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En tournant les pages de son agenda, un musicien célèbre voit refluer tous ses souvenirs.
le début se passe en 1963 et il semble que ce soit au XVIIIème ou au XIXème siècle, tant dans le style littéraire que dans le comportement des personnages. D'ailleurs Karl, le musicien, se définit comme « un puritain effarouché »
C'est très descriptif. Les phrases sont très longues et il faut parfois s'y reprendre à plusieurs fois pour en comprendre le sens.
Les thèmes principaux sont la transformation et l'interprétation des souvenirs, l'amitié que dure et les amours plus éphémères.
C'est superbement bien écrit, mais j'ai cru que je n'en verrai pas la fin et j'ai été contente d'avoir enfin terminé.
du coup je ne sais vraiment pas dire si j'aime ou pas ce qu'écrit Pascal Quignard. Je vais tenter d'en lire d'autres pour me faire une impression.
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Sur la couverture de ce Quignard d'il y a trente ans on lit « Roman », et c'est une autofiction. Quignard est né en France en 1948. Son avatar, auquel il donne le nom désagréable de Karl Chenogne, est né en Allemagne huit ans plus tôt. Peu importe le décompte de ses soeurs, de ses femmes et de ses voyages, l'avatar pense comme Quignard, joue comme lui le répertoire baroque du violoncelle et de la gambe, et reçoit pour lui la commande de « Tous les matins du monde », le roman et son adaptation cinématographique (p 217). 

On pense au narrateur de Proust, qui n'est pas nommé. L'auteur en a la culture, la densité dans l'introspection, l'agilité dans le passage du sensible à l'abstrait, mais il n'a pas sa formidable pertinence dans les apartés. Il aime les dates, les noms de personnes, la précision des lieux. Il pratique une syntaxe savante, use à l'occasion d'un vocabulaire et de conjugaisons archaïques. Il pratique un doute radical. Il revendique l'hypocondrie et un pessimisme dépressif : « J'ai été dans une autre vie cellule cancéreuse et larme, et taon, et âne. J'ai été aussi huître, vent, peur, cône de beurre, soupir » (p 95). C'est dans la dénégation qu'on trouve ses confidences les plus fines, comme sa définition de la musique : « Je n'ai pas souhaité ici parler de musique, parler du coeur sans voix, du coeur muet et sonore ».

Il construit comme Proust par associations d'idées sur le souvenir, mais il se défie de la mémoire qui peut être trompeuse, douloureuse, hallucinante. Les souvenirs sont biaisés ou construits. Ses amis et ses amantes ont des souvenirs qui contredisent les siens. La mémoire est tragique : « le pépin coincé dans les molaires – ou quelque chose de la mûre, de trop mûr, un grain de ce qui est trop mûr et qui pourrit, et qui carie. C'était la plus fidèle définition du souvenir (p 355-6).

Il a aimé sa chatte Didon et Sainceny, rival trompé, puis ami indéfectible (dont le nom rappelle le Danceny par qui Valmont se laisse tuer à la fin des Liaisons Dangereuses) et tous deux meurent prématurément. Il aime les femmes avec désespoir et cynisme : « Les femmes que j'ai rencontrées dans ma vie (...) étaient si remarquables et avaient une idée si haute et si juste de leur valeur qu'elles ne faisaient un peu près rien qui l'eût avilie et qui de ce fait les eût abaissées à leurs yeux - rien de très concret au-delà de posséder un corps » (p 153). Il commente longuement l'impossible représentation du corps aimé (p 118-124). Ses souvenirs amoureux sont amers : « On n'aime qu'une fois. Et la seule fois où l'on aime, on l'ignore puisqu'on la découvre. Et cette première fois, c'est dans l'extrême enfance et dans la chétiveté de nos moyens. Et si cette fois est malheureuse, toutes les fois sont malheureuses. Reste la volupté, qui répare un peu » (p 303). La clef en est donnée : « Si mes souvenirs sont exacts ma mère préférait les petits animaux en porcelaine de Meissen aux petits garçons » (p 90). Plus loin, sur la tombe de sa mère : « Je murmurai : comment c'est l'enfer ? Est-ce aussi désagréable que je le pense ? Est-ce aussi terrible que ce que tu m'as fait vivre ? ». Ce roman grave est semé de comptines et de confiseries, ersatz de l'enfance.

Un livre fascinant, pour employer un terme cher à Quignard, qui désoriente jusqu'au malaise : « Les livres partagent avec les tout petits enfants et les chats le privilège d'être tenus, des heures durant, sur les genoux des adultes. Et de façon extraordinaire, plus encore que les enfants, plus encore que les chats, ils ont le pouvoir de captiver jusqu'au silence le regard de ceux qui les regardent, de pétrifier les membres de leur corps, de subjuguer les traits de leur visage jusqu'à leur donner l'apparence de l'imploration muette, l'apparence d'une bête qui est aux aguets, l'apparence d'une prière incompréhensible et peut-être est éperdue » (p 366).
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Le salon du Wurtemberg est un récit, étiqueté roman lors de sa parution, qui semble comporter beaucoup d'auto-fiction. le livre raconte la vie de Charles Chenogne, dit Karl, entre l'année de son service militaire (1963) et l'année 1986; Charles est né en Allemagne dans un milieu très français (huguenots installés dans le Wurtemberg) et il pourrait parfaitement correspondre à un alter ego de Pascal Quignard (+/- même âge, musicien, écrivain, un parcours visiblement parallèle).

Le narrateur va nous livrer sa vie par fragments, le plus souvent avec un mode flux de conscience et moult, moult digressions qui lui viennent à l'esprit sur des thèmes divers, la plupart du temps ayant trait à la culture non tant musicale que littéraire, historique, philosophique. L'écriture est très riche en détails, qui par moments nous la rendent très précieuse, recherchée. le narrateur est un être très mélancolique voire dépressif, jamais content, toujours entre deux déchirements, un être en somme assez nietzschéen.

Sa vie commence en Allemagne où sa mère quittera sa famille pour un autre homme. Ensuite Charles Chenogne ne se sentira jamais un sujet épanoui, ni accompli, il recherchera la solitude en même temps que la compagnie sans pouvoir réellement s'attacher aux gens ni aux choses; on dirait que c'est la recherche permanente du paradis perdu.

Dans ce livre, le meilleur ami du narrateur est un fin connoisseur de confiseries, parfois surannées, des raretés éparpillées entre la France et l'Allemagne. Il y a, page 315 un si joli éloge du calisson d'Aix.

Une lecture ardue qui nécessite concentration, qui demande la relecture de passages sous peine de perdre le fil . Plusieurs fois je fus tentée d'arrêter et chaque fois j'ai continué, attirée par le déferlement d'idées et de préciosités qui sautaient du coq-à-l'âne pour vous mettre en éveil, un éveil légèrement accablé par un afflux torrentiel d'informations.

Après cet effort, le réconfort est de pouvoir appréhender un peu mieux le style, l'art et la manière de cet auteur singulier.
Lien : https://pasiondelalectura.wo..
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Le narrateur, qui semble être son double avec cinq ans de moins, défend une certaine vision de la vie, des relations humaines et surtout du couple : une sorte d'hédonisme léger mais qui s'avère souvent empêché ou contrarié par les évènements ou les sentiments de l'autre. Où il est aussi question de l'amour pour les chats, les confiseries et la viole de gambe.
Le mot qui me paraît définir le mieux l'univers de Quignard est raffinement : raffinement des décors, des atmosphères, des personnages… et bien sûr du style. Quignard n'a pas son pareil pour parler de la mémoire, du désir, de l'amour, de l'amitié, du deuil, sans jamais tomber dans les clichés, le lyrisme ou la philosophie de bazar : c'est vrai, fort et délicat, tout en nuance. Un rien suranné peut-être...
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“C'est si bien cuisiné, on ne sait plus ce qu'on mange !”, s'était écrié un jeune convive lors d'un repas où tous les autres étaient affligés de trouver dans l'assiette un produit médiocre noyé dans la sauce… Voilà exactement le souvenir auquel m'a fait penser cette lecture.

Le style est travaillé, précieux, voire alambiqué… Bravo alors ou pas ? Non, pas vraiment, car à la fin d'un chapitre, on se dit trop souvent : “c'est très joliment tourné mais… à vrai dire, ça racontait quoi ?”.

Certains aiment, tant mieux. Moi, je me suis tellement ennuyé que j'ai fini par abandonner, avec le regret de ne pas l'avoir fait plus tôt dans ce long livre. En revanche, j'avais aimé “Tous les matins du monde” au joli style et au texte prenant, poésie, élégance, concision, tout m'y avait plu.
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Un chef d'oeuvre de médiocrité.
Il n'y a rien de bon dans ce roman, que ce soit les réflexions pseudo intellectuelles dans lequel le livre s'embourbe à n'en plus finir et qui plombent le texte, ou l'histoire elle-même qui est tout bonnement sans intérêt, j'ai détesté !
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un classique possédant les principales clefs du jeu de l'amour existentiel entre deux êtres.
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Pascal Quignard : un millésime de 1986… Souvenirs ! Souvenirs !

Pascal QuignardPascal Quignard… Beaucoup de bouches murmurent, beaucoup d'oreilles se tendent. Une écriture réveille les lecteurs somnolents et troublent les conformistes. Trois ans avant « Les escaliers de Chambord », il avait osé « le salon de Wurtemberg ».*

* Article publié les 6 et 7 janvier 1990 dans « le Journal de Toulouse ».

Aujourd'hui retiré dans la demeure familiale de Bergheim, dans le Wurtemberg, Charles Chenogne se souvient… Il feuillète ses « carnets rouge foncé, au cuir grenu » et les souvenirs affluents… Aujourd'hui, à quarante-quatre ans, les années 60 réapparaissent. Ce violoniste célèbre, écrit depuis l'été 1985. Un après, en cet été 86, il arrive au terme de ces mémoires tristes.
Charles couche sur le papier les vingt ans qui viennent de passer comme l'eau coule sous le pont. Lentement en été, furieusement au printemps. Il avait grandi, francophone en terre germanique. Une mère qui préférait les petits animaux en porcelaine de Meissen aux petits garçons. Il l'aimait… Il avait rencontré Florent Seinécé en mars 1963, tous deux effectuaient leur service militaire. Florent adorait les bonbons, les violoncelles… Florent était marié à Isabelle et père de Delphine. Une amitié avait grandi, les êtres s'aimèrent, se détesteront cordialement. Carrefour de ces rencontres, Saint-Germain-en-Laye, chez Mademoiselle Aubier, avec les concerts de l'après-midi.

Le narrateur égrène les jours et les années de sa vie, réminiscences, pochades, oeillades, clins d'oeil à sa mémoire. Il défait un fil d'Ariane ; travail d'Hercule, il restaure les fragments de son passé pour nous en restituer l'étrange beauté… Une beauté semblable à celle de ces miniatures du XVIIIème siècle que l'on admire avec une loupe pour en apprécier toute la délicatesse.
Un roman à lire au coin du feu…
Charles écrit, sous la surveillance du Baron de Münchenhausen, le récit de sa vie d'homme dans toute son apparente banalité. Or, la richesse, en détails extraordinaires, sublime ce récit pour en faire une épopée. L'extrême méticulosité que met Charles dans sa narration n'est-il pas un subterfuge pour ralentir l'issue inéluctable… Mourir ! de toutes choses, prendre possession jusqu'à les dénommer avec le souci d'un encyclopédiste, n'est-ce pas mieux s'ancrer dans le monde des vivants que l'on appréhende de quitter un jour…
Pascal nous offre là un texte chaleureux, ébouriffant, sans message récurrent ni recherche d'apothéose glorieuse.
La forme de narration préfigure « Les escaliers de Chambord » qui fut pour moi, une lecture-électrochoc.
Ici, un roman chaud comme une longue confession ; un roman comme une longue rêverie, qui se lit au coin du feu, recroquevillé sur le canapé, surveillant les braises du coin de l'oeil.
Moment rare où l'on se sent en intime complicité avec un écrivain… Patrick Besset.

« le salon du Wurtemberg » par Pascal Quignard chez Gallimard. Collection Blanche et in Folio, n° 1928.
Lien : http://patrickbesset.blogspo..
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