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Il est un endroit de la bibliothèque réservé aux chefs-d'oeuvre.
Ces livres exaltants, ces compagnons au fil du temps rassemblés, qu'il est agréable de les avoir à portée de main !
Babelio, par son concept même du partage, est un formidable accélérateur de redécouvertes. L'envie m'a pris cette semaine de retirer momentanément de son sommeil “Fils d'homme”, pour vous le présenter. Ce roman de l'écrivain paraguayen Augusto Roa Bastos a été publié à Buenos Aires en 1960, exil oblige.

Itapé et Sapukai sont des bourgades situées au sud de la capitale Asunción. Distantes l'une de l'autre d'une cinquantaine de kilomètres, elles furent le berceau de plusieurs révoltes agraires au début du siècle dernier.

L'indépendance du Paraguay remonte à 1811, date où commence le long règne du dictateur Gaspar Francia. Un siècle plus tard, le narrateur de “Fils d'homme” est encore enfant lorsqu'il écoute un vieillard d'Itapé raconter la mort tragique de son père, assassiné froidement par Francia dont il était pourtant le serviteur fidèle.

Le ton belliqueux de “Fils d'homme” est palpable dès les premiers chapitres alors que l'auteur décrit les us et coutumes de ces villages retirés et s'attarde sur le parcours de vie de personnages pittoresques.
Les chapitres suivants relatent les rébellions de petites gens contre le pouvoir central autocratique. le lecteur prend rapidement fait et cause pour ces prolétaires dont le cri ''Terre, pain et liberté !'' résonne sourdement dans toute la région. Malgré un manque criant de moyens militaires, ces miséreux se battent avec l'énergie du désespoir contre les forces loyalistes d'une férocité implacable.

Fils d'homme” permet de découvrir la jeune Histoire du Paraguay, d'approcher sa culture métisse au langage mêlé d'hispanisme et de guaranisme, de s'initier aux enjeux stratégiques de la guerre du Chaco qui fit cent mille morts et qui opposa dans les années trente le Paraguay et la Bolivie, pays enclavés dans la partie centrale de l'Amérique du Sud.

C'est d'ailleurs sur la ligne de front du Chaco que l'on retrouve dans la seconde partie du roman des anciens insurgés de Sapukai, libérés de prison pour combattre les boliviens dans ce no man's land au relief accidenté et austère. Augusto Roa Bastos décrit avec un grand réalisme l'âpreté des combats, les souffrances extrêmes des soldats déshydratés, le problème quasi insoluble de l'acheminement de l'eau par camions-citernes...

La structure de cette oeuvre est particulière dans la mesure où chacun des dix chapitres pourrait se suffire à lui même. “Fils d'homme” n'est pas pour autant une succession de nouvelles. Un fil d'Ariane subtil relie les personnages d'un chapitre à l'autre et attise de bout en bout la curiosité du lecteur. Les événements fragmentés apparaissant ici et là, permettent au final de reconstituer une sorte de ”roman-puzzle”.

Cette particularité narrative, le cadre dépaysant de ces intrigues aux rebondissements incessants et la poésie omniprésente donnent à cette fresque historique le parfum des livres rares que l'on redécouvre avec enchantement.
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Le Paraguay , au début du XXème siècle . L'auteur nous plonge dans deux villages .Itapé , d'où est originaire le narrateur, où l'on vénère un Christ sculpté par un lépreux et Sapukai, où un médecin venu de nulle part bouleverse le quotidien local.
Ces deux bourgs sont au sud est du Paraguay, proche de l'Argentine et l'arrivée du chemin de fer bouleverse le quotidien de ce peuple d'agriculteurs, parlant la guarani et acceptant difficilement la main mise d'Ascuncion sur leur vie.

Remarquable roman retraçant plus de 20 ans de l'histoire du Paraguay depuis la révolte paysanne de 1912 jusqu'à la fin de la guerre du Chaco contre les "Boli", guerre à laquelle l'auteur a participé en tant qu'infirmier du haut de ses 17 ans.
Au gré des chapitres, l'auteur nous amène à croiser plusieurs fois les hommes de ces terres hostiles, que ce soit au village, à la guerre ou en prison. Et bien entendu, les rapports au pouvoir sont largement mis en avant.

Dénonciation du despotisme d'état, cri contre les dirigeants paraguayens, ce livre est d'une force incroyable et montre l'avilissement d'un peuple qui ne demandait qu'à cultiver sa terre , jouer aux cartes et boire du tafia ou du maté.
Et l'écriture ! Ici , on nous plonge dans la forêt dense , dans les marécages infestés, on nous entoure de moustiques gros comme des moineaux. Chaque adjectif assujetti encore un peu plus l'homme, comme si la nature sous la plume de l'écrivain se faisait complice du pouvoir pour enchainer les hommes, rendant ce texte sans doute unique.
La trame choisie par l'auteur est chronologiquement relativement linéaire mais il aborde les différentes parties du livres à travers divers personnages , même si le narrateur , acteur du roman mais surtout témoin privilégié, si l'on peut dire, n'est jamais loin.

C'est un livre qui sans être exigeant requiert un minimum de concentration, mais qui récompense grandement le lecteur de ses efforts.
Véritable plébiscite de l'homme contre la barbarie des gouvernants, ce livre est un immense témoignage de ce qu'a enduré la population paraguayenne au début du XXème.
Il y a de plus une montée en puissance tout au long de l’œuvre et à chaque chapitre fini, le poids des mots se fait encore plus fort.
Incontestablement un tour de force littéraire majeur.

En préface de ce livre , Eric Faye nous dit ceci : " Certains pays se caractérisent par leur discrétion, un goût prononcé pour la pénombre. dans la banlieue du monde, à l'écart des grands courants, ils n'attirent pas le visiteur; ils tomberaient vite dans l'oubli si , parfois, un écrivain n'accédait à la renommé mondiale. Parce que cet auteur est la seule personnalité connue à l'étranger, on en vient à l'identifier à son pays."
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Initialement conçu comme un conte, Fils d'homme suit, dans l'édition originale, une structure binaire : les chapitres impairs sont narrés à la première personne, les chapitres pairs sont confiés au lecteur à la troisième personne. Cette alternance permet d'évoquer et de représenter les événements historiques (missions jésuites, dictature, guerre de la Triple Alliance, crises politiques, guerre du Chaco…), autant à travers un personnage narrateur et intellectuel que via la vision globale d'un héros collectif, le peuple paraguayen. Par sa thématique et ses procédés narratifs autant que linguistiques, Fils d'homme constitue une oeuvre talentueuse à part dans les lettres paraguayennes. Les différentes publications de cette oeuvre connaissent trois versions, l'une d'origine, l'autre française qui rompt la structure binaire originelle des chapitres et la version espagnole de 1985 plus pertinente et retravaillée que celle française.
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Vaste épopée qui raconte l'histoire du Paraguay vu du côté des pauvres gens .

Roman remarquable qui laisse entendre et voir la grande misère et les souffrances du peuple pris en étau entre exploiteurs quasi esclavagistes, guerres, révolutions massacreuses et dictatures sur un temps qui n'en finit plus de broyer les pauvres hères.

On déambule de personnage en personnage, en se perdant parfois un peu parmi eux sans que cela n'empêche le charme du récit de fonctionner, et chaque fois l'espoir se meurt, l'avenir est sombre, toujours plus sombre.

Le projet est ambitieux et réussi même si la lecture demande de l'attention et de se pencher un peu sur l'histoire de ce petit pays pour mieux comprendre le récit.

Je n'en ferai pas mon livre de chevet mais je suis satisfaite de l'avoir lu.
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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En fouinant dans les bouquineries, je trouve souvent ce que je cherche et parfois aussi ce que je ne cherche pas vraiment, et ce fut le cas avec ce roman d'un auteur paraguayen.

Puisque le 4ᵉ de couverture parlait d'un intense chef-d'oeuvre et que je pouvais l'acquérir à petit prix, je n'ai pas hésité longtemps et hop, dans le panier d'achat.

Il tombait bien pour le Mois Espagnol et Sud-Américain et me permettrait de noircir un nouveau pays sur mon planisphère (le Paraguay).

Mais que dire sur cette lecture ? Ben, heu, en fait, heu… le plus important sera pour dire que je ne suis pas d'accord avec ce qui est dit sur le 4ᵉ : intense chef-d'oeuvre de la littérature latino-américaine. Bon, après, les goûts et les couleurs…

Ce roman est en fait constitué de plusieurs récits, comme des nouvelles (mais qui suivent un fil rouge), et qui nous racontent les us et coutumes des paysans paraguayens, début du XXᵉ siècle, vivant dans des villages retirés, ainsi que des souvenirs de l'époque, sous la dictature de Francia, bien avant.

J'ai apprécié le premier chapitre, avec un vieil homme qui raconte la mort tragique de son père, assassiné froidement par le dictateur Francia dont il était pourtant le serviteur fidèle. J'étais à fond dans l'histoire avec ce gringo, venu de nulle part et devenu une sorte de médecin. Les récits parlant de guerre, de combats, je les ai appréciés aussi.

Et puis, entre les deux, j'ai souvent décroché de ma lecture, passant des paragraphes, sautant des pages avant de perdre tout à faire le fil du récit, de mélanger les personnages et de finir par refermer ce bouquin sans avoir goûté au chef-d'oeuvre annoncé.

Je retiendrai que ce roman offre 20 ans d'histoire du Paraguay, depuis la révolte paysanne (1912) jusqu'à la fin de la guerre du Chaco contre les Boliviens (de 1932 à 1935).

Ce roman montre aussi les souffrances et la misère que vécu la population paraguayenne au début des années 1900. Pour ne pas dire "un enfer"…

Hélas, entre lui et moi, le coup de foudre n'a pas eu lieu, dommage pour moi, parce que les critiques sur Babelio étaient plus qu'élogieuses.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Dans une écriture puissante, évocatrice (on a presque envie de claquer les moustiques), une histoire en spirale avec deux villages en point central, Sapukai et Itapé, reliés par les personnages. On se perd un peu mais Augusto Roa Bastos nous rattrape, et puis on comprend que LE personnage, c'est le Paraguay, côté paysans guaranis. Un pays mystique, fou, qui a comme repères temporels l'année de la comète, les insurrections populaires réprimées, la guerre du Chaco avec les Boliviens... qui a comme géographie un Christ planté sur une colline, un quartier de lépreux, un wagon, des gares, des marais qu'on n'a pas envie de visiter, des forêts peu accueillantes, une exploitation de maté esclavagiste, un fort convoité... le tout dans un climat de soifs.
Mon édition est une réécriture 20 ans plus tard par l'auteur d'un roman paru en 1960, traduite par François Maspero dans les années 90 (la préface de l'auteur et la note du traducteur sont intéressantes, pas du tout superflues). le roman est présenté comme "chef d'oeuvre de la littérature latino-américaine" : je n'en doute pas, c'est un livre dont on sait que si on le relit, on trouvera d'autres choses. Une bibliothèque s'en est débarrassé, le voici chez moi.
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Je suis ravie d'avoir découvert ce livre qui m'a beaucoup plu ! J'ai beaucoup apprécié la plume d'Auguste Roa Bastos, une plume fine et poétique, avec de belles métaphores et beaucoup de justesse dans les descriptions.
Concernant l'histoire, nous suivons le destin de villageois au gré des tourments de l'Histoire du Paraguay au début du XXème siècle. Il y a alternance de passages drôles avec d'autres plus durs. J'ai été très intéressée par le mélange de leur langue : de l'espagnol et du guarani. L'auteur a saupoudré son texte de quelques mots ou phrases de ce dialecte. Cela m'a donné envie d'en connaître plus sur le guarani. Fait très intéressant et original également: l'auteur joue avec le lecteur. En effet le roman est déstructuré au niveau de l'espace temps, c'est à nous de remettre les chapitres dans l'ordre. Par contre, cela peut être un tout petit peu déstabilisant pour des lecteurs n'ayant aucune connaissance de l'histoire de ce pays (comme moi). de même, je me suis un peu perdue dans les personnages. Mais cela n'a en aucun cas amoindrit mon plaisir lors de cette lecture !
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Une puzzle de petites histoires qui finit par s'assembler pour nous raconter le Paraguay du début du XXème siècle. Roman poétique et philosophe qui nous conte une histoire dure durant laquelle s'enchaînent légendes, dictatures et luttes paysannes.
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C'est un roman fait de fragments, d'histoires associées pour à la fois dire celle avec un grand H et faire entendre la palpitation de ceux qui la font ou la subissent.
Cette Histoire, c'est celle, traversée par une extraordinaire violence, du Paraguay, du point de vue de deux villages perdus, distants d'une cinquantaine de kilomètres, à partir desquelles s'étendent les ramifications de l'intrigue et les destinées des personnages.

Un narrateur, que l'on retrouve dans plusieurs épisodes, plante les jalons de la période que couvre ce kaléidoscope, de ses souvenirs d'enfance qui évoquent un vieil homme ayant connu la dictature de Francia (à la fin de la première moitié du XIXème siècle) à la guerre du Chaco, à laquelle il participe au début des années 1930.

Itapé est le lieu d'un étrange culte païen initié à la mort de Gaspar Mora. Dans la retraite solitaire où la lèpre l'avait condamné à finir sa vie, il sculpta un Christ de bois que les villageois, fidèle à ce menuisier que sa générosité poussait à rembourser les dettes des agriculteurs et à procurer vêtements et vivres aux plus misérables, érigèrent en objet sacré, exhibé chaque année lors d'une procession.

Sapukai aussi eut son héros populaire, en la personne d'un gringo arrivé là dans d'obscures circonstances, qui y fonda une léproserie, et dont les dons de guérisseur lui valurent la vénération de ses concitoyens jusqu'à ce qu'il bascule dans la démence, et soit expulsé du village à coups de pieds, accusé d'avoir volé un enfant qu'il avait en réalité voulu soigner. Mais ce qui caractérise avant tout le village, c'est l'empreinte qu'y a laissé son martyre : l'explosion d'une bombe en pleine gare, faisant deux mille morts et creusant un gouffre que plusieurs décennies ne parvinrent à combler.

Et ce n'est pas là l'unique tragédie qui ponctue l'histoire de ces lieux et de ces temps prompts aux révolutions, marqués par les guérillas et les répressions sanglantes, par l'exploitation inhumaine des plus pauvres, comme en témoigne l'épisode qui prend pied dans une de ces terribles plantations de maté dont aucun fugitif n'est jamais sorti vivant.

A l'intensité et à la fureur de la réalité historique, se mêlent les légendes et les superstitions dont l'a enrobé la transmission orale, né du besoin, pour soigner la souffrance qu'elle génère, d'invoquer le merveilleux et les fantômes de héros populaires. En réponse à l'absurdité tragique de l'existence, les morts ou les disparus laissent ainsi derrière eux l'écho de leurs déchéances, l'ombre de leur folie ou de leur vain héroïsme, pendant que les vivants s'adonnent à des rites âpres et primitifs pour conjurer le malheur.

Une fresque riche de fulgurances, et d'une grande puissance d'évocation.

"L'eau palpite dans le bas ventre de la colline, dans la fourche des deux chemins qui conduisent au champ de bataille. Dans la pénombre de l'aube, elle ressemble à une vulve d'une infinie douceur, qu'ourle le duvet de végétation aquatique en fermentation sous les larges taches de moisissures, d'une odeur que l'on dirait sexuelle".
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Cet auteur est né au Paraguay. Son récit est merveilleux. Il est divisé en 10 parties, elles sont différentes et même temps on retrouve certains personnages au fil du récit. On y retrouve en toile de fond des événements comme la guerre du chaco ou les rébellions agraires. Une de ces histoires par exemple raconte comment les habitants d'un village vénèrent un Christ lépreux vivant au sommet d'une colline car l'église refuse de lui donner un abri. L'histoire n'est pas tout, la manière de la raconter fait énormément. J'ai été vraiment touchée par cette esthétique.
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