Juin 40. La débâcle. Les soldats montent au front de façon plus ou moins désordonnée. La population fait le chemin inverse, à pied, à cheval, en voiture ou en charrette. Un exode de masse, cible idéale pour les avions de la Luftwaffe canardant sans distinction civils et militaires. Seul au milieu de la route, Amédée Videgrain a perdu son régiment. Il a été chargé par son sergent d'attendre le camion de la croix rouge devant récupérer les corps de ses camarades fauchés par les mitrailleuses allemandes. Au moment de repartir, sa moto reste en rade. Obligé de poursuivre son chemin à pied, Amédée va errer plusieurs jours à travers champs, parcourant des villages évacués, logeant dans les ruines de maisons éventrées par les bombes. Un chemin semé d'embuches qui le mènera enfin à destination. Pour le pire, uniquement pour le pire…
Amédée est paumé au sens propre comme au figuré. Il se demande ce qu'il fait là et il se demande où il doit aller. Sa route croise celle de bonnes soeurs en godillots, d'infirmiers dépassés par les événements, de fossoyeurs désabusés, de vaches abandonnées ou encore de cochons cannibales. Son errance souligne à merveille la confusion totale régnant sur les routes de France à l'époque. Une France déboussolée où tous les repères semblent s'être effondrés d'un seul coup.
Avec sa bichromie de noir et de gris ombrée de sépia et sa ligne claire précise contrastant avec le chaos ambiant, Rabaté offre une narration simple, directe, limpide. Une sobriété de circonstance en permanence au service du récit.
La Déconfiture, c'est la quête absurde d'un homme qui ne fait que suivre le mouvement sans réellement comprendre ce qui se passe. Entre situations surréalistes et dialogues à l'humour féroce, Rabaté propose un album tragi-comique permettant de suivre la défaite de l'armée française à travers les yeux d'un soldat placide, incrédule, ni patriote forcené ni déserteur dans l'âme. Hâte de retrouver Amédée pour connaître la suite (et la fin) de ses pérégrinations. Et ravi de retrouver un Rabaté en pleine forme après le décevant « Vive la marée ! ».
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