Les poissons sont de l'eau à l'état solide.
Les oiseaux sont du vent à l'état solide.
Les livres sont du silence à l'état solide.
Les poissons sont de l'eau à l'état solide.
Les oiseaux sont du vent à l'état solide.
Les livres sont du silence à l'état solide.
p.40
Il y avait une terrible odeur de peau dans les bibliothèques de jadis.
Chaque instant du temps est un lieu où on ne revient pas.
L'écriture est une infantia. Celui qui écrit est un infans, un infant dans le royaume des mots qui, regagnés par le silence premier, réexposent ce qu'ils cherchent à montrer comme dans leur aube.
Une aube muette se cherche dans la lecture des livres.
p.248
Simon le Magicien dit que les larmes de l'innocent, le deuil à l'occasion des morts violentes, l'incendie volontaire des cités remplies d'habitants alors qu'on a refermé les portes sur eux, l'anéantissement des nations sont en dehors de toute consolation. Qu'au cours du temps ils restent sans consolation. Ils doivent rester sans récit. Dénué de sens. Jadis absolu (qui ne peut être historisé).
Le jadis comme inconsolable.
Le jadis comme Vieille humanité qu'aucune Humanité future ne peut prétendre consoler
Le jadis comme humanité perdue qui ne revient pas.
Aucun fruit n'a vu de fleur
Quand je regarde dans mon coeur, j'y contemple une saison que je ne comprends pas. C'est une série d'états disparates où mon passé est peu intéressé. Cette indifférence à moi-même au centre de moi-même, après avoir angoissé, détruit l'angoisse et communique une hâte.
J'ai l'impression de rencontrer des êtres et de vivre des choses avec le détachement de quelqu'un qui aurait déjà quitté ce monde et qui en éprouverait un regret intense.
Toute trace est une bête absente, une chasse possible de ce qui ne s'y voit pas. Seule leur attente les découvre. Je pose deux thèses: Il y a une lecture en amont de toute écriture comme il y a des signes avant la langue naturelle.
Toujours l'image qui manque précède.
Le non-mélancolique est voué à ses pauvres joies naturalistes et à la chasse limitée (horistique) de l'absent dans le présent. Il chasse le printemps dans l'hiver. Puis il mange.
Seul le mélancolique chasse sans fin (aoristiquement). Seul il voit sans cesse, partout, la trace du perdu merveilleux, le vestige de la reine, l'empreinte de la "vraie".
Seul le mélancolique porte avec lui la joie arbitraire et foudroyante.