas trouvé la poésie dans le vin, mais le vin dans la poésie. Je lis et relis mon exemplaire d'un choix de pensées de Joubert. Je vendange la vigne de savagnin et le jaune mûrit en silence dans ses fûts obscurs. Mes amis sont morts en Algérie, ou se sont suicidés. Nous avons perdu l'espoir en une Lotharingie excessive et exemplaire. Il me reste le silence. »

4/5
Lien : http://alombredunoyer.com/20..
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Lecteur curieux, le jeune narrateur fait les vendanges en Bourgogne avec ses amis. Il lit beaucoup et il vit dans l'attente d'un lendemain inconnu. « de ce que nous ferons de notre vie, nous ne voulons rien savoir. Notre indifférence au réel n'a d'égale que notre attention passionnée aux images entrevues dans une lumière soudaine, qui est peut-être celle que diffusent les éclats troubles du vin bourru. » (p. 15 & 16) La jeunesse de ces garçons est éblouissante, leurs envies et leurs espoirs sont étourdissants. Comment croire que le futur ne sera pas radieux ? Mais ils sont peut-être trop impatients, trop avides de vivre, ces jeunes gens… « Cette soif brutale, à quelle source de vie pourrons-nous jamais l'étancher ? À quelle source de mort ? Et comment obtenir de l'aujourd'hui qu'il nous abreuve sans mesure de ce liquide inconnu dont nous rêvons de préserver la saveur incorruptible, au moment précis où nous entreprenons de la corrompre d'un mot, d'un geste ou d'un signe. » (p. 21) Les jours, les mois passent. Les espoirs s'effacent. Les fantasmes s'étiolent. En Algérie, il y a la guerre. Ici, il y a la vigne qu'il faut soigner toujours et avec constance pour qu'elle reste généreuse. Celui qui reste a charge de mémoire et charge de patience. Comprendre demande du temps. « J'aime le vin parce qu'il m'est étrange, parce qu'il m'est familier, parce qu'il est incompréhensible et fabuleux. J'aime le vin parce que je ne peux m'empêcher d'aimer les hommes. » (p. 23)

Comment ne pas sortir de cette lecture soulée de paysages et de vapeurs poétiques ? À force d'idées fugaces, presque insaisissables, le narrateur parle du souvenir et du silence, de ce que l'on garde au fond du coeur et que l'on ne sait pas dire, ou alors maladroitement. L'ivresse est-elle salutaire ? Pas ici. Dans ce texte, le vin n'est pas un abrutissement, c'est un art, une heureuse métamorphose. « Je n'ai pas trouvé la poésie dans le vin, mais le vin dans la poésie. » (p. 44) le style de Jean-Claude Pirotte, que je découvre dans cet ouvrage posthume, est fait de touches verbales : cet impressionnisme littéraire est délicat tout en étant puissamment évocateur. Pas étonnant que la préface de Philippe Claudel soit si bouleversante : il y a des connexions certaines entre ces deux auteurs. La beauté dialogue entre leurs textes.

Dans ce court roman, j'aurais pu relever trois ou quatre citations par page. Alors que je relis ma chronique, je retiens cette phrase du roman qui résume si bien la vanité de dire, parfois. « le silence, il me semble que j'avais pour tâche, en cherchant à le définir ou à le suggérer, de le détruire. » (p. 34)
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Voilà 80 pages qui se lisent en une petite heure. L'auteur ne suit aucune chronologie et le lecteur se laisse porter par la poésie des mots, sans savoir où l'auteur va le mener...Une balade poétique et nostalgique au pays de cet écrivain discret mais en perpétuelle recherche de liberté.
Il s'agit plus d'un récit que d'un roman, d'une sorte de recueil de souvenirs de jeunesse et d'adolescence, d'un témoignage d'une partie de la vie de l'auteur.
L'auteur nous raconte son grand-père, les vignobles, les vendanges et les paysages qui ont marqué sa jeunesse.
Il nous fait voyager de son enfance à son adolescence, mêle rêves et réalité et nous raconte les balades à vélo avec ses amis vers le Revermont, les rencontres qui ont été importantes pour lui tout au long de sa vie, les soirées mémorables où avec ses amis, dans le bistrot de la belle Mercedes dont ils étaient tous amoureux, il partageait le plaisir de l'ivresse et la découverte des bons vins, les discussions animées mais aussi leurs silences, et enfin son amour des mots, des livres et de la littérature.
C'est le dernier roman écrit par l'auteur et il est teinté d'une certaine nostalgie et des regrets de l'enfance... Sans doute l'auteur se savait-il malade.
Le récit est découpé en courts chapitres, et se lit vite, mais l'écriture à la fois concise et poétique ne vous laissera pas indifférent.
De plus, le livre est merveilleusement préfacé par Philippe Claudel, qui rend ici un lumineux hommage au grand poète disparu en 2014, dont l'oeuvre immense, composée d'une quarantaine d'ouvrages a été couronnée par de nombreux prix.
L'auteur a reçu entre autre, le Goncourt de la poésie pour l'ensemble de son oeuvre et le Grand prix de poésie de l'Académie française en 2012.
Lien : http://www.bulledemanou.com/..
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Alors nous sommes ici de mieux en mieux et fabuleusement ailleurs. (19)

C'est un livre singulier qui se goûte comme on caresse une plume. Sa saveur est délicate et volatile, Jean-Claude Pirotte s'attache à l'indicible. Il le frôle et le caresse, sans pouvoir lui-même cerner ce qu'il cherche exactement. Il dit plus le vécu que l'objet, passe d'une identité à l'autre, utilise le présent, utilise le nous, dans une confusion des temps et de l'être. Se dessinent alors comme une masse nuageuse l'ailleurs et la littérature qui habitent l'enfance, la jeunesse, perdurent silencieusement jusqu'aux derniers fils de vie. L'intimité précieuse, le paysage secret, présence familière et continue qui se joue des contingences matérielles et biographiques. Que sommes-nous ? Pétris d'histoires et d'ambitions inutiles mais stimulantes, portés à nos corps défendant par des facultés romanesques, saurons-nous ouvrir une porte sur la réalité, accueillir l'enchantement plutôt que l'ivresse ?

Je sais aujourd'hui que rien n'est absolument définissable, et que justement ce qui est indéfini forme la matière même de notre appartenance à nous-mêmes, voire à l'espèce humaine. (67)
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Le silence ou comment un tout petit livre va vous emporter dès les premières lignes ! Chaque phrase écrite par Jean-Claude Pirotte est une perle à faire tourner longuement en bouche et j'aurais pu choisir, sur ses (seulement !!) 80 pages, au moins 100 citations tant ce livre est évocateur de sensations et de souvenirs.
La préface de Philippe Claudel, douce et lumineuse, nous plonge immédiatement dans une poésie délicate que confirme cette ode de Pirotte au bon vin, à l'enfance, à l'indicible, au rêve et à la réalité si intimement mêlés.
Le vin, donc, dans toutes ses métaphores viticoles, d'un vignoble à l'autre... Pirotte évoque ses expériences d'oenologue averti (la preuve, il parle des vins du Jura, l'or jaune !!), ses souvenirs de vendange, les paysages de vignes, les balades en vélo vers le revermont, la guerre d'Algérie. L'occasion finalement d'évoquer ses rencontres, les amitiés qui marquent, les personnages qui peuplent sa vie, et les livres.

Un grand merci à Valentine des Editions STOCK pour cette très belle lecture !
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Un court récit sur la poésie, la vigne, le vin, les vendanges entre Bourgogne et Jura.
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Belle prose de Mr Pirotte qui nous raconte son enfance et sa jeunesse dans les vignes du Jura. Nostalgie, poésie, vin et amitiés sont au rendez-vous.
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