... où
Alain Rémond raconte son enfance bretonne, catholique et pauvre. le début du récit est idyllique- ascension sociale du père, jeux des enfants, travaux dans la nouvelle maison, quotidien illuminé par la grande famille complice…-
les images renvoient aux photos de Doisneau, aux
poèmes de
Prévert, bref, aux années cinquante souriantes, chaque geste est lumineux.
Puis tout bascule : le père boit, les parents se disputent, les enfants s'isolent de plus en plus dans l'imaginaire et forment une sorte de tribu contre le malheur. Les enfants grandissent, Alain apprend le monde mais reste révolté contre la mort. Mort de son père d'abord, jeune encore, avec lequel (et auquel) il (se) reproche de n'avoir pas su communiquer (tiens, tiens!). A cet égard, l'agonie du père est un passage émouvant dans lequel il dit à ses enfants ce qu'il préfère chez chacun d'eux. Mort de sa mère ensuite, plus tard alors qu'il est devenu adulte, qui entraînera la vente de la maison comme un adieu total à son enfance. La maison, autour de laquelle tout se joue en devient un personnage. Il y a aussi le village et l'éternel débat gauche/droite, école libre et laïque, cocos et cathos … Il y a cette France artisanale (boucher, maréchal-ferrant…) au sortir de la guerre et les années soixante avec le « Yé-yé », qu'Alain et ses frères et soeurs considèrent comme une vaste escroquerie envers les jeunes (déjà !), leur faisant oublier la guerre d'Algérie, le
Tiers-monde, la naissance des banlieues concentrationnaires.
Bien sûr, cela ne va pas sans quelques clichés : « Pourquoi faut-il dire adieu à l'enfance ? Pourquoi les choses se défont-elles, pourquoi tout s'en va-t-il? »(=on est bien peu de chose !) ni quelques maladresses (je trouve) : « En plus, le lapin, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais c'est drôlement bon .»
Reste un récit plein de vie et de chaleur au style alerte, qui se lit d'une traite.