Ils refaisaient l’erreur qui consiste à croire que l’homme est assez sage pour croître et prospérer sans saigner la terre. C’est un conte stupide qui a mené l’humanité à sa destruction et la terre à l’agonie.
Qu’est-ce que l’amour, sinon un miroir qui nous renvoie notre image transfigurée ?
La nécessité de la guerre est ancrée en nous aussi solidement que l’orgueil, que le désir, la curiosité, que la fascination pour le pouvoir, pour la beauté ou le mal absolu.
Vous croyez tout ce qu'on dit dans les livres ? Vous avez tort. Ce sont des choses sans vie, emprisonnées sur ces pages depuis trop longtemps pour être encore vraies. La parole écrite est morte. Le souffle l'a abandonné. p83
C'est avec un peu d'effroi qu'il retrouve soudain, flamboyante et terrible, pathétique et sénile, la femme de la cahute sur l'Ile, vestale dansiage, sorcière des contes, hirsute et imprévisible, amenée d'un feu bénéfique ou destructeur, absurde incarnation de la folie prétentieuse des hommes, femme éternelle qui donne la vie et sème la mort.
Le monde que j'ai contribué à entretenir est d'une cruauté dont nous sommes tous deux les fruits sanglants et abîmés. Je rêve pour toi d'une société où être un homme n'est pas nécessairement un enfer.
A présent son rejeton miraculeusement sauvé des eaux se dresse sur le chemin de la justice et du droit, un être pourvu de couilles et de la bonne dose d'orgueil, d'outrecuidance, d'égotisme, de violence qui ne manque jamais d'accompagner ces appendices stupides.
Une femme enceinte est un être surprenant, perméable au monde, en communion intime avec le vivant qui l'entoure et ses propres émotions, mais tout aussi aliéné par la nouvelle vie qui lui donne ce pouvoir.
De toute éternité, sommeille en chacune d'entre nous un démon, le monstre d'amour. Cette perversion prend possession de nous à la seconde où le nourrisson vagissant sort de nos entrailles et atterrit sur notre poitrine, tout contre notre peau. Ce premier contact a un caractère foudroyant, il nous submerge, nous métamorphose, nous arrache des émotions inconnues, violentes, originelles, qui nous relient, tels d'infinis cordons ombilicaux, à toutes les femmes que la Terre a jamais portées, toutes les femmes qui, depuis l'aube des temps humains, ont donné la vie.
C'est une beauté et une malédiction.
Les femmes sont-elles plus aptes à exercer le pouvoir ? Ont-elles véritablement, comme veulent nous le faire croire les mythes de la Renaissance, plus de jugement, d'empathie, davantage le sens de la justice et de l'équité ? Sont-elles, sinon exemptes, du moins plus affranchies que les hommes du désir de puissance, de l'orgueil, de ce que dans le Très Vieux Monde on nommait l'hubris ? Je l'ai longtemps cru, j'ai défendu cette conception avec passion, avec une conviction fanatique, à la mesure de l'effarante inanité de cette croyance. Je sais aujourd'hui qu'elle est infondée et dangereuse. Je sais qu'une femme peut se révéler abjecte, retorse, envieuse, fourbe, d'une patience diabolique, destructrice et narcissique ; c'est une créature nuisible et prédatrice.
Je le sais parce que cette créature, c'est moi.