Qui est François Richard? On n'en sait rien. Qu'est-ce que c'est qu'un anarchiste de droite? On n'en sait rien non plus. Et pour cause. Récapitulons. D'abord, un anarchiste, c'est quoi? C'est un individu qui se révolte contre deux choses, ensemble ou séparément: l'autorité imposée, la dictature des puissances d'argent. L'anarchiste est né de ce qu'il appelle - et jusqu'à Staline, tous les communistes avec lui - la Révolution "bourgeoise" de 1789 qui représente le remplacement d'une aristocratie par une autre: celle du sang bleu par celle du Capital. L'"Etat", dans cette analyse, n'est que la superstructure, le parapluie d'acier, d'une classe dominante d'usurpateurs qui se sont entendus sur le dos du peuple pour faire marcher à plein rendement "l'exploitation de l'homme par l'homme" (l'industrie capitaliste). L'anarchiste est anarchiste en ceci qu'il s'oppose à l'Etat "bourgeois" (=capitaliste) et à la confiscation de la voix du peuple par la "démocratie" représentative, qui selon lui n'est représentative de rien sinon des intérêts particuliers du Capital. C'est dans ce cadre qu'"un bon flic est un flic mort" puisque la fonction essentielle de la police est de servir les intérêts de l'Etat, structure de domination d'une conjuration capitaliste, en réprimant les soulèvements des "classes dangereuses" (= des victimes du capitalisme conscientes de leur condition). En conclusion provisoire, on comprend déjà que l'anarchiste étant un produit de l'opposition au parlementarisme bourgeois, donc à la division illusoire - pour mieux régner dans la pérennité - "gauche/droite", il ne peut justement pas être dit de gauche ou de droite!
Attaquons-nous à présent au concept de droite. Comme René Rémond l'a brillamment montré il y a très longtemps, être de droite, c'est entrer dans une des trois catégories suivantes: soit la droite orléaniste (issue de Louis-Philippe d'Orléans, financé par les banques anglaises pour déclencher des insurrections en 1789, et incarnée par son fils Louis-Philippe Ier, le "roi bourgeois"), soit la droite légitimiste (les aristocrates d'Ancien Régime), soit la droite napoléonienne. Etant donné la définition consensuelle de l'anarchiste donnée plus haut, on voit mal comment on pourrait combiner "anarchiste" et aucune de ces "droites"-là!
Maintenant, regardons un peu qui notre François Richard nous présente comme "anarchistes de droite": Anouilh, Aymé, Bernanos, Bloy, Barbey d'Aurevilly, Daudet, Darien, Drumont, Gobineau, Léautaud, Laurent, Nimier, Pauwels, Perret, Rebatet, Vandromme, plus un inconnu du public, même cultivé: Michel-Georges Micberth, obscure espèce de Ferdinand Lop survolté des années 1970 qui faisait dans le happening politico-fumisto-surréaliste à la faveur de la débine post-gaullienne. C'est ce personnage loufoque qui occupe les 2/3 du Que Sais-Je? de Richard qui en parle comme s'il s'agissait du plus grand écrivain français du XXe siècle.
Le problème de François Richard, c'est qu'il ne serait jamais venu à l'esprit d'Anouilh, Aymé, Bernanos, Bloy, Barbey d'Aurevilly, Daudet, Darien, Drumont, Gobineau, Léautaud, Laurent, Nimier, Pauwels, Perret, Rebatet, Vandromme de se dire soit de droite (Georges Darien, "de droite"?!?), soit anarchiste (Lucien Rebatet, "anarchiste"?!?), et encore moins… "anarchiste de droite"! Ce qu'ils avaient en commun, si l'on force un peu, c'était qu'ils étaient en majorité réactionnaires - cathos tradis, légitimistes abstraits, ou un temps Action Française - dans une époque où leurs positions apparaissaient complètement dépassées.
Un autre trait commun, beaucoup moins glorieux que de persister dans ce qu'on croit - à tort ou à raison - être la vérité malgré les changements de régime, c'est le refus de l'engagement, de la prise de parti, qui cache difficilement l'individualisme plutôt antipathique du nanti en face de la misère humaine. "Anarchiste de droite" serait alors en quelque sorte un prétexte sublime (et absurde) pour pratiquer le désengagement et s'en glorifier… Et une posture pour briller à bon marché dans les salons du Ve arrondissement: "Mais haleurs, vous êtes quoâ? - Eunârchiste de dreuâte, médème."
Quant à Alain de Benoist, qu'on retrouve cité dans ce petit machin de François Richard, on sait qu'il a fait du désengagement une profession. Il appelle ça la "métapolitique". Ses adversaires appellent ça du confusionnisme. Ca ne trompe personne.
Bref, tout ça: aucun intérêt. Derrière ce Que Sais-Je qui ne sait rien et qui n'aurait jamais dû voir le jour aux Presses UNIVERSITAIRES de France se cache, j'ai l'impression, la resucée d'une thèse ou d'un mémoire hagiographique consacré(e) à "Micberth".
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je crois que la démocratie,en raison de son système indirect,n'a jamais été qu'une utopie fort dangereuse.En refusant les moyens d'être vraiment démocratique, elle nous oblige à un perpétuel balancement entre les extrêmes de gauche et de droite, pareillement détestable
jan micberth
l'homme qui a obei, est à jamais perdu pour certaines délicatesses de la vie.
IL est diminué intellectullement
paul leautaud
François Richard - Le surmoi perverti