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Critique de hcdahlem


«La main dans la main, par les rues nous irons»

Dans son nouveau roman, Nathalie Rheims raconte sa rencontre avec Marcel Mouloudji et leur liaison à la fin des années 1970. L'occasion de revivre cette période intense et de rendre hommage à un artiste aussi talentueux que tourmenté.

Il arrive que certains textes s'imposent d'eux-mêmes, comme portés par une impérieuse nécessité. Nathalie Rheims travaillait sur un roman lorsqu'elle a ressenti comme une évidence le besoin de poursuivre l'exploration de sa vie. Après avoir raconté son initiation amoureuse à 14 ans avec un homme mur dans Place Colette – qu'aucun éditeur ne pourrait publier aujourd'hui sans s'exposer au lynchage – elle se devait de raconter sa liaison avec Marcel Mouloudji.
C'est dans sa loge qu'elle rencontre le chanteur, dont jamais elle n'écrira le nom. Accompagné d'un ami, il était venu féliciter la jeune comédienne de 18 ans pour sa prestation aux côtés de Maria Casarès dans La Mante polaire. «Il me tendit la main, et me dit qu'il avait beaucoup aimé le spectacle. Que ma présence l'avait à la fois ému et impressionné. Je n'en revenais pas d'entendre ces mots, si gentils, manifestement sincères, et remplis d'une douceur insaisissable.»
Après avoir réussi le concours d'entrée au Conservatoire, et réussi ainsi à quitter le milieu scolaire qu'elle détestait, elle était parvenue à décrocher ce rôle, sorte de bréviaire pour la gloire.
Elle avoue à son admirateur qu'elle adore ses chansons, que «Faut vivre» est sa préférée, et lui promet qu'elle viendrait assister à son tour de chant à la villa d'Este. Mais elle sait déjà qu'un coup de foudre vient de tonner, malgré leurs 35 ans d'écart.
C'est après ce spectacle, en novembre 1977, qu'ils déambulent dans Paris, se racontent leurs vies respectives, se prennent la main et finissent par s'embrasser.
Commence alors pour l'amoureuse une exploration intensive de la vie et de l'oeuvre de cet artiste aux talents multiples. Elle se plonge dans ses livres, écoute tous ses disques, découvre son enfance difficile auprès d'une mère qui finira internée en asile psychiatrique. À 12 ans, il rencontre Jean-Louis Barrault et fait ses débuts sur scène. Au fil des rencontres, il va alors toucher non seulement au théâtre, mais aussi au cinéma, à la peinture, à la littérature et à la chanson. Au moment où commence sa relation avec la narratrice, il vient de perdre ses trois pères adoptifs: «Raymond Queneau, son protecteur chez Gallimard, était parti le premier, le 25 octobre 1976, Marcel Duhamel, son protecteur dans la vie, ne tarda pas à le suivre, le 6 mars 1977, et enfin Jacques Prévert, son ultime père, le 11 avril 1977».
Prévert et le groupe Octobre qu'il fréquenta longtemps avant d'être admis au sein du clan Sartre, de faire corriger ses textes par Simone de Beauvoir.
L'occasion pour le lecteur de constater alors combien Paris comptait de talents et combien les arts se nourrissaient les uns des autres. C'est aussi à cette source que la jeune comédienne, passionnée par la chanson française, vient s'abreuver. Même s'il n'a rien d'un pygmalion, le nouvel homme de sa vie est riche d'une belle expérience, a connu bien des hauts, mais aussi des bas et avance dans la vie avec le regard vif, mais teinté de mélancolie. Il sait combien sa liaison est fragile, qu'il doit composer avec une femme jalouse et qu'il ne peut offrir un avenir à sa nouvelle conquête.
Il ne reste désormais qu'à profiter des quelques rencontres furtives. Il ne reste que l'amour. Intense et sincère, même s'il n'est vécu que par brèves séquences.
Nathalie Rheims raconte cet épisode de sa vie avec la fraîcheur de ce moment. Sa plume est vive, plein d'allégresse. Elle nous fait partager ses découvertes en plongeant dans la vie et l'oeuvre de Mouloudji comme dans une folle farandole. Et c'est avec ce même bonheur qu'on se laisse entraîner avec elle.


Lien : https://collectiondelivres.w..
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