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Critique de lolo71


Tom Robbins est un écrivain à part. Un de ces auteurs américains hallucinés que je rapprocherais d'autres doux dingues tels que Richard Brautigan, John Fante, Charles Bukowski, Tristan Egolf ou John Kennedy Toole pour leur anticonformisme et leur subversion. Ses livres bousculent les codes figés de la société capitaliste, et pour ce faire mettent en pièces les règles de la fiction romanesque classique. La forme rejoint le fond, et vice-versa. J'ai lu il y a presque un an « Féroces infirmes » (il n'est plus disponible, comme tous les livres de Robbins, chez 10/18, à quand une réédition ?), l'histoire délirante d'un agent de la CIA libertaire (!), aux prises avec une étrange malédiction (ses pieds ne peuvent plus toucher le sol sous peine de mort) et avec la mystérieuse troisième prophétie de la Vierge Marie lors de son apparition à Fatima. « Une bien étrange attraction » est son premier roman, sorti en 1971 aux Etats-Unis, et édité récemment en français par les éditions Gallmeister. On les en remercie.

Amanda, jeune femme adepte de la nature et férue de papillons, voyante pratiquant la transe, « sorte de version moderne de déesse de la fertilité et de la nature » (dixit Robbins dans la postface), rencontre John Paul Ziller, magicien, musicien et sculpteur. Ils tombent amoureux. Nous sommes dans les années 60, dans l'extrême nord-ouest américain. Après avoir bourlingué tous deux dans le Cirque Indo-tibétain & le Gipsy Blues Band du Panda Géant, ils ouvrent une « attraction de bord de route », la Réserve naturelle et Stand de Hot Dogs du Mémorial du Capitaine Kendrick (ces noms sont tout un poème !), à la fois zoo et restaurant, et s'y installent avec le fils d'Amanda, Baby Thor (aux yeux électriques), et Mon Cul, le babouin de Ziller. Les y rejoint bientôt Marx Marvelous, jeune prodige scientifique en proie au doute existentiel, attiré par ce couple en qui il voit les créateurs d'une nouvelle religion. Tout irait pour le mieux si un ami de Ziller, Plucky Purcell, fils de bonne famille, ancien footballeur et dealer, n'était entré en possession d'un corps (le Corps !) - véritable bombe pour l'humanité s'il venait à être divulgué -, et n'était venu le cacher chez le couple.

Robbins donne dans la fantaisie échevelée, certes, mais ses histoires sont aussi l'occasion d'aborder des réflexions sur la philosophie, la religion, la spiritualité, la science, la nature, le sexe, d'où ressort sa prédilection pour un hédonisme solaire, pour un mysticisme joyeux. L'homme heureux est celui qui est en phase avec les autres et son environnement, qui se sent en accord avec le cosmos. Pour y parvenir, il faut lutter, car la négativité est partout à l'oeuvre. Créer, ou recréer en nous cette « Infinie Loufoquerie » chère à Amanda peut nous aider à éloigner de nous l'instinct de mort et les passions tristes. Robbins sait par son style psychédélique, ses images (Robbins est le roi de l'image), sa description de la Skagit Valley - véritable paysage chinois au coeur de l'Etat de Washington -, retranscrire cet amour de la vie et de la liberté. N'est-il pas appelé l' « écrivain le plus dangereux du monde » ? On aime ou on déteste. Mais ce qui est sûr, c'est que rien ne vous avait préparé à ça.


Lien : http://plaisirsacultiver.unb..
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