Auschwitz, les nazis et la « Solution finale » est un livre « s'appuyant sur les meilleures sources historiques et sur une centaine d'entretiens inédits avec d'anciens bourreaux comme avec des rescapés ».
C'est un livre véritablement captivant, très instructif et accessible.
Il nous permet de comprendre que la Solution finale est l'aboutissement, la conséquence de multiples décisions dont les retombées et l'ampleur ont échappé aux nazis notamment sur le plan « organisationnel ». Auschwitz n'a donc pas été conçu dès le départ comme une industrie de la mort. L'auteur nous apprend aussi que sans les initiatives de l'ensemble des nazis, même au plus bas de l'échelle, ce massacre n'aurait pu être orchestré avec une telle efficacité destructrice.
Rudolf Höss, qui avait déjà l'expérience de l'organisation du camp de Dachau, lui-même, s'est montré d'une implacable et froide inventivité pour que la mécanique de cette machine infernale – littéralement de l'enfer - tue avec le meilleur rendement possible.
Laurence Ress, auteur du documentaire et livre « La séduction du diable –
Adolf Hitler », dont je ne manquerai pas d'en faire la lecture, nous fait prendre conscience aussi que les nazis, de par les interdits imposés aux juifs ou les conditions dans lesquelles ils les ont placés abondaient dans le sens de leurs préjugés antisémites. Ainsi, ne pouvant posséder des terres, les juifs étaient urbains et marchands ce qui corroborait au cliché du juif avide d'argent ; en les avilissant, en les affamant et en les acculant à des actes de survie, les nazis entretenaient l'idée qu'il s'agissait de sous-hommes (en vérité moins que cela, ils étaient vus comme des bacilles, de la vermine) qui se comportaient comme des animaux, etc.
Entre autres analyses, l'auteur nous en livre une tout à la fois dérangeante et porteuse de réflexion : même s'il appartient à chacun de poser des choix et d'en être responsable, les circonstances par nature exceptionnelle peuvent pousser l'homme lambda à devenir un monstre. Cette conclusion il la tire autant des rescapés que des bourreaux. Alors, même s'il m'est inimaginable de concevoir que je pourrais être un Mengele ou un Hitler, je songe que si des conditions cataclysmiques devaient survenir et engageaient ma survie, je serais sans doute capable de choses qui en d'autres temps m'horrifieraient. Cette réflexion ne manque en tout cas pas de susciter une remise en question de sa personne. Je reste néanmoins convaincue que si par désir de protection de soi ou d'un être aimé « on » pourrait être capable – peut-être – du pire, il reste que contrairement à ces monstres, ce ne serait pas de sang-froid et pour nourrir une idéologie aux fondements abjects.
Des aspects généralement assez peu abordés figurent aussi dans ce livre remarquable, comme le « bordel » (composé d'esclaves sexuelles) et la piscine d'Auschwitz (élément qu'aiment à brandir les négationnistes) et qui montre toute la complexité de ce camp de concentration qui, parallèlement, faisait cohabiter ces incongruités avec les pires atrocités.
Vous l'aurez compris, ce livre m'a passionnée de bout en bout et je compte ne pas en rester là avec cet auteur. Je vous le conseille vivement !