«
Sa mère la pute » N.Power
Mais c'est du
Zola !
Et ça aurait pu car l'histoire est noire, brutale, à l'image du titre, elle se déroule en partie dans le Nord, la poussière de charbon, comme la misère sociale, s'infiltre partout, dans les lieux, dans les choses et dans les gens. L'héroïne, prédestinée par son milieu et son hérédité à devenir ce qu'on appelle une « cassos » va mener l'enquête la plus difficile qui soit : celle de sa propre identité, de sa propre vie.
Cet environnement sordide fait de prostitution bon marché, d'alcoolisme précoce et de désoeuvrement permanent, va donner naissance, contre toute attente, à un être combattif, instinctif et puissant. Alors que le système aurait dû la broyer comme tous les autres, la protagoniste va faire montre d'une force vitale incroyable, d'une résistance surhumaine (ou animale ?) à tous les chocs physiques et psychologiques qu'elle encaisse.
Et au-delà même, sa résilience va la mener où on ne l'aurait pas imaginé.
L'écriture est de bonne facture : les dialogues sont justes, les descriptions évocatoires, les monologues témoignent d'une fine connaissance de la psychologie et de la littérature. Car les références sont nombreuses, celle de
Zola est explicite, on décèle des clins d'oeil à
Maupassant, à
Sagan, à
Vian…
Le style est cru sans être vulgaire, il crache sans pudeur la vie de ses personnages dans la tradition naturaliste bien que certains passages soient teintés de poésie, voire de lyrisme hugolien qui renforce l'impact émotionnel sur le lecteur.
Récit de femmes, roman social, roman psychologique, histoire d'enfances, d'amour et de mal amour, chacun y trouvera de quoi le happer et le faire réfléchir.
C'est souvent dur, parfois glauque, c'est noir mais ce n'est jamais désespérant, au contraire ! A l'issue de cette lecture courte mais dense, on ressent un sentiment de force et si ce n'est d'optimisme, au moins de résilience et de sérénité. Comme si, malgré toutes les vacheries de la vie, de l'hérédité, de la condition sociale, il était possible de devenir soi-même et que finalement, comme le dit l'auteure elle-même, « le karma a fait son boulot ».
Je recommande ++ et sans modération.