Oublier nos promesses est une belle preuve qu'
Elsa Roch tient toutes les siennes.
Pour son second roman, Elsa donne le ton dès le prologue. On effleure ceux qui vivent sur le commerce des plus faibles. On s'éloigne du polar rural de
Ce Qui se Dit la Nuit pour plonger dans un décor diamétralement opposé. Paris. Un Paris au mois d'aout, chaud poisseux, sombre, noir, sordide. Puis elle embraye sur la mort d'Emma Loury, une jeune journaliste engagée et indépendante. Un assassinat sauvage, cruel, à son domicile. le commissaire Marsac, chef de groupe du 36, est en charge de l'enquête avec son équipe.
Une des forces d'Elsa, est sans conteste, de réussir à dresser le côté psychologique de ses personnages. Elsa aime ses personnages. Elle les cisèle, les forme, les pétris. Psychologiquement, ils sont détaillés, profonds. Parfois attachants, parfois repoussants, ils promènent avec eux, leurs espoirs abandonnés, leurs failles béantes. Ses personnages sont hantés. Nombreux sont ceux qui trimbalent avec eux leurs traumas. Leurs quotidiens sont faits de cauchemars, d'une violence parfois visible, souvent sous-tendue. Par leurs entremises, ce polar devient noir et fort.
Emma était passionnée. Elle enquêtait sur les causes perdues, la prostitution nigériane, celle des filles de l'Est. Amaury Marsac est un homme brisé par un drame familial. Nous l'avons connu avec
Ce Qui se Dit la Nuit. Sa vie privée reste à la dérive, dans une attente morbide. A ses côtés, nous trouvons le capitaine Marc Raimbauld. Abandonné à la naissance, il s'est forgé autour d'un besoin d'appartenance à une grande famille telle que la Police, un besoin chevillé à un corps de 1,90 mètre et 100 kilos. de l'autre côté, il y a Jérôme Pieaud. Lui a le son des kalachnikovs qui raisonne en lui. Né de parents inconnus, placé de la DDASS, après un lycée militaire, il enchaîne les succès, jusqu'à devenir capitaine. Sous le képi, il a rejoint le 1er RPIMa, les forces spéciales et a enchainé les opérations extérieures. À son retour, il est muté à Paris mais présente tous les signes d'un SPT, syndrome de stress post-traumatique. Jérôme est le petit ami d'Emma. C'est un coupable trop idéal.
Entre Marsac et Pieaud commence une traque dans Paris, parmi ses quartiers chauds et ceux qui s'y repaissent, sauvages, âpres aux gains, sans pitié. C'est à celui des deux limiers qui réussira le premier à mettre la main sur celui ou ceux qui ont éventré Emma.
Ce second opus tient la route. Il a du corps et une âme. Nous sommes loin des polars fleurant la testostérone et le muscle saillant, loin des thrillers vifs cavalant après les cliffhangers. Elsa nous sert de beaux épigraphes qui donnent de la hauteur à chaque chapitre. Sous une écriture toujours fine et soignée à travers laquelle parfois vient poindre une certaine poésie,
Oublier nos promesses, parle d'humanité. Plutôt de son absence. Elsa est douée pour cela. Elle décortique ce que l'homme sait faire de pire, ce qui le perturbe... ou non. L'exploitation sans pitié des plus faibles. Dans une atmosphère sombre, à la brutalité évidente, jusqu'à un twist final(mais chut), des thématiques se dégagent avec vigueur, le STP, la traite des êtres humains, la misère exploitée et ceux qui s'en délectent.
Reste la résilience qui fait partie de tout un chacun. Lorsque l'on cite Hugo ou
Prévert, elle n'est jamais bien loin.
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