Livre de 119 pages, très touchant. L'auteur nous décrit avec beaucoup d'émotion, de doutes et d'espoir, le thème de la mort, dans des conditions assez spéciales.
La mine s'écroula sous l'effet d'une forte déflagration sur Fernand. La déflagration avait plaqué son corps contre la paroi. Il ne savait pas dans quel état était son corps. C'était le silence complet, le trou noir dans sa tête. Etait-il mort ? Peut-être que c'était aussi cela, la mort. En tout cas, il était pire qu'en prison. Une prison, dont il ne pouvait même pas bouger. Soudain, il entendit une voix qui lui demandait de se réveiller.
Il se rappelait, alors, son grand-père et son père mineurs. Et lui, qui avait dit, qu'il ne travaillerait jamais dans une mine. Il voulait être jardinier, mais il n'avait pas eu le choix. « C'était comme ça », disait sa mère.
Il se rappelait sa mère, si silencieuse, dont il connaissait si peu de chose d'elle, qui répétait sans cesse « C'est comme ça. », lorsqu'il essayait de lui parler. Cette mère, qui lui faisait porter le lourd et douloureux fardeau de la mort de son aîné. Elle ne lui en avait jamais parlé, mais il avait compris lorsqu'ils allaient au cimetière. Lui, était le mort-vivant, vivant dans l'ombre de son frère. Toute sa vie, il avait été frustré par celle qui lui faisait comprendre que c'était sa faute, si elle souffrait ainsi. Il aurait tant voulu que sa mère l'aime. Jamais, elle ne l'avait pris dans ses bras, trop occupée à aimer cet autre enfant.
Il se rappelait son père, qui souffrait comme lui de la mauvaise humeur de cette femme. Ce père, si peu bavard lors des journées de pêche avec lui, mais qui lui parlait tout bas quand sa mère se mettait en colère. Il revit sa douleur, lorsque son père les avait quittés.
Il se rappelait son ami d'enfance, Mario, prit comme lui dans l'effondrement de cette mine. Il avait tant partagé de bons moments avec lui, le foot, les bagarres, les filles…
Et puis, il se rappelait Martha, à qui il n'avait jamais osé lui dire qu'il l'aimait.
Sa tête n'arrêtait pas de lui imposer des souvenirs.
Il voyait de vieilles pierres, des couleurs provençales. Il sentait l'odeur de la lavande. C'était beau là-bas.
Il sentit qu'il avait faim et soif. S'il mangeait un doigt, le sentirait-il ? Impossible, il ne pouvait pas bouger. Alors, il rêva qu'il mangeait. Il garda les yeux ouverts de peur de rater la lumière d'un réverbère, d'une étoile, d'un simple petit rayon de lumière. On ne sait jamais. La nuit noire, sous cette terre, était, désormais, son autre planète. Il voyait les mêmes oiseaux noirs voler au-dessus de lui, qu'il avait vus quand son père l'avait quitté. S'il n'était pas mort, celle-ci n'était pas loin. Allait-il rejoindre son père ? S'il s'en sortait, il se promit de tout aimer.
Soudain, tout se mélangea dans sa tête. Les visages qu'il connaissait se superposaient. Il avait mal, mais se sentait bien. Il crut entendre des voix qui l'appelaient. Son père peut-être ? Il voyait une légère lumière. La mort venait-elle le chercher ???
Magnifique roman et magnifique écriture, qui nous laisse sans mots…
Céline Righi a remporté avec
Berline, le premier Prix, « Premières Paroles », en 2023.